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Borgia

Titel: Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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du crucifix venait de lui érafler la paume de la main, mais d’une éraflure si mince qu’elle était à peine visible.
    – Maladroit ! s’écria César. Vous ai-je fait mal, madame ?… Je ne me le pardonnerais pas.
    – Ce n’est rien…
    – Adieu donc, madame… Voilà ma mission accomplie… Laissez-moi ajouter un seul mot : c’est que, quoi qu’il arrive, quelles que soient les nécessités de la politique et de la guerre, je conserverai toujours pour vous et les vôtres une ardente sympathie…
    Sur ces mots, César tourna bride et disparut dans la direction de Rome. Avant de s’enfoncer dans la ville, il s’arrêta, se retourna, et contempla un instant la voiture qui disparaissait au loin.
    – Cette chaise de poste arrivera dans trois jours à Monteforte, murmura-t-il, mais elle n’y ramènera qu’un cadavre !…
    Ce n’est pas à Monteforte qu’allait la chaise de poste. Elle s’arrêta à cette même Auberge de la Fourche où nous avons vu le chevalier de Ragastens lier connaissance avec César Borgia, et donner au signor Astorre une consultation sur les modes parisiennes.
    La voiture fut remisée. La comtesse Alma s’enferma dans une chambre d’où elle ne sortit qu’à la nuit. Alors, elle monta à cheval et, seule, continua son chemin.
    Bientôt elle quitta la route de Florence et, après deux heures de marche au pas à travers champs, parvint enfin à une sorte de gorge resserrée entre des rochers. Au fond de cette gorge se dressait une sorte de villa d’assez modeste apparence.
    Au moment où la comtesse parut en vue de cette maison, une ombre blanche surgissant d’entre les rochers couverts de myrtes et de lentisques se dressa tout à coup sur le sentier.
    – Béatrix ! s’exclama la comtesse dans un élan de joie.
    – Ma mère ! Quelles inquiétudes !… Comme vous rentrez tard !… répondit Primevère en serrant la comtesse dans ses bras.
    Les deux femmes se hâtèrent d’entrer dans la maison dont un serviteur armé ferma les portes.
    – Eh bien, ma mère,… avez-vous réussi ? demanda Béatrix lorsqu’elles furent installées dans une pièce du rez-de-chaussée. Avez-vous pu voir les personnages que vous espériez rencontrer ?…
    – Ces personnages ne sont pas à Rome ! répondit la comtesse d’une voix sourde.
    – Ah ! ma mère… vous m’en voyez toute joyeuse… Lorsque vous m’avez appris hier votre détermination d’aller faire ces démarches qui pouvaient aboutir à une sorte de paix entre nous et les Borgia, je n’ai pu me défendre d’un serrement de cœur… Il n’y a pas de paix possible en Italie tant que ces monstres verront le jour…
    – Rassure-toi, Béatrix, fit amèrement la comtesse, je crois que la guerre est inévitable…
    – Courage, mère !… Je suis résolue à lutter jusqu’au bout… Mais, dites-moi, êtes-vous sûre que cette retraite ne sera pas découverte, qu’on ne vous a pas suivie ?
    – Sûre, mon enfant ! Je me suis d’ailleurs conformée à ton plan. La chaise de poste est restée à « l’Auberge de la Fourche ».
    – Bien, ma mère ! D’ailleurs notre exil va prendre fin… Demain soir, à Rome, c’est la dernière réunion… Et après-demain, à l’aube, nous quittons cette retraite où nous sommes ensevelies depuis un mois, et nous reprenons le chemin de Monteforte…
    – Ah ! Tu as une âme héroïque, Béatrix…
    – Il le faut bien, puisque les hommes ont des cœurs de femmes.
    La comtesse tressaillit.
    – Tu fais allusion à ton père…
    – Oui ! À mon père qui n’a pas osé venir ici… Mais qu’avez-vous donc, mère ?… Vous pâlissez…
    – Ce n’est rien… J’ai voulu prendre ce verre d’eau et… ma main… n’a pu saisir le verre…
    – Buvez, ma mère, fit la jeune fille en présentant le verre à la comtesse.
    Celle-ci voulut le saisir, mais ses doigts raidis le lâchèrent brusquement et le verre se brisa sur le plancher…
    – Je ne sais… ce que j’ai… Depuis un instant… ma main est comme paralysée…
    – En effet, mère, cria Primevère effrayée, votre main est blanche comme de la cire… vos doigts se crispent… Mère ! Qu’avez-vous ?
    – Je sens que mon bras s’engourdit… le froid… jusqu’au coude… Ma tête tourne… Oh ! je devine !
    Cette dernière exclamation, la comtesse la jeta dans un cri déchirant d’angoisse et de terreur. Primevère avait saisi sa mère dans ses bras comme pour la protéger

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