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Barnabé Rudge - Tome II

Barnabé Rudge - Tome II

Titel: Barnabé Rudge - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Dickens
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il se rappelait la
haute estime dans laquelle était tenu son ministère, et le besoin
constant qu'on avait de ses services ; quand il se considérait
lui-même, dont le Code pénal avait fait une espèce de remède
universel, applicable aussi bien aux femmes qu'aux hommes, aux
vieillards qu'aux enfants, aux gens de tout âge, de toute variété
de criminalité ; quand il songeait à la haute faveur dont il
jouissait, par titre officiel, près de la Couronne, et des deux
Chambres du parlement, de la Monnaie, de la Banque d'Angleterre et
des Juges du territoire ; quand il repassait dans son esprit
tous les ministres successifs dont il était resté toujours la
panacée favorite ; quand il réfléchissait que c'était à lui
que l'Angleterre devait de rester isolée dans la gloire de la
pendaison parmi les nations civilisées de la terre ; quand il
se représentait tous ces titres et qu'il les pesait dans son
esprit, il n'avait pas l'ombre d'un doute qu'il y allait de
l'honneur de la nation reconnaissante de l'acquitter des
conséquences de ses dernières escapades, et qu'elle ne pouvait
manquer de lui rendre son ancienne place dans le bienheureux
système social.
    Il en était donc resté, comme on dit, sur sa
bonne bouche, quand il prit place au milieu de l'escorte qui
l'attendait, et il se rendit à la prison avec une indifférence
héroïque. Et arrivant à Newgate, où on avait réparé à la hâte les
ruines de quelques cachots pour y tenir en toute sûreté les
révoltés, il reçut un accueil chaleureux des porte-clefs, charmés
de voir un cas extraordinaire, un cas intéressant, qui rompait
agréablement la monotonie de leur service uniforme. Aussi, sous
l'empire de cette aimable surprise, lui mit-on les fers avec un
soin tout particulier, avant de le coffrer dans l'intérieur de la
prison.
    « Camarade, dit le bourreau, pendant que,
sous la conduite d'un officier de la geôle, il traversait, dans cet
attirail nouveau pour lui, tous les corridors qu'il connaissait si
bien, est-ce que je vais rester longtemps avec quelqu'un ?
    – Si vous nous aviez laissé plus de
cellules debout, on vous en aurait donné une pour vous tout seul,
lui répondit-on ; mais, pour le moment, la place nous manque,
et nous sommes obligés de vous donner de la compagnie.
    – À la bonne heure, répliqua Dennis, je
n'ai pas de répugnance pour être en compagnie, camarade ; au
contraire, j'aime assez la société. J'étais né pour la société,
vrai.
    – Quel dommage, n'est-ce pas ? dit
son conducteur.
    – Mais non, répondit Dennis, je ne trouve
pas. Pourquoi donc serait-ce dommage, camarade ?
    – Oh ! dame ! je ne sais pas,
dit l'autre négligemment. C'est que, comme vous dites que vous
étiez né pour la société, et qu'on va vous en priver dans votre
fleur, vous comprenez…
    – Dites-moi donc, reprit l'autre
vivement, de quoi diable me parlez-vous là ? Qu est-ce que
c'est que ces gens-là qu'on va priver dans leurs fleurs ?
    – Oh ! personne précisément :
je croyais que c'était peut-être vous, » dit le geôlier.
    M. Dennis s'essuya la face, qui était
devenue tout à coup rouge comme le feu. « Vous avez toujours
aimé à dire des farces » dit-il à son conducteur d'une voix
tremblante, et il le suivit en silence, jusqu'à ce qu'il se fut
arrêté devant la porte.
    – C'est là ma résidence, n'est-ce
pas ? demanda-t-il d'un air facétieux.
    – Oui, voilà la boutique,
monsieur, » répliqua l'autre. Dennis se disposait à y entrer,
d'assez mauvaise grâce, quand tout à coup il s'arrêta et recula
tout saisi.
    « Eh bien ! dit le geôlier, comme
vous voilà ému !
    – Hum ! dit Dennis à voix basse et
fort alarmé. Il y a de quoi ! Fermez cette porte.
    – C'est ce que je vais faire, quand vous
serez entré.
    – Mais je n'entrerai pas du tout. Je ne
veux pas qu'on m'enferme avec cet homme-là. Est-ce que vous avez
envie de me faire étrangler, camarade ? »
    Le geôlier n'avait pas l'air d'avoir la
moindre envie pour ou contre ; mais lui faisant observer en
deux mots qu'il avait sa consigne, et qu'il voulait l'exécuter, il
ferma la porte par-dessus lui, tourna la clef et se retira.
    Dennis se tenait tout tremblant le dos contre
la porte, et levant le bras par un mouvement involontaire pour se
mettre en défense, les yeux fixés sur un homme, le seul locataire
pour le moment du cachot, qui était étendu tout de son long sur un
banc de pierre, et qui venait de

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