Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Berlin 36

Berlin 36

Titel: Berlin 36 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alexandre Najjar
Vom Netzwerk:
cuisses. Elle se mordit les lèvres : profitant de l’obscurité, Goebbels la tripotait ! Brutalement, elle repoussa les doigts du ministre et, se tournant vers lui, le foudroya du regard. Imperturbable, il retira sa main.
    A l’entracte, Leni se demanda s’il fallait rester ou partir au risque de provoquer un scandale. Elle préféra rester. Fuyant le Dr Goebbels, elle engagea la conversation avec sa femme :
    — J’attends encore un enfant, lui annonça Magda d’un air radieux.
    — Combien en avez-vous déjà ?
    — Cinq, dont un de mon mariage précédent.
    — Je vous trouve bien en forme, quel est donc votre secret ?
    Mme Goebbels haussa les épaules.
    — Si vous saviez les efforts que je fais, en toilettes et en maquillage, pour être à la hauteur de toutes ces starlettes qui assiègent mon mari. C’est insensé ! On dirait que le pouvoir les attire comme la lumière les papillons !
    Leni Riefenstahl hocha la tête. Elle ne parvenait pas à déterminer si Magda Goebbels était sotte au point de ne rien voir des trahisons de son mari, ou si elle feignait l’ignorance pour préserver son mariage et ne pas perdre son statut de « première dame du III e  Reich ». Au fond, se dit-elle, Magda ne valait pas mieux que les « starlettes » qu’elle critiquait : par amour du pouvoir, elle était prête à tout !
    1 - Universal-Film AG.

9
    Où Jesse Owens apprend une nouvelle inattendue
    — J’ai quelque chose à t’annoncer, dit Ruth.
    Jesse Owens grimaça. Quand Ruth Solomon fronçait ainsi les sourcils, c’est qu’une grave préoccupation la tourmentait. Depuis leur première rencontre, sur les bancs de la Fairmount Junior High School (il avait alors quinze ans, elle, treize), il avait appris à interpréter chacune de ses attitudes. Rapidement, il était tombé sous son charme : avec sa peau cuivrée, ses cheveux tressés, ses yeux malicieux, ses lèvres charnues et son élégance naturelle, Ruth ne passait pas inaperçue. Subjugué par sa beauté, il avait commencé par lui adresser des mots doux grâce à la complicité de sa soeur, qui était en classe avec lui, puis s’était mis à lui porter son cartable, avant de l’embrasser sur la bouche, un soir, sous un porche, loin des regards indiscrets.
    — Est-ce une bonne ou une mauvaise nouvelle ? fit-il, en prenant un air décontracté pour dissimuler son inquiétude.
    — Bonne et mauvaise à la fois.
    Jesse ne connaissait qu’une nouvelle qui fût « bonne et mauvaise à la fois ».
    — Tu… tu es enceinte ?
    — Oui, balbutia Ruth en baissant les yeux.
    Jesse Owens demeura sans voix, partagé entre la joie de savoir que la fille qu’il aimait portait le fruit de leur amour et la peur d’avoir à assumer la responsabilité d’être père. Comment, à son âge, subvenir aux besoins d’une famille alors qu’il travaillait jour et nuit pour assurer sa propre survie ? Et comment annoncer la nouvelle à ses parents et, pis encore, à ceux de Ruth qui étaient encore plus conservateurs que les siens ? Il se sentit défaillir. Ruth se colla contre lui et blottit sa tête contre sa poitrine.
    — Tu ne me quitteras pas, n’est-ce pas ?
    — Bien sûr que non, Ruth. Tu sais bien que je t’aime. Mais qu’allons-nous devenir ? Que dira ton père ? Il pourrait me tuer !
    — Ne dramatise pas les choses. Je continuerai à vivre chez mes parents jusqu’à ce que tu sois en mesure de te charger d’une famille. Je te rendrai visite chaque jour et toi, de ton côté, tu continueras à bosser et à courir… Qu’en dis-tu ?
    — Et les études ?
    — Je laisse tomber. Je travaillerai dans un institut de beauté pour gagner un peu d’argent.
    Jesse se sentit ému par l’attitude de Ruth. Il l’enlaça avec délicatesse pour ne pas « étouffer » leur futur bébé.
     
    Par crainte du scandale, les deux amoureux, âgés de dix-huit et seize ans, décidèrent de se marier sans tarder. Mais où aller ? David Albritton, le complice de toujours, vola à leur secours.
    — Je connais un endroit où le juge de paix accepte de marier les jeunes gens sans l’accord de leurs parents.
    — Où ? demanda Jesse, incrédule.
    — En Pennsylvanie.
    — Tu peux nous y conduire, champ  ?
    —  Let’s go !
    Aussitôt, ils louèrent un tacot pour une journée et prirent la route. La cérémonie fut brève : sous le regard de Dave, à la fois témoin et garçon d’honneur, le juge de paix maria le couple

Weitere Kostenlose Bücher