Odyssée
point leurs demeures creuses, mais défendent leur jeune famille contre les chasseurs, voici que ces deux guerriers, seuls devant les portes, ne reculent point, attendant d'être morts ou vainqueurs.
Il parla ainsi, mais il ne fléchit point l'‚me de Zeus qui, dans son coeur, voulait glorifier Hektôr.
Et d'autres aussi combattaient autour des portes ; mais, à qui n'est point dieu, il est difficile de tout raconter. Et çà et là, autour du mur, roulait un feu dévorant de pierres. Et les Argiens, en gémissant de cette nécessité, combattaient pour leurs nefs. Et tous les Dieux étaient tristes, qui soutenaient les Danaens dans les batailles.
Et, alors, le robuste fils de Peirithoos, Polypoitès, frappa Damasos de sa lance, sur le casque d'airain ; mais le casque ne résista point, et la pointe d'airain, rompant l'os, écrasa la cervelle, et l'homme furieux fut dompté. Et Polypoitès tua ensuite Pylôn et Ormènios. Et le fils d'Antimakhos, Léonteus, nourrisson d'Arès, de sa lance perça Hippomakhos à
la ceinture, à travers le baudrier. Puis, ayant tiré l'épée aiguÎ hors de la gaine, et se ruant dans la foule, il frappa Antiphatès, et celui-ci tomba à la renverse. Puis, Léonteus entassa Ménôn, Iainènos et Orestès sur la terre nourricière.
Et tandis que les deux Lapithes enlevaient leurs armes splendides, derrière Polydamas et Hektôr accouraient de jeunes guerriers, nombreux et très-braves, pleins du désir de rompre la muraille et de br˚ler les nefs. Mais ils hésitèrent au bord du fossé. En effet, comme ils allaient le franchir, ils virent un signe augural. Un aigle, volant dans les hautes nuées, apparut à leur gauche, et il portait entre ses serres un grand dragon sanglant, mais qui vivait et palpitait encore, et combattait toujours, et mordait l'aigle à la poitrine et au cou. Et celui-ci, vaincu par la douleur, le laissa choir au milieu de la foule, et s'envola dans le vent en poussant des cris. Et les Troiens frémirent d'horreur en face du dragon aux couleurs variées qui gisait au milieu d'eux, signe de Zeus tempétueux. Et alors Polydamas parla ainsi au brave Hektôr :
- Hektôr, toujours, dans l'agora, tu repousses et tu bl‚mes mes conseils prudents, car tu veux qu'aucun guerrier ne dise autrement que toi, dans l'agora ou dans le combat; et il faut que nous ne servions qu'à augmenter ton pouvoir. Mais je parlerai cependant, car mes paroles seront bonnes.
N'allons point assiéger les nefs Akhaiennes, car ceci arrivera, si un vrai signe est apparu aux Troiens, prêts à franchir le fossé, cet aigle qui, volant dans les hautes nuées, portait entre ses serres ce grand dragon sanglant, mais vivant encore, et qui l'a laissé choir avant de le livrer en p‚ture à ses petits dans son aire. C'est pourquoi, même si nous rompions de force les portes et les murailles des Akhaiens, même s'ils fuyaient, nous ne reviendrions point par les mêmes chemins et en bon ordre; mais nous abandonnerions de nombreux Troiens que les Akhaiens auraient tués avec l'airain, en défendant leurs nefs. Ainsi doit parler tout augure savant dans les prodiges divins, et les peuples doivent lui obéir.
Et Hektôr au casque mouvant, le regardant d'un oeil sombre, lui dit :
- Polydainas, certes, tes paroles ne me plaisent point, et, sans doute, tu le sais, tes conseils auraient pu être meilleurs. Si tu as parlé
sincèrement, c'est que les Dieux t'ont ravi l'intelligence, puisque tu nous ordonnes d'oublier la volonté de Zeus qui tonne dans les hauteurs, et les promesses qu'il m'a faites et confirmées par un signe de sa tête. Tu veux que nous obéissions à des oiseaux qui étendent leurs ailes ! Je ne m'en inquiète point, je n'en ai nul souci, soit qu'ils volent à ma droite, vers
…ôs ou Hélios, soit qu'ils volent à ma gauche, vers le sombre couchant.
Nous n'obéirons qu'à la volonté du grand Zeus qui commande aux hommes mortels et aux Immortels. Le meilleur des augures est de combattre pour sa patrie. Pourquoi crains-tu la guerre et le combat ? Même quand nous tomberions tous autour des nefs des Argiens, tu ne dois point craindre la mort, car ton coeur ne te pousse point à combattre courageusement. Mais si tu te retires de la mêlée, si tu pousses les guerriers à fuir, aussitôt, frappé de ma lance, tu rendras l'esprit.
Il parla ainsi et s'élança, et tous le suivirent avec une clameur immense.
Et Zeus qui se réjouit de la foudre souleva, des cimes de l'Ida, un
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