Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome IV.
alliés peuvent à la fois faire la guerre à l'Autriche et à l'Espagne, lorsque, sans alliés, elle a vaincu quatre coalitions dix fois plus redoutables ; n'importe, les Anglais verraient avec plaisir l'Autriche faire la guerre dans le même esprit qu'ils ont excité la coalition de la Prusse, quoiqu'ils prévissent bien ce qui arriverait à la Prusse ; mais ils vivent au jour le jour ; une guerre qui ne durerait que six mois, serait toujours autant de gagné pour eux ; ils ne songent pas au résultat qui ne pourrait qu'empirer leur position.
[Le journaliste regardait comme un devoir du gouvernement anglais de fournir à ses alliés des subsides et des munitions.]
L'Angleterre connaît l'étroite union qui existe entre la France et la Russie ; elle sait que ces deux grandes puissances sont résolues à réunir leurs forces, et à reconnaître pour ennemi tout ami de l'Angleterre ; elle sait que la paix ne sera pas troublée en Allemagne, et elle ne conserve aucun espoir raisonnable de succès définitifs, en fomentant des troubles et des désordres en Espagne ; elle sait que c'est du sang et des victimes inutiles ; mais cet encens lui est agréable ; les déchiremens du continent sont ses délices ; elle sait bien aussi qu'avant que l'année soit révolue, il n'y aura pas un seul village d'Espagne insurgé, pas un Anglais sur cette terre : mais qu'importe à l'Angleterre ? elle ne connaît ni honte ni remords ; ses armées se rembarqueront et abandonneront ses dupes ; elle traitera les insurgés d'Espagne comme elle a traité le roi de Suède. Elle a mis les armes à la main à ce souverain, l'a flatté d'un secours puissant : vingt ou trente mille hommes devaient le secourir contre le Danemarck et contre la Russie ; mais les promesses sont faciles. Le général Moore et cinq mille hommes sont arrivés et sont restés deux mois mouillés sur la côte de Suède, pendant que la Finlande était conquise, et que les Suédois étaient chassés de la Norwège. Il y a peu de semaines, nous cherchions comment l'Angleterre pourrait se tirer avec honneur de cette lutte folle du Nord ; si elle débarque une armée, disions-nous, cette armée sera prise pendant l'hiver ; nous ne pouvions nous attendre, quelque mauvaise opinion que nous eussions de la bonne foi britannique, que cette perfide puissance abandonnerait la Suède à son malheureux sort, et sortirait de là en donnant de nouvelles preuves de ce que les alliés de l'Angleterre ont à attendre d'elle ; trahison et abandon. Les insurgés espagnols seront trahis et abandonnés de même lorsque l'aigle française couvrira de ses ailes toutes les Espagnes.
L'ineptie, le défaut de courage d'esprit ont fait essuyer quelques échecs à nos armes ; ils seront promptement réparés, et alors les Anglais se précipiteront sur leurs vaisseaux ; ils abandonneront leurs alliés, et, comme à Quiberon, tireront sur les malheureux qu'ils auront laissés sur le rivage.
Quant à l'Autriche, la paix sera maintenue sur le continent, parce que l'Angleterre y est sans influence. Le mépris et la haine qu'elle inspire sont communs à toutes les grandes puissances ; toutes ont été ses victimes ; M. Adair a été chassé de Vienne, le jour où M. de Staremberg est revenu de Londres.
Les armemens faits par l'Angleterre sous pavillon américain, qu'escortaient à Trieste des frégates anglaises, ont été repoussés et proscrits par un dernier édit de l'empereur François II. La bonne intelligence n'a pas cessé de régner entre l'Autriche et la France.
Les agens obscurs que l'Angleterre solde, et qui se cachent dans cette foule d'escrocs que poursuit la police de tous les gouvernemens de l'Europe, ont dit à Vienne que la France allait faire la guerre à l'Autriche ; et à Paris, que l'Autriche levait de nouvelles armées pour attaquer la France. Les oisifs avides de nouvelles et d'émotions, ont pu, sur ces obscures rumeurs, supposer des marches, des contremarches, et bâtir des plans de campagne aussi frivoles qu'eux ; mais les deux cabinets n'ont pas cessé d'être dans les relations les plus amicales. Dans l'entrevue que l'empereur Napoléon a eue avec l'empereur Francois II en Moravie, l'empereur François lui promit qu'il ne lui ferait plus la guerre. Ce prince a prouvé qu'il tenait sa parole. Il est curieux de voir que, tandis que le cabinet d'Autriche assure et déclare qu'il est bien avec la France, que la France publie les mêmes assurances ; il est
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