Odyssée
peuples. Et Athènè poussa des cris, tantôt auprès du fossé creux, hors des murs, tantôt le long des rivages retentissants. Et Arès, semblable à une noire tempête, criait aussi, soit au faîte d'Ilios, en excitant les Troiens, soit le long des belles collines du SimoÔs. Ainsi les Dieux heureux engagèrent la mêlée violente entre les deux peuples.
Et le Père des hommes et des Dieux tonna longuement dans les hauteurs ; et Poseidaôn ébranla la terre immense et les cimes des montagnes ; et les racines de l'Ida aux nombreuses sources tremblèrent, et la ville des Troiens et les nefs des Akhaiens. Et le souterrain Aidôneus, le Roi des morts, trembla, et il sauta, épouvanté, de son thrône ; et il cria, craignant que Poseidaôn qui ébranle la terre l'entr'ouvrît, et que les Demeures affreuses et infectes, en horreur aux Dieux eux-mêmes, fussent vues des mortels et des Immortels : tant fut terrible le retentissement du choc des Dieux.
Et Phoibos Apollôn, avec ses flèches empannées, marchait contre le roi Poseidaôn ; et la déesse Athènè aux yeux clairs contre Arès, et Artémis, soeur de l'Archer Apollôn, joyeuse de porter les sonores flèches dotées, contre Hèrè ; et, contre Lètô, le sage et utile Hermès ; et, contre Hèphaistos, le grand fleuve aux profonds tourbillons, que les Dieux nomment Xanthos, et les hommes Skamandros. Ainsi les Dieux marchaient contre les Dieux.
Mais Akhilleus ne désirait rencontrer que le Priamide Hektôr dans la mêlée, et il ne songeait qu'à boire le sang du brave Priamide. Et Apollôn qui soulève les peuples excita Ainéias contre le Pèléide, et il le remplit d'une grande force, et semblable par la voix à Lykaôn, fils de Priamos, le fils de Zeus dit à Ainéias :
- Ainéias, prince des Troiens, o˘ est la promesse que tu faisais aux Rois d'Ilios de combattre le Pèléide Akhilleus ?
Et Ainéias, lui répondant, parla ainsi :
- Priamide, pourquoi me pousses-tu à combattre l'orgueilleux Pèléiôn ? Je ne tiendrais pas tête pour la première fois au rapide Akhilleus. Déjà, autrefois, de sa lance, il m'a chassé de l'Ida, quand, ravissant nos boeufs, il détruisit Lymessos et Pèdasos ; mais Zeus me sauva, en donnant la force et la rapidité à mes genoux. Certes, je serais tombé sous les mains d'Akhilleus et d'Athènè qui marchait devant lui et l'excitait à tuer les Léléges et les Troiens, à l'aide de sa lance d'airain. Aucun guerrier ne peut lutter contre Akhilleus. Un des Dieux est toujours auprès de lui qui le préserve. Ses traits vont droit au but, et ne s'arrêtent qu'après s'être enfoncés dans le corps de l'homme. Si un Dieu rendait le combat égal entre nous, il ne me dompterait pas aisément, bien qu'il se vante d'être tout entier d'airain.
Et le roi Apollôn, fils de Zeus, lui répondit :
- Héros, il t'appartient aussi d'invoquer les Dieux éternels. On dit aussi, en effet, qu'Aphroditè, fille de Zeus, t'a enfanté, et lui est né d'une déesse inférieure. Ta mère est fille de Zeus, et la sienne est fille du Vieillard de la mer. Pousse droit à lui l'airain indomptable, et que ses paroles injurieuses et ses menaces ne t'arrêtent pas.
Ayant ainsi parlé, il inspira une grande force au prince des peuples, qui courut en avant, armé de l'airain splendide. Mais le fils d'Ankhisès, courant au Pèléide à travers la mêlée des hommes, fut aperçu par Hèrè aux bras blancs, et celle-ci, réunissant les Dieux, leur dit :
- Poseidaôn et Athènè, songez à ceci dans votre esprit : Ainéias, armé de l'airain splendide, court au Pèléide, et Phoibos Apollôn l'y excite.
Allons, écartons ce Dieu, et qu'un de nous assiste Akhilleus et lui donne la force et l'intrépidité. qu'il sache que les plus puissants des Immortels l'aiment, et que ce sont les plus faibles qui viennent en aide aux Troiens dans le combat. Tous, nous sommes descendus de l'Ouranos dans la mêlée, afin de le préserver des Troiens, en ce jour ; et il subira ensuite ce que la destinée lui a filé avec le lin, depuis que sa mère l'a enfanté. Si Akhilleus, dans ce combat, ne ressent pas l'inspiration des Dieux, il redoutera la rencontre d'un Immortel, car l'apparition des Dieux épouvante les hommes.
Et Poséidaôn qui ébranle la terre lui répondit :
- Hèrè, ne t'irrite point hors de raison, car cela ne te convient pas. Je ne veux point que nous combattions les autres Dieux, étant de beaucoup plus forts qu'eux. Asseyons-nous hors de la
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