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Révolution française Tome 2

Révolution française Tome 2

Titel: Révolution française Tome 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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il
lui semble qu’il peut d’autant mieux l’engager, et en tout cas lui donner la
signification la plus haute, en célébrant le 20 prairial (8 juin) la fête de l’Être
suprême.
    Il est le président de la Convention.
    Il marche des Tuileries au Champ-de-Mars à la tête de tous
les députés.
    Il a revêtu un habit bleu céleste serré d’une écharpe
tricolore. Il tient un bouquet de fleurs et d’épis à la main.
    La foule est immense. Les façades décorées de fleurs et de
feuillages.
    La musique de Gossec et de Mehul rythme la marche.
    Puis Robespierre parle d’une voix de prédicateur.
    Devant la statue de la Sagesse, il met le feu à des
mannequins qui symbolisent l’athéisme, l’ambition, l’égoïsme et la fausse
simplicité.
    Il officie. Il n’entend pas les moqueries des conventionnels.
Ni la voix de Lecointre qui ose le traiter de « tyran ». Il ne voit
pas les députés, qui « abandonnent la fête et s’en vont se rafraîchir en
ville chez un cafetier ».
    Il parle une seconde fois, prononce une prière à l’Éternel, puis
il prend la tête du cortège, qu’ouvre un char traîné par des bœufs aux cornes
dorées.
    Au Champ-de-Mars, « des hymnes, des décharges d’une
artillerie tonnante, des cris de “Vive la République !”, ont terminé la
plus majestueuse des fêtes ».
    Maximilien Robespierre a vécu son rêve. Mais quand il rentre
chez les Duplay, il dit :
    « Vous ne me verrez plus longtemps. »
    Il n’est pas dupe, le lendemain, de ce qu’écrivent les
journaux aux ordres.
    « Jamais la joie n’a été plus vive et plus sage à la
fois. Jamais cérémonie publique n’a été en même temps plus animée et plus
régulière. Le vent frais du couchant qui a régné toute cette belle journée a
empêché de sentir ni la chaleur ni la fatigue. »
    Deux jours plus tard, Couthon fait voter cette loi, dite de
Prairial, qui laisse les inculpés sans défense devant le Tribunal
révolutionnaire.
    C’est la Grande Terreur.
    Et la Convention a même décrété que les douze armées de la
République ne feraient plus de prisonniers.
    Décret qui ne sera pas appliqué par les généraux, mais qui
donne la mesure de l’exaltation patriotique confinant au fanatisme qui fait
même renoncer aux principes d’humanité :
    Le régiment de Sambre-et-Meuse
    Marchait toujours au cri de liberté
    Sur la route glorieuse
    Qui l’a conduit à l’immortalité.
    On marche en entonnant Le Chant du départ :
    La République nous appelle
    Sachons vaincre ou sachons mourir
    Un Français doit vivre pour elle
    Pour elle un Français doit mourir.
    Et le Comité de salut public célèbre le sacrifice des marins
du Vengeur du peuple qui, en rade de Brest, a permis à un convoi de cent
cinquante navires chargés de blé d’échapper à la flotte anglaise.
    Vérité ? Légende, pieux mensonge ? Le Vengeur
du peuple aurait coulé au moment où il se rendait à l’ennemi.
     
    Ainsi le rêve se brise, ou côtoie une réalité contradictoire,
hostile.
    « Robespierre est revenu de la procession – la fête de
l’Être suprême –, écrit un témoin, le libraire-imprimeur Ruault, comme il y
était allé, couvert d’applaudissements par les gens de son parti et les
exécrations secrètes de ceux qui ont horreur du sang humain qu’il fait verser
plus abondamment que jamais depuis la loi du 22 prairial.
    « Le Tribunal révolutionnaire envoie maintenant des
condamnés à mort par six ou sept charrettes à la fois. On a changé la scène des
massacres : c’est à la barrière du Trône qu’on les fait mourir par
soixante ou quatre-vingts. On y établit des couloirs souterrains pour recevoir
le sang qui infectait le voisinage dans la chaleur de cet été…
    « Nous avons vu périr ces dernières semaines ce qui
restait de plus grand et de plus illustre en France et aussi ce qu’il y avait de
plus riche.
    « On fait traverser aux condamnés pour aller au lieu de
supplice la partie la plus populeuse et la plus mouvante : il n’y a
presque pas de jour que les allant et venant ne voient parmi ce nombre de
victimes quelqu’un de leur connaissance, un ami, un parent…
    « Au Tribunal révolutionnaire, on comparaît au nombre
de cinquante, soixante, soixante-dix, assis sur une estrade à cinq ou six rangs…
Pour la forme encore on mêle dans ce nombre d’accusés quelques individus censés
coupables de quelques paroles indiscrètes et on les acquitte pour se donner un
air de

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