Apocalypse
parfois étrange, dit Isaac Sharanski, le Vénérable qu’il avait rencontré lors de la tenue dans les grottes de Sédécias, à Jérusalem.
— La paix soit avec toi, ajouta le frère Ibrahim ben Kacem en s’asseyant.
Le musulman échangea un regard avec les deux autres et tapota des doigts sur le dossier de la chaise. Il regarda Antoine et Cécile fixement.
— Vous avez vu des choses que vous n’auriez pas dû voir dans ce petit village de France. Il y a longtemps, Saunière a vendu à nos prédécesseurs le véritable livre de L’Apocalypse , trouvé dans la tombe de Marie Madeleine, secret qui était aussi détenu par les rois de France. Plus tard, quand le curé a eu la folie des grandeurs, nous nous sommes éloignés de lui.
— Bon sang, mais qui êtes-vous vraiment ? demanda Marcas, stupéfait.
— Les ultimes gardiens de l’ordre spirituel en ce monde, dit le prélat catholique qui venait de s’allumer un cigare dont il tira quelques bouffées. Disons qu’un certain marquis de Chefdebien a eu l’idée de réunir des frères, croyants, de plusieurs religions après les découvertes de Saunière et de créer la fondation Arcadie en Suisse, loin des tumultes de ce monde.
— Nous sommes les garants de l’harmonie nécessaire dans un chaos sans cesse renouvelé, ajouta le rabbin.
— De simples représentants de Dieu qui veillent a l’équilibre des forces, compléta le musulman.
Cécile et Antoine échangèrent un regard incrédule.
— Et vous enfermez dans votre asile tous les branques qui se prennent pour le Messie. Je ne vois pas le rapport avec l’harmonie dans ce monde et votre livre si précieux. Et encore moins ce que la maçonnerie viendrait faire là.
Le père Klems croisa les bras.
— Il faut commencer par le début, et vous pourrez nous comprendre. À l’origine, il y a un peu plus de deux mille ans, une femme a commis un meurtre à Jérusalem. Marie Magdala était son nom et Judas celui de sa victime. Elle voulait venger Jésus.
— Curieuse version du Nouveau Testament, dit Marcas.
— Les Saintes Écritures ont été parfois édulcorées pour le bien-être spirituel des fidèles, répondit Rospiglioli.
Le père Klems reprit :
— Après avoir tué Judas, Marie Magdala lui a donc volé son livre.
— Vous l’avez vraiment, ce livre ? s’exclama Cécile.
— Bien sûr ! lança une voix derrière elle.
Une voix qu’Antoine connaissait à merveille.
— C’est pas vrai !
Le frère Obèse venait d’entrer par une petite porte, juste à côté du Poussin.
Il se déplaçait avec une fluidité étonnante pour son poids. Il portait sous son bras une plaque de verre qu’il déposa sur la table. Dessous était insérée une feuille de parchemin, couverte d’une écriture ancienne.
— Voilà L’Apocalypse de Judas.
— Une simple feuille moisie ? s’exclama Cécile.
— C’est tout ce qu’il reste du manuscrit original. Les conditions de conservation au fond de la tombe de Marie Madeleine n’étaient pas optimales et le temps a fait son œuvre.
Marcas se mordit les lèvres. Dire que Tristan et Kyria avaient tué sans répit pour un manuscrit dont il n’existait plus qu’un fragment.
— Un témoignage néanmoins exceptionnel, reprit le frère Obèse, écrit juste après la mort du Christ. Nous l’avons décrypté. Judas livre une version très personnelle de l’Apocalypse dans laquelle il explique que Jésus n’est pas… seul…
— Quoi ?
— Il révèle que Jésus n’est qu’un parmi bien d’autres. Et que lui, Judas, s’est donné pour mission de le tuer ; quant à ses successeurs ils devront exterminer tous ceux qui se présenteront devant les hommes. Hélas pour lui, Marie l’a assassiné après avoir découvert sa trahison. Elle lui a volé ses écrits et s’est enfuie en Gaule pour finir ses jours dans cette région de l’Aude que vous connaissez désormais.
La lumière du jour s’était mise à faiblir, le crépuscule tombait. Des spots enchâssés dans la bibliothèque s’étaient allumés graduellement.
Antoine intervint :
— Avant de mourir, l’un des tueurs dans la grotte n’arrêtait pas de répéter une sorte d’incantation : le dernier messie doit périr pour que les Justes soient enfin sauvés.
— C’est, depuis deux mille ans, l’obsession de la confrérie de Judas. Ils veulent à tout prix identifier le vrai Messie ! répliqua le frère juif.
— Mais pourquoi ? demanda
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