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Aux armes, citoyens !

Aux armes, citoyens !

Titel: Aux armes, citoyens ! Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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les Directeurs et les députés qui les soutiennent
choisiront parmi les députés élus ceux qui leur conviennent et déclareront
inéligibles tous les autres.
    Leur journal, Le Publiciste, annonce à la veille des
élections que « si des terroristes étaient élus, ils ne seraient pas reçus
et les départements qui les auraient choisis resteraient sans députés ».
    Quand deux journaux – décrétés aussitôt « anarchistes »
–, Les Hommes libres et L’Ami des lois, protestent contre cette
intention « liberticide », ils sont supprimés.
     
    Bonaparte sait que, s’il veut conserver sa popularité, il ne
doit pas s’enfoncer dans les marécages de cette politique nauséabonde, que les
citoyens méprisent.
    Il ne doit pas être confondu avec les « ventres dorés
et pourris ».
    « Il n’y a rien à faire avec ces gens-là, dit-il. Les
Directeurs ne comprennent rien de ce qui est grand. »
    Il utilise leur désir de le voir s’éloigner pour leur
arracher le droit de choisir les généraux qu’il veut emmener avec lui, les
savants, les artistes qui l’accompagneront.
    Et obtenir le rassemblement d’une armada à Toulon, pour
transporter trente mille fantassins, trois mille cavaliers – sans chevaux, on
trouvera les montures sur place –, cent pièces d’artillerie, cent cartouches
par homme, et neuf millions pour les dépenses.
    Il veut carte blanche.
    Et les Directeurs lui concèdent tout. Ils pensent à la dalle
funéraire et au sable qui recouvrira ce général ambitieux, populaire, dangereux
pour eux.
     
    Et Bonaparte laisse le rêve l’emporter.
    « Je coloniserai l’Égypte, dit-il. Je ferai venir des
artistes, des ouvriers de tous genres, des femmes, des acteurs. Six ans me
suffisent, si tout me réussit, pour aller dans l’Inde… Je veux parcourir l’Asie
Mineure en libérateur, arriver triomphant dans la capitale de l’ancien
continent, chasser de Constantinople les descendants de Mahomet et m’asseoir
sur son trône… »
    Ses proches sont fascinés et accablés. Six années loin de
Paris ? Que sera devenue la France ?
    L’écrivain Arnault, qui a écrit de nombreux articles
panégyriques dans les journaux de l’armée d’Italie, s’emporte.
    « Le Directoire veut vous éloigner. La France veut vous
garder, lance-t-il à Bonaparte. Les Parisiens vous reprochent votre modération.
Ils crient plus fort que jamais contre le gouvernement et les Directeurs. Ne
craignez-vous pas qu’ils finissent par crier contre vous ? »
    « Si je montais à cheval, personne ne me suivrait »,
dit-il.
    Il faut donc partir pour ne pas être compromis.
     
    Il quitte Paris le 6 mai 1798 (17 floréal an VI).
    Personne ne pourra l’accuser d’être complice des Directeurs
et des députés.
    Le 22 floréal, les Cinq-Cents puis les Anciens décident de
valider les élections qui viennent de se tenir, dans quarante-huit départements
sur quatre-vingt-seize.
    Dans les autres, on annule en tout ou partie les scrutins.
    C’est une « épuration ».
    Et sous couvert de légalité, on espère que ce coup d’État du
22 floréal an VI (11 mai 1798) aura écarté ceux que les Directeurs et leurs
suppôts appellent des « anarchistes », des « royalistes déguisés ».
    Cent quatre députés ont été exclus des Conseils et
cinquante-trois ne sont pas remplacés.
    Le dégoût submerge le pays.
     
    Barras peut se réjouir du succès de sa manœuvre.
    Il a réussi ce qu’il appelle la « bascule ».
    Avec le coup d’État du 18 Fructidor, il avait écarté les
partisans « d’un fantôme de roi ».
    Avec le coup d’État du 22 Floréal, il croit avoir mis son
pouvoir à l’abri des adeptes de Robespierre et de Babeuf.
    Ainsi, affirme Barras, grâce à cette « bascule »
le Directoire peut être « républicain », et « conservateur »
des principes de la Révolution.
    Bonaparte apprend ces décisions du Directoire alors qu’il se
trouve à Toulon, face à cette flotte de cent quatre-vingts navires, ancrés dans
la rade.
    Qu’aurait-il gagné, à traîner dans les couloirs du palais du
Luxembourg ?
    Complice de Barras ou opposant, il n’aurait pas été le
maître. Ici, il peut s’adresser à des milliers d’hommes en armes prêts à lui
obéir et dont il sent l’enthousiasme.
    « Officiers et soldats, dit-il, je vais vous mener dans
un pays où par vos exploits futurs vous surpasserez ceux qui étonnent aujourd’hui
vos admirateurs, et rendrez à la

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