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Au Coeur Du Troisième Reich

Au Coeur Du Troisième Reich

Titel: Au Coeur Du Troisième Reich Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Lemay , Albert Speer , Michel Brottier
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aide de camp. Il nous salua brièvement, l’air absent, en tendant la main à chacun. Il nous invita à nous asseoir et déclara qu’il avait convoqué les participants à cette réunion pour se renseigner sur les conséquences des derniers bombardements. Puis il pria les représentants de l’industrie de donner leur opinion. Avec une objectivité conforme à leur tempérament, ces hommes de calcul firent la démonstration du caractère désespéré de la situation, au cas où ces bombardements seraient poursuivis systématiquement. Certes, Hitler tenta tout d’abord de balayer toutes les manifestations de pessimisme en les interrompant par des interjections stéréotypées comme « Vous y arriverez bien ! » « Nous avons connu des situations pires ! » et naturellement Keitel et Göring sautaient sur ces slogans pour surenchérir sur la certitude de la victoire à venir et affaiblir l’impression produite par nos déclarations ; surtout Keitel, qui revenait toujours sur ses réserves de carburant. Mais les industriels étaient plus coriaces que les membres de l’entourage de Hitler ; ils persévéraient dans leurs mises en garde, les étayant par des faits et des comparaisons chiffrées. Soudain Hitler changea d’attitude, les encourageant à analyser la situation en toute objectivité. On avait l’impression qu’il voulait enfin entendre la vérité, même si elle était désagréable, comme s’il était las de tous les maquillages des déclarations fallacieuses d’optimisme, des mensonges complaisants. Il tira lui-même le bilan de la séance : « A mon avis, les usines de carburant, de buna et d’oxygène constituent un point particulièrement vulnérable pour la conduite de la guerre, les matières premières indispensables pour l’armement étant produites dans un nombre restreint d’usines 3  . » Aussi hébété et absent que Hitler ait pu nous paraître au début, il nous fit l’impression d’un homme concentré, réaliste, perspicace. Mais quelques mois après,lorsque la catastrophe se fut produite, il ne voulut plus reconnaître la justesse de ses vues. Lorsque nous nous retrouvâmes dans le vestibule, Göring nous reprocha d’avoir accablé exagérément Hitler de soucis et de déclarations pessimistes.
    Les autos furent avancées, les invités de Hitler se rendirent au Berchtesgadener Hof pour prendre un rafraîchissement. Car, pour Hitler, le Berghof n’était dans les occasions semblables qu’un lieu de réunion. Il ne se sentait aucune obligation de maître de maison. Mais maintenant, après le départ des participants de la conférence, les membres de l’entourage privé de Hitler sortirent de toutes les chambres du premier étage. Hitler s’était retiré pour quelques minutes et nous attendîmes dans l’escalier. Il prit sa canne, son chapeau et sa cape noire ; la promenade quotidienne en direction du pavillon de thé commença. On servit du café et des gâteaux. Le feu était allumé dans la cheminée, on menait des conversations anodines. Hitler se laissa transporter hors de ses soucis dans un monde plus amical : on pouvait sentir à quel point il avait besoin de ce monde. Avec moi non plus, il ne parla plus du danger qui nous menaçait.
     
    Nous venions tout juste d’atteindre le niveau ancien de la production au bout de seize jours de réparations fiévreuses, lorsque les 28 et 29 mai 1944, nous essuyâmes une deuxième vague de bombardements. Cette fois-ci, 400 bombardiers de la 8 e flotte aérienne américaine parvinrent à eux seuls à nous infliger des destructions plus graves que les 935 bombardiers de la première attaque. En même temps les raffineries des champs pétrolifères roumains, situées près de Ploesti, et qui avaient une extrême importance pour nous, furent bombardées par la 15 e flotte aérienne américaine. Désormais notre production était réduite de moitié 4  . Ainsi donc il ne fallut pas plus de cinq jours pour que nos déclarations pessimistes de la réunion de l’Obersalzberg fussent pleinement justifiées et les slogans lénifiants de Göring contredits. Certaines remarques de Hitler permettaient de conclure que le prestige de Göring était redescendu à son point le plus bas.
    Si je ne tardai pas à profiter de cette faiblesse de Göring, ce n’était pas uniquement par opportunité. Certes nous avions de bonnes raisons, étant donné nos succès dans la production de chasseurs, de proposer le transfert de

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