Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Nice

Nice

Titel: Nice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
Vom Netzwerk:
racontait la fable de l’étrangère dans sa villa de Cimiez, une
colline au-dessus de la ville, « elle veut son type, chaque nuit, un
jeune, il lui en faut ». Il tendait l’avant-bras, poing fermé, et tous
riaient. « Elle paye avec une montre. »
    Quand la mère était morte, Carlo avait donné les quelques
meubles aux cousins. Et ils étaient partis tous les trois, Vincente et Luigi
marchant derrière Carlo.
     
    — J’ai faim, répéta Maria.
    Ils avaient quitté le port et traversé la vieille ville qui
ressemblait à Mondovi avec ses ruelles, la place devant la cathédrale Sainte-Réparate,
les escaliers qui montaient vers le château, un rocher couvert de végétation
qui dominait à l’est le port et à l’ouest les toits agglutinés. Les épiciers
ouvraient leur boutique. Ils plaçaient les tonneaux ouverts où marinaient des
anchois, les petites olives noires de l’arrière-pays, la morue. Des blocs de
lard aux larges raies rouges s’entassaient à côté de morceaux d’un fromage
qu’on devinait dur, grumeleux, et qui avait l’aspect de certaines pierres
éclatées.
    — Marche, dit Carlo, retourne au port, à la baraque des
dockers.
    — Tu me laisses ?
    Maria levait la tête vers lui. « Ne nous laisse pas »,
répétait la mère. Les femmes avaient toujours peur. Elles avaient faim. Elles
pleuraient.
    — Attends-moi là-bas.
    Il fit quelques pas derrière elle, cependant qu’elle se
retournait, indécise, sa longue jupe vague, là où l’ourlet s’était défait,
traînant sur le sol, son chemisier rouge, mal serré à la taille, froissé sous
le châle. Puis elle ne se retourna plus, et il la devinait les yeux à demi
fermés, marchant tête baissée, sans voir. Il se sentait différent, Carlo, il
voulait voir, toujours, prendre même si cela fait mal. Il avait tendu son
avant-bras dans la campagne à ce paysan qui hurlait : « Voleur, je
vais te couper le poing. » Un autre tenait Carlo, lui serrant le cou dans
la saignée du bras et lui enfonçant le genou dans les reins. Et Carlo criait :
« Coupe. » Le paysan levait sa faux, gesticulait devant lui : « Voleur. »
Puis comme pour se défendre contre lui-même il avait jeté sa faux, loin dans
les blés et avait saisi sa ceinture en donnant à deux mains des coups sur les
jambes et le visage de Carlo. Quand ils l’avaient lâché, il avait le visage
couvert d’ecchymoses, les jambes meurtries et griffées. Il s’était lavé dans un
ruisseau, avait attendu la nuit couché sous un arbre et avant de rentrer chez lui,
par défi, il avait escaladé le mur de clôture du paysan. Les chiens aboyaient
dans la cour, un volet battait quelque part sur la façade des bâtiments de la
ferme mais Carlo avait sauté, trouvé le hangar où l’on place les outils et il
avait emporté une faux, la jetant plus tard dans un fourré, loin, alors qu’il
arrivait déjà aux premières maisons de Mondovi-la-basse.
    Un jour qu’il travaillait comme carrier, à l’heure de la
pause, cependant qu’il mangeait le pain et le fromage eux aussi recouverts de
poussière, ce qui leur donnait un goût de terre, il avait vu près de la galerie
de mine, un ouvrier avancer courbé, se dissimulant, la chemise gonflée. D’avoir
volé donne un instinct. Carlo s’était levé, l’avait suivi. Mais l’autre était
aussi aux aguets et après quelques mètres il lui avait fait face, tous deux
accroupis pour ne pas être découverts, tous deux s’observant.
    — Qu’est-ce que tu as pris ?
    — Fous le camp.
    — Partage.
    L’autre avait sorti un couteau.
    — Viens le prendre.
    Carlo avait estimé l’adversaire. Nerveux mais pas assez
lourd, encombré par ce qu’il cachait dans sa chemise. Il avait brusquement jeté
de la terre, une pleine main de terre fine, blanchâtre, soulevée du bout des
doigts et envoyée dans le visage de l’autre. Avant qu’il ait pu reculer, Carlo
était sur lui, le couchant sur le sol, bloquant ses bras avec les genoux.
    — Je prends, disait Carlo.
    Et il ouvrait la chemise, découvrant les bâtons de dynamite,
ronds et longs comme des bougies. Carlo se taisait cependant que l’autre sous
lui toussait, tentait de se dégager.
    — Explique-moi, demandait Carlo.
    — Qu’est-ce que tu cherches ?
    — Je veux savoir.
    Carlo se redressait, s’asseyait sur le sol et l’autre en
face de lui, les yeux rouges, boutonnait sa chemise.
    — Viens ce soir, dans ma baraque.
    Près du chantier,

Weitere Kostenlose Bücher