Aux armes, citoyens !
cloches recommencent à résonner dans les campagnes.
On les entend dans les Conseils des Anciens et des
Cinq-Cents.
Les députés du Ventre – modérés, royalistes masqués – se
réunissent à Clichy, dans les jardins d’un membre du Conseil des
Cinq-Cents – Gilbert Desmolières. Le général Mathieu Dumas, un député du
Conseil des Anciens, est présent à chaque réunion. Nombreux parmi ces clichyens sont favorables à l’idée d’une restauration, par les voies légales, sans les
excès d’un affrontement.
Et ils sont accablés quand la police du Directoire, à la
plus grande satisfaction de Barras, démasque des agents royalistes – l’abbé
Brottier en est le chef – qui, dûment accrédités par des lettres de Louis XVIII,
signées du monarque, préparent un coup d’État royaliste.
Les conjurés ont pris contact avec des officiers, tel ce
colonel Malo, le chef d’escadron qui a dispersé les babouvistes lors de l’attaque
du camp de Grenelle.
Et Malo aussitôt les dénonce.
Ils sont traduits devant le Conseil de guerre permanent de
la division militaire de Paris, et la lenteur du procès, l’indulgence dont font
preuve les juges – dix ans de détention et non la mort dont ils sont passibles
– tranchent avec la brutalité expéditive des commissions militaires qui avaient
jugé les babouvistes.
Mais Barras et Reubell sont satisfaits.
Le Directoire frappe toutes les factions, qu’elles soient
anarchistes ou royalistes.
Et on annonce pour le mois de février 1797 (ventôse an V) l’ouverture
à Vendôme devant la Haute Cour du procès des babouvistes.
Le Directoire est au-dessus des factions. Il les combat
toutes.
Jeu de rôle.
Loin de ces manœuvres d’habile politique et de cette
stratégie des apparences, qui n’arrachent pas le peuple et la nation à la
misère, à leur lassitude et à leur dégoût, Bonaparte, en ce mois de février
1797, occupe le port d’Ancône.
Il marche en compagnie de son chef d’état-major, Berthier, sur
les quais, regardant vers le large.
« En vingt-quatre heures, dit-il, on va d’ici à la
Macédoine. »
Un silence, puis plus bas :
« La Macédoine, terre natale d’Alexandre le Grand. »
HUITIÈME PARTIE
Pluviôse an V – Fructidor an V
Février 1797 – Septembre 1797
« Signez la paix… »
« La France est
fatiguée d’avoir
roulé de révolution en
révolution. »
B AILLY , réquisitoire au
procès de Babeuf et des « Égaux »
devant la Haute Cour réunie
à Vendôme
26 avril 1797 (7 floréal an V)
« Tous, mon cher
général, ont les yeux fixés sur vous.
Vous tenez le sort de la
France dans vos mains.
Signez la paix… et alors
mon général venez jouir des bénédictions
du peuple français tout
entier qui vous appellera
son bienfaiteur. Venez
étonner les Parisiens
par votre modération et votre
philosophie. »
Lettre de La V ALETTE , aide de camp
du général Napoléon
Bonaparte
mai 1797 (prairial an V)
« La loi, c’est le sabre. »
Un officier arrêtant un
député du Conseil des Anciens
le 18 fructidor an V (4
septembre 1797)
27.
Bonaparte, en ce mois de ventôse an V (février-mars 1797), ne
traverse pas la mer pour s’élancer sur les traces du Grand Alexandre.
Il se contente de rêver au destin fulgurant du Macédonien, d’imaginer
qu’un jour viendra, peut-être, où lui aussi comme Alexandre sera dans l’éclat d’une
gloire aveuglante.
Mais pour cela il faut, à partir de l’Italie, marcher vers
Vienne, franchir les cols des Alpes, les vallées encaissées de la Piave, du
Tagliamento et de l’Isonzo, afin de s’enfoncer dans l’empire des Habsbourg.
Il le dit à ses soldats. Il l’écrit aux Directeurs :
« Il n’est plus d’espérance pour la paix qu’en allant
la chercher dans les États héréditaires de la maison d’Autriche. »
Il sait qu’il joue une partie décisive.
Le Directoire a nommé le général Hoche à la tête de l’armée
de Sambre-et-Meuse. Et avec celle du général Moreau, elle devrait se diriger
vers Vienne.
Mais elles piétinent, et Bonaparte craint que les Directeurs
n’aient choisi de le laisser affronter seul les troupes autrichiennes, afin qu’il
s’y brise les reins.
Il n’a pas confiance dans ces « badauds » de Paris,
ces Directeurs que sa gloire naissante inquiète.
Carnot, auquel il écrit que « si l’on tarde à passer le
Rhin il sera impossible que nous nous soutenions longtemps »,
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