À La Grâce De Marseille
réfléchir, et maintenant son esprit bouillonnait tandis que son sexe s’enfonçait dans les profondeurs chaudes et douces de la fille.
Il la regarda. Elle aussi le regardait, et il se plongea dans ses grands yeux marron. Elle, c’était la première fois qu’elle le regardait vraiment. Quelques instants plus tard, elle ferma les paupières et commença à onduler des hanches, d’abord lentement, puis plus vite, puis de nouveau lentement, tout en poussant de petits gémissements tels que Charging Elk n’en avait jamais entendu. Il se cambra et sentit sa semence lui échapper pour gicler en elle qui lâcha un cri soudain, dressée sur lui, avant de s’abattre contre sa poitrine. Il retomba sur le lit et ferma les yeux pour se protéger de l’éclat de la lampe.
Marie Colet, assise à la longue table de la cuisine, écoutait d’une oreille distraite les autres filles parler des hommes avec qui elles étaient montées la veille. Il était à peine plus de midi et, comme d’habitude, elle dormait encore à moitié.
« Regardez mes bras. Et là…» La fille en face d’elle, Aimée, se leva et écarta les pans de sa robe de chambre. « Voilà », reprit-elle, désignant un bleu à l’intérieur de sa cuisse parfaite, une lueur de triomphe dans les yeux.
« Tu devrais le dire à Olivier, ou à Gérard. Ces beaux messieurs ne peuvent pas nous maltraiter comme ça.
— Bah, autant aller raconter à un singe que tu n’aimes pas ses puces. Ça ne servirait à rien.
— Et maintenant, il va falloir que je m’achète une nouvelle robe parce qu’il a déchiré la seule de bien qui me restait. Un juge, en plus, vous vous rendez compte ?
— Passe-moi le beurre, Chantal. Et ne mange pas tous les croissants. Tu es déjà assez grosse comme ça. »
Marie, l’air absent, remua son café crème qui était maintenant froid. Elle était plus fatiguée que de coutume et craignait de couver quelque chose. Elle se prenait presque à espérer que c’était le cas, car ainsi elle n’aurait pas à travailler ce soir. De toute façon, cela n’en valait guère la peine. Les dimanches soir étaient toujours très calmes. Les bons bourgeois dînaient en famille et se préparaient pour la semaine à venir. Seuls se présentaient les timides ou ceux qui préféraient tenir leur identité secrète. De plus, ils allaient la plupart du temps avec les garçons. Tant mieux, d’ailleurs. Leur manière furtive d’entrer et de sortir la rendait mal à l’aise.
Elle repensa au grand homme brun aux vêtements élimés. Elle n’arrivait toujours pas à croire que Gérard l’ait laissé entrer, et plus étonnant encore, qu’il l’ait choisie elle et qu’elle ait accepté de monter avec lui. D’un autre côté, elle y était obligée, n’ignorant pas qu’elle risquait de sérieux ennuis si elle se mettait à refuser des clients.
La jeune fille ne se souvenait pas avoir eu réellement peur d’un homme, et pourtant, quand il s’était tourné vers elle, nu et la verge dressée, elle avait eu peur. Il paraissait si grand, si tendu de désir. Naturellement, elle avait dissimulé ses sentiments – une nécessité dans cette profession. Devant ce corps massif à la peau très brune, elle avait éprouvé une brusque inquiétude. Elle s’était doutée qu’il n’avait pas beaucoup l’expérience des femmes, ce qui avait contribué à l’effrayer. Elle n’aidait jamais les hommes, sauf quand ils étaient trop soûls et qu’elle devait les réveiller. En général, elle parvenait à les stimuler, et elle tenait ensuite à garder la maîtrise de la situation en se plaçant au-dessus. Hier soir, cet immense corps presque noir l’avait emplie d’appréhension. Un an auparavant, une fille avait été trouvée morte et, selon la rumeur, son dernier client avait été un géant levantin. Marie n’y avait pas cru, car Gérard ne les laissait jamais entrer, mais maintenant, elle n’était plus aussi sûre. L’homme d’hier soir n’était certainement pas un bourgeois.
Seulement, il avait réussi quelque chose que peu avant lui avaient réussi : la faire jouir. Elle eut un petit sourire penaud.
« À quoi tu penses, Marie ?
— À quoi je pense ?
— Oui, je connais ce sourire. Tu nous caches quelque chose. » Aimée la guettait à la manière d’un chat qui guette une souris.
« Tu as trouvé un protecteur ? demanda Laurence, la plus jeune des filles qui était à peine plus âgée que Marie lorsque
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