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1943-Le souffle de la victoire

1943-Le souffle de la victoire

Titel: 1943-Le souffle de la victoire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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comme
lui.
    « Regardez-le, regardez ces yeux de serpent ! Beria
ferait mieux de porter des vraies lunettes au lieu de ce pince-nez ridicule
avec des verres blancs ! »
    Mais outre l’angoisse qui le tenaille à l’idée de prendre l’avion,
Staline est irrité par les lenteurs de ses alliés à s’engager réellement, à
lancer l’opération Overlord  !
    Il les soupçonne d’arrière-pensées : ils veulent que la
Russie soit saignée par la guerre, qu’elle s’épuise à écraser le Reich, soit
victorieuse, mais en lambeaux !
    Churchill évoque toujours un débarquement dans les Balkans !
    Imagine-t-il, ce vieil antibolchevique, qu’on ne voit pas le
but de sa manœuvre : bloquer l’avance de l’armée Rouge, dominer la
Yougoslavie, sauvegarder l’indépendance de la Pologne !
     
    Roosevelt paraît plus résolu à tenir les promesses au sujet
du second front. Mais aucun général n’a encore été désigné pour diriger cette
opération décisive.
    C’est Roosevelt pourtant qu’il faut circonvenir, convaincre,
et d’autant plus que l’entente russo-américaine est le moyen de saper l’influence
de Churchill.
    Il est prévu qu’on célèbre ici, à Téhéran, le
soixante-neuvième anniversaire du Premier ministre britannique. Mais ce doit
être l’unique satisfaction qu’on lui accorde !
     
    Staline invite Roosevelt à résider à l’ambassade soviétique
située avec plusieurs villas et bungalows à l’intérieur d’un grand parc ceint
de hauts murs. Le domaine a appartenu à un prince persan.
    Staline argue que la sécurité du président des États-Unis
sera facile à assurer, puisque les déplacements de Roosevelt seront peu
nombreux.
    Les agents américains en doutent mais Roosevelt hausse les
épaules : il veut avoir un tête-à-tête avec Staline. Le Géorgien, le grand
partenaire de l’après-guerre, et non Churchill, un allié sûr, mais le temps des
empires coloniaux est révolu. Ce qui vaut pour de Gaulle vaut pour Churchill.
     
    Staline, de sa résidence, regarde la voiture de Roosevelt
entrer ce 28 novembre dans le parc.
    Les agents des services secrets américains, mitraillettes
appuyées à la hanche, sont installés sur les marchepieds de la voiture
présidentielle.
    Beria, retirant son lorgnon, secoue la tête, murmure avec
dédain que ces Américains sont des amateurs !
    Staline le rabroue.
    « Savent-ils que nous les avons mis sur écoute ? »
demande-t-il.
    Beria balbutie et Staline le perce d’un regard méprisant.
     
    C’est vers 15 heures que les deux hommes d’État se
rencontrent dans les appartements du président des États-Unis.
    « Bonjour, maréchal Staline », dit Roosevelt.
    Il tend la main, le buste droit, assis dans son fauteuil
roulant, élégant dans un costume bleu.
    Staline, en uniforme, l’étoile dorée de l’ordre de Lénine
épinglée sur la poitrine, paraît venir d’un autre monde, selon le diplomate
américain Bonlen.
    Avec sa peau mate et grêlée, ses cheveux gris, ses yeux
jaunes, sa démarche pesante et aussi pataude que celle d’un ours, Staline ressemble
au modèle parfait d’un « ancêtre asiatique ».
     
    Le « tour d’horizon » entre les deux hommes est
bref, mais suffisant pour que l’un et l’autre laissent entendre qu’ils sont les
seuls Grands. Roosevelt a évoqué le premier l’affaiblissement de l’Empire britannique.
Staline l’a approuvé et a insisté sur la nécessité de l’ouverture du second
front. Roosevelt a trouvé l’exigence légitime.
     
    À 16 heures, les Trois Grands se retrouvent. Staline et
Churchill s’accordent pour que Roosevelt préside la réunion.
    « Bien sûr, dit Roosevelt, puisque je suis le plus
jeune.
    — L’avenir de l’humanité est entre nos mains », dit
Churchill.
    Staline lève lentement le bras, comme un élève appliqué qui
demande la parole.
    Il ouvre la bouche, laisse voir ses dents noires et cariées,
puis il parle d’une voix sourde.
    « Nous sommes privilégiés par l’Histoire qui nous a
conféré un grand pouvoir ainsi que d’immenses possibilités », dit-il.
    Il attend que les traducteurs achèvent de traduire pour
ajouter, solennel :
    « Messieurs, la conférence est ouverte. »
     
    On discute de l’opération Overlord et Churchill, qui
défend l’idée d’une nouvelle opération en Méditerranée, découvre avec
effarement et colère que Roosevelt appuie Staline, allant jusqu’à lui faire des
clins d’œil

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