Serge Fiori : s'enlever du chemin

dans le cadre de l’émission Demandes spéciales, en
2000, que Nanette renoue avec Serge pour la première fois.
Invitée spéciale ce soir-là, elle reçoit les témoignages des
personnes qui ont marqué son existence. Sur la musique
d’ Un musicien parmi tant d’autres, chacun lui a composé
des paroles, et à sa grande surprise, Serge Fiori lui-même
apparaît dans un message touchant, enregistré sur vidéo,
dans lequel il l’appelle Sweetie pie .
    Émue aux larmes, elle s’empresse de l’appeler tout de
suite après l’émission. Nanette se réjouit d’avoir renoué
avec Serge, et s’avoue surtout soulagée qu’il ne soit plus
en colère contre elle. Ils se reverront de temps en temps,
mais n’iront plus jamais au-delà de l’amitié. Lorsque nous
l’avons rencontrée pour rédiger ce livre, elle lançait son
vingt et unième album en carrière. Elle nous a déclaré,
la voix chargée d’émotion   : «   J’aurais beaucoup aimé que
Serge m’écrive une chanson pour cet album. Je l’aime tellement, je l’admire tellement, comme auteur-compositeur
et musicien, mais aussi comme personne. La personne
qu’il est, c’est magnifique. J’ai été tellement inspirée avec
Serge, j’ai chanté comme jamais sur notre album. Ma performance vocale, je la dois à Serge, à sa motivation et à son
inspiration.   »
    En ce qui concerne Serge Fiori, évoquer Nanette dans le
cadre de la recherche pour ce livre fut difficile. Certes, il a
été blessé et choqué, et il a été en colère contre elle, mais
il conserve tout de même de très beaux souvenirs de leur
relation. Il ne voudrait surtout pas laisser une impression
négative ou amère de Nanette   : au contraire, Serge lui demeure attaché et se considère privilégié d’avoir partagé des
moments de vie avec Nanette l’envoûtante, l’inaccessible,
la charismatique, l’aventurière, la déterminée, l’intense, la
grande beauté et surtout, Nanette la grande artiste.
    Après la création de l’album de Nanette, Serge Grimaux
rend souvent visite à Serge, rue Saint-Laurent. Ouvrons une
parenthèse et parlons de cet homme. La première fois qu’il
a rencontré Fiori, c’est au début des années 1980, au restaurant Le Jardin Saint-Denis, où lui-même travaillait comme
serveur, et où Fiori avait l’habitude d’aller manger. Serge
Grimaux travaillait déjà, à l’époque, pour la firme de production de spectacles Donald K. Donald. Ce jour-là, Serge
Fiori avait oublié sa veste de jean et Grimaux l’avait suivi
pour la lui rapporter, l’appelant avec déférence «   monsieur
Fiori   ». Quelque temps plus tard, un type de la compagnie
de disques CBS avait appelé Grimaux, lui mentionnant que
Serge Fiori aimerait obtenir deux billets pour le spectacle
de Madonna. Grimaux avait accepté de lui offrir les billets,
mais il souhaitait les lui remettre lui-même afin d’être certain que personne n’usurpe l’identité du musicien pour se
les procurer frauduleusement. Au coin des rues Atwater et
de Maisonneuve, Grimaux et Fiori se sont donc rencontrés
pour l’échange des billets   ; par la suite, Grimaux a croisé
Serge une troisième fois, cette fois par l’entremise de Nanette   ; dès lors, ils sont devenus amis.
    Grimaux négocie donc deux campagnes publicitaires
importantes pour Serge   : une pour Bell Canada, et l’autre,
pour Hydro Québec. Fiori a le mandat de composer, pour
chaque compagnie, un thème principal et quelques thèmes secondaires, de quinze ou trente secondes, destinés à
la radio ou à la télévision. Il adore cela, d’autant plus qu’il
est parfaitement équipé pour enregistrer ce genre de matériel. Le seul problème que rencontre Serge, à l’époque,
c’est la perception que les gens du milieu ont de lui   : on le
prétend inaccessible, on s’imagine qu’il ne fait que ce qu’il
veut, à sa manière, et qu’il est hors de prix. Heureusement
que ces idées préconçues ne pénétraient pas tous les milieux, sinon comment aurait-il gagné sa vie   ?
    Fiori a toujours su tirer parti des occasions qui se pré
sentaient sur le plan professionnel   ; la composition de musique de film apparaît au bon moment dans sa carrière. Il
ne manquait, à son équipement de pointe, qu’un écran
géant, qu’il achètera le moment venu. Il se convainc qu’il
gagnerait bien sa vie s’il composait pour le cinéma. Il est
sensible à l’image, aux couleurs, aux