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Piège pour Catherine

Piège pour Catherine

Titel: Piège pour Catherine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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crois ?
    — Votre mémoire est fidèle, messire. Mon oncle, Mathieu Gautherin, tient, en effet, encore à ce jour, commerce de draps dans la rue du Griffon à l'enseigne du Grand Saint-Bonaventure. Il nous avait recueillies, ma mère, ma sœur et moi, quand nous avions dit fuir Paris, chassées par les fureurs de Caboche. Car je ne viens pas d'un château aussi noble que perdu au fond des campagnes, messire de Lallier : je suis née à Paris, sur le Pont-au-Change et il vous souvient peut-être de mon père, l'orfèvre Gaucher Legoix qui vous faisait de si belles aiguières...
    Un même tressaillement fit frémir le vieux Prévôt et le Connétable.
    — Legoix ? fit ce dernier, qu'est-ce à dire ?

    — C'est-à-dire qu'avant de m'appeler Catherine de Brazey, fit la jeune femme, puis ensuite Catherine de Montsalvy, je me suis appelée Catherine Legoix, tout uniment, Monseigneur, et que je suis cousine de l'homme que vous voulez venger. Sa cousine et sa victime, car je vous aurais moi-même demandé sa tête si mon époux ne l'avait tué.
    — Pour quelle raison ? Les Montsalvy, je gage, n'étaient rien, alors, pour la famille d'un orfèvre, sinon peut-être... des clients ?
    La nuance dédaigneuse n'échappa pas à Catherine qui n'osa pas regarder Tristan, dont elle se rappelait la mise en garde concernant les dangers qu'il y avait à révéler son origine. Mais elle n'était pas femme à rougir de sa parenté et, ayant révélé sa roture, elle entendait la proclamer et en faire l'ultime défense de son noble époux.
    Aussi n'y avait-il pas la moindre trace d'humiliation dans ses grands yeux couleur de violette quand elle les posa sur Richemont, mais, au contraire, une sorte de fierté hautaine dont il eut conscience.
    — Non, ce n'étaient pas des clients ! Ils nous étaient même tout à fait inconnus et ce n'est pas pour le meurtre de Michel de Montsalvy que je vous aurais demandé le gibet pour Legoix : c'est pour avoir pendu mon père, son cousin, à l'enseigne de sa boutique et pour avoir incendié notre maison ensuite. En effet, Michel, meurtri et traîné à l'abattoir, avait pu s'échapper et trouver refuge en notre demeure où je l'avais caché. La trahison d'une servante l'a livré. Et, malgré mes larmes et mes supplications, j'ai vu, de mes yeux vu - et je n'avais que treize ans -, Guillaume Legoix lever son tranchoir de boucher pour abattre un garçon de dix-sept ans qui n'avait pas d'armes et qu'une foule massacrait...
    Encouragée par le murmure d'horreur et de réprobation soulevé par ses paroles, elle cessa tout à coup de s'adresser à Michel de Lallier, pour se tourner, brusquement agressive, vers le Connétable :
    — Ce jour-là, Monseigneur, dans l'hôtel Saint-Pol envahi par la populace, j'ai vu celle qui est aujourd'hui votre épouse, mais qui était alors Madame la duchesse de Guyenne, je l'ai vue, en larmes, supplier à genoux son père et cette populace d'épargner un adolescent qui était son page et qu'elle aimait particulièrement !
    » Le page que moi, fillette sans force et sans protection, j'ai failli sauver ! Si elle était ici, Madame de Richemont serait la première à vous demander la grâce du frère de son serviteur massacré et à vous prier, avec tout son amour, d'adoucir votre rigueur.

    Le regard bleu du prince breton vacilla, échappa à celui de Catherine.
    — Ma femme... murmura-t-il.
    — Mais oui, votre femme ! Avez-vous donc oublié le duel d'Arras où, sous les armes royales de France, Arnaud de Montsalvy affronta le jugement de Dieu pour l'honneur de son prince ? La duchesse de Guyenne que l'on venait de vous fiancer, après vous en avoir demandé permission, n'a-t-elle pas attaché elle-même ses couleurs à la lance de mon époux ? Souvenez-vous, Monseigneur ! Son amitié pour ceux de notre maison est plus ancienne que la vôtre !
    Richemont secoua la tête comme pour en chasser une pensée importune.
    — Plus ancienne ? De bien peu car c'est à Azincourt que j'ai rencontré Montsalvy pour la première fois et l'ai vu combattre.
    Une lutte, visiblement, se livrait en Richemont à l'évocation de ces souvenirs et ce combat, au fond, Catherine sentait qu'il souhaitait le perdre mais qu'il n'avait plus le pouvoir de trancher le débat au point où il en était venu. Ce pouvoir, celui de décider, il appartenait tout entier à ce beau vieillard en robe de velours grenat qui la regardait d'un air songeur.
    Elle tourna vers lui son appel et ses supplications

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