Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Barnabé Rudge

Barnabé Rudge

Titel: Barnabé Rudge Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Dickens
Vom Netzwerk:
nous
pouvons en aparté lui confier tout bas que, comme elle était
toujours aux écoutes, elle avait entendu, au moment où Gabriel et
sa femme conversaient ensemble, la plaisanterie du serrurier
relative à ce négrillon qui jouait du tambour de basque ; elle
n'avait pu retenir l'explosion des sentiments de dépit que ce
sarcasme avait éveillés dans son beau sein, et voilà ce qui l'avait
fait éclater comme nous venons de voir. Les choses étant arrivées
alors à une crise, le serrurier, selon sa coutume, par amour pour
la paix et la tranquillité, commença à mettre les pouces.
    « Qu'avez-vous à pleurer, ma fille ?
dit-il. De quoi s'agit-il ? qui est-ce qui vous dit qu'on vous
hait ? moi ! je ne vous hais pas ; je ne hais
personne. Séchez vos yeux, devenez de meilleure humeur, au nom du
ciel, et ne nous rendons pas malheureux tous tant que nous
sommes : il sera toujours assez tôt. »
    Les puissances confédérées, jugeant d'une
bonne tactique de considérer ces paroles comme une excuse
suffisante de l'ennemi commun et comme un aveu de ses torts,
séchèrent leurs yeux et prirent la chose en bonne part.
Mlle Miggs fit remarquer qu'elle ne voulait de mal à personne,
pas même à son plus grand ennemi, et qu'elle l'aimait d'autant plus
au contraire qu'il lui infligeait une persécution plus cruelle.
Mme Varden approuva hautement cet esprit de douceur et de
clémence, et déclara incidemment, comme si c'eût été une des
clauses du traité de paix, que Dolly l'accompagnerait ce soir même
à la succursale de l'Association siégeant à Clerkenwell. Ce fut là
un exemple extraordinaire de sa grande prudence et de sa politique.
Il y avait bien longtemps qu'elle visait à ce résultat, et, comme
elle soupçonnait secrètement que le serrurier (toujours hardi
lorsqu'il était question de sa fille) ne manquerait pas d'y faire
des objections, si elle avait tant soutenu Mlle Miggs tout à
l'heure, c'était pour le prendre à son désavantage. La manœuvre
réussit à souhait. Gabriel se contenta de faire une grimace, et,
pour ne pas s'attirer une seconde scène comme celle de tout à
l'heure, il n'osa pas dire un seul mot.
    Miggs y gagna de Mme Varden une robe et
de Dolly une demi-couronne, pour la récompenser de s'être
éminemment distinguée dans le sentier de la vertu et de la
sainteté. Mme Varden, selon sa coutume, exprima l'espoir que
ce qui venait de se passer serait pour Varden une leçon qui lui
apprendrait à tenir une plus généreuse conduite à l'avenir.
    Le dîner s'étant refroidi, et personne n'ayant
gagné beaucoup d'appétit durant cette scène, on continua le repas,
comme dit Mme Varden, « en chrétiens. »
    La grande parade des volontaires royaux de
Londres oriental devait avoir lieu dans l'après-midi ; le
serrurier ne travailla donc pas davantage, mais il s'assit à son
aise, la pipe à la bouche et son bras autour de la taille de sa
jolie fille, regardant de temps en temps Mme Varden d'un air
aimable, et ne montrant du sommet de sa tête à la plante de ses
pieds qu'une surface souriante de bonne humeur. Et bien sûr,
lorsque vint l'heure de revêtir son uniforme, et que Dolly, se
suspendant autour de lui avec toute sorte de poses gracieuses et
des plus séduisantes, l'aida à se boutonner, à se boucler, à se
brosser et à entrer dans l'un des habits les plus justes qu'ait
jamais faits tailleur en ce monde, c'était bien le plus orgueilleux
père de toute l'Angleterre.
    « Ah ! la bonne pièce ! dit le
serrurier à Mme Varden, qui était debout à l'admirer les bras
croisés (car, après tout, elle était un peu fière de son martial
époux), tandis que Miggs lui tendait le chapeau et le sabre à
longueur de bras, comme si elle eût craint que ce dernier ne passât
de son chef au travers du corps de quelqu'un ; mais, Doll, ma
chère, n'épouse jamais un soldat. »
    Dolly ne demanda pas pourquoi, ni ne dit
mot ; mais elle baissa bien bas la tête pour attacher le
ceinturon.
    « Je ne porte jamais cet uniforme, dit
l'honnête Gabriel, que je ne pense au pauvre Joe Willet. J'aimais
Joe ; il a toujours été mon favori. Pauvre Joe !… Tudieu,
ma fille, ne me serre donc pas si fort ! »
    Dolly se mit à rire ; mais ce n'était pas
son rire habituel ; c'était le plus étrange petit rire du
monde. Et elle pencha la tête encore plus bas.
    « Pauvre Joe ! reprit le serrurier
en marmottant ces mots entre ses dents ; j'ai toujours
regretté qu'il ne fût pas

Weitere Kostenlose Bücher