Robin
l’oiseau.
Pars !
— Hors de question !
s’écria Bran, qui se mit en quête d’un bâton, le ramassa, se retourna et
l’envoya sur le pénible volatile. Tais-toi ! »
Le bâton atteignit le perchoir du
corbeau, et l’oiseau s’envola dans un cri pareil à un rire aux oreilles de
Bran : « Ah, ah, aaah ! Ah, ah, aaah ! »
« Stupide volatile », marmonna-t-il.
Se retournant vers le marcassin étendu à ses côtés, il se rappela ce que les
autres chasseurs faisaient avec du petit gibier. Libérant la corde de son arc,
il l’attacha autour des courtes pattes de la créature et entreprit d’attacher
les sabots. Puis, après y avoir passé la branche de l’arc et agrippé celle-ci
des deux mains, il essaya de soulever le tout. La carcasse restait trop lourde
pour lui, aussi commença-t-il à tramer son trophée à travers la forêt en
s’aidant de son arc.
Même en suivant les sentiers
battus, il progressait avec lenteur, s’arrêtant fréquemment pour ôter la sueur
de ses yeux et reprendre sa respiration. Autour de lui, la lumière du jour
diminuait inexorablement.
Peu importait. Rien ne le ferait
abandonner. Empoignant de plus belle la branche de son arc, il poursuivit sa
marche à grand-peine, pas après pas, tirant le jeune sanglier tout en cherchant
des yeux la lisière de la forêt. Les dernières lueurs du crépuscule
s’éteignaient à l’ouest de la vallée.
« Bran ! »
Le cri le fit sursauter. Ce n’était
pas le corbeau cette fois, mais une voix qu’il connaissait. Il se retourna.
Dans la pente qui menait jusqu’à la vallée, il vit Iwan marcher dans sa
direction ; ses longues jambes parcouraient prestement la distance qui les
séparait.
« Là ! l’appela Bran,
tout en remuant ses bras endoloris au-dessus de sa tête. Je suis là !
— Par tous les saints et les
anges, gronda le jeune homme lorsqu’il se fut suffisamment rapproché pour
parler, qu’est-ce que tu fabriques dehors ?
— Je chasse », lui
répondit Bran. Montrant sa proie avec une fierté de chasseur, il ajouta :
« Il a croisé la route de ma flèche, tu vois ?
— Je vois. » Après avoir
jeté un coup d’œil au sanglier, Iwan tourna les talons et repartit :
« Allons-y. Il se fait tard, et tout le monde te cherche. »
Bran demeura immobile.
Regardant derrière lui, Iwan
reprit : « Laisse-le, Bran ! Tout le monde te cherche. Nous
devons nous dépêcher.
— Non, répondit Bran. Pas sans
le marcassin. » Il se pencha à nouveau sur la carcasse, attrapa la branche
de l’arc et recommença à tirer.
Iwan revint sur ses pas, le prit
brutalement par le bras et le poussa sans ménagement. « Je te dis de
laisser ça ici !
— C’est pour ma
mère ! » cria le garçon au bord des larmes. Quand celles-ci
commencèrent à couler, il baissa la tête et répéta, plus doucement :
« S’il te plaît, c’est pour ma mère.
— Espèce de Judas
pathétique ! » Iwan poussa un soupir exaspéré, mais s’adoucit.
« Allez, viens. Nous allons le porter ensemble. »
Iwan prit la branche de l’arc par
un côté, Bran par l’autre, et ils soulevèrent la carcasse du sol. Le bois ploya
mais ne se brisa pas, et tous deux reprirent leur route – Bran trébuchant
sans cesse dans ses vains efforts pour tenir le rythme des longues jambes de
son ami.
La nuit était tombée sur eux. Le
caer s’élevait au loin, indistincte et sombre éminence au centre de la vallée.
Soudain, une partie des cavaliers partis à sa recherche leur apparut. « Il
chassait, les informa Iwan. Un chasseur ne laisse pas sa prise derrière lui. »
Les hommes s’en contentèrent. Le
marcassin fut rapidement attaché derrière la selle d’un des chevaux ; Bran
et Iwan montèrent derrière d’autres cavaliers, et la troupe prit aussitôt la
direction du caer. À leur arrivée, Bran glissa du cheval et fila jusqu’aux
appartements de sa mère, situés derrière la grande salle.
« Dépêchez-vous ! cria-t-il. Apportez le sanglier ! »
Des bougies éclairaient la chambre
de la reine Rhian ; deux femmes se tenaient auprès de son lit quand Bran y
fit irruption. Il courut à son chevet et s’agenouilla. « Mère !
Regardez ce que je vous ai apporté ! »
Elle ouvrit les yeux et finit par
reconnaître son enfant. « Te voici, mon chéri. On m’a dit que tu étais
introuvable.
— Je suis allé chasser,
annonça-t-il. Pour vous.
— Pour moi, murmura-t-elle.
Comme c’est
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