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Aux armes, citoyens !

Aux armes, citoyens !

Titel: Aux armes, citoyens ! Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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après que deux canonniers eurent été
tués par des tirs sectionnaires :
    « Une première charge à mitraille renversa une centaine
d’hommes. Elle fut suivie de quatre ou cinq autres qui balayèrent la rue
entière. Environ huit cents hommes de la plus belle jeunesse, de la plus riche
bourgeoisie y furent tués en moins de deux minutes.
    « Le bruit du canon qui surprit tout le monde de ce
quartier, l’effroi de la mort, fit entrer dans Saint-Roch une foule
considérable d’hommes, de femmes, d’enfants, que par curiosité le mouvement des
troupes avait attirés dehors et ceux aussi qui allaient à leurs affaires. Ils
croyaient y trouver un asile sûr et sacré. Mais environ trois cents grenadiers
de la Convention se ruent à travers les morts de la rue du Dauphin, montent les
degrés de Saint-Roch, entrent dans l’église, tuent et mutilent à coups de sabre
et de baïonnette tout, ou à peu près, ce qui s’était réfugié en ce lieu. On y a
compté le lendemain matin environ quatre mille morts, de tout âge, de tout sexe,
dépouillés de leurs vêtements, compris ceux qui avaient péri dans la rue du
Dauphin et dans celle de Saint-Honoré. »
    Chiffres énormes, sans doute multipliés par la rumeur, mais
qui révèlent au-delà de leur exactitude discutable le choc ressenti par un
républicain patriote, ancien Jacobin, mais homme modéré.
     
    Et Ruault s’interroge, relit Machiavel, « car nous
sommes dans le cas posé par Machiavel, que le système républicain est
inexécutable en France et que nous n’avons fait que des folies depuis trois
années mais des folies d’un genre fort étrange… C’est un vrai typhon qu’un peuple
républicain tel que nous, une vaste bête, une divinité malfaisante, une mer qui
dévore ceux qui osent monter dessus… »
    Et ce qu’il a vu le 13 vendémiaire le conforte dans cette
vision pessimiste. Car le carnage a continué rue de Richelieu, quai Voltaire.
    « Après la canonnade, la troupe de ligne fusilla tout
ce qu’elle put fusiller jusqu’à minuit.
    « Elle tirait en haut, en bas, de tous côtés, suivie
des filles de joie de ce quartier qui les aidaient en ricanant à dépouiller les
morts et à les porter dans la cour du Palais-Royal.
    « Les vainqueurs et leurs filles mirent en vente le
lendemain matin les dépouilles des Parisiens et les vendirent. »
     
    L’émeute est donc écrasée sans pitié mais, dans les jours
qui suivent, la répression est légère. Barras, Tallien, Fréron, les
conventionnels se défient de ces « patriotes de 89 », qui ne sont
pour ces Thermidoriens républicains que les alliés d’un jour.
    On en congédie, en leur distribuant des assignats, en les
rémunérant pour qu’ils achèvent à coups de gourdin de chasser la Jeunesse dorée
des rues, en lui interdisant de jouer un rôle politique.
    Et les « tape-dur » se mettent à l’œuvre.
    Les protestations et les suppliques des muscadins ne servent
à rien.
    « Quoi, parce qu’un homme portera à son habit un collet
noir, peut-on lire dans un libelle, il sera par cela même proscrit ? Et
par qui ? Par cette classe abjecte, vile et méprisable, d’êtres sans mœurs,
sans propriété, vendus au parti qui les paie, de vagabonds que la police ne
devrait jamais perdre de vue. »
    Mais les conventionnels invitent au contraire les militaires
qui assurent le maintien de l’ordre à « rafler » ces jeunes gens le
plus souvent « insoumis », et à les rappeler à leur devoir.
    « Allez, commande le ministère aux soldats, parcourez
tous les coins confiés à votre surveillance. Arrachez à la honte et à l’oisiveté,
au crime de la rébellion cette jeunesse insensée qui, dans le sein de l’indifférence,
oublie qu’elle a une patrie à défendre, des droits à soutenir, et des lauriers
à partager. »
    Les rafles se multiplient au café de Chartres, dans les
théâtres et tous les lieux publics.
    Les jeunes gens se réfugient dans les maisons de jeu, les « étouffoirs »
clandestins ou tolérés par la police.
    Les « étouffoirs » se multiplient boulevard des
Italiens, surnommé le « Petit Coblence ».
    Et la Jeunesse dorée se dissout dans les tripots, les salons,
les mondanités.
    Elle est la principale victime de Vendémiaire.
     
    Ainsi, Paris change en même temps que triomphe Barras qui
pousse Bonaparte dans les bras de Joséphine de Beauharnais, et fait de lui un
général de division, d’abord commandant en second de

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