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Borgia

Titel: Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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C’était l’atelier de Raphaël Sanzio.
    Aidé d’un jeune homme qui avait à peu près son âge, le peintre s’occupait activement à décrocher les toiles qui garnissaient les murs de cet atelier. Au fur et à mesure que les toiles étaient décrochées, les deux jeunes gens les attachaient à une corde et, par le balcon, les descendaient sur une charrette qui stationnait en bas devant le seuil et sur laquelle un ouvrier les arrangeait méthodiquement. Cela ressemblait à un déménagement hâtif et, eût-on dit, aux préparatifs d’une fuite.
    Tout en travaillant à cette besogne, les jeunes gens causaient sans s’interrompre.
    – Ainsi, disait l’ami de Raphaël, c’est à Florence que je te ferai parvenir tout cela ?
    – Oui, mon cher Machiavel… à Florence… Là, j’espère trouver aide et protection, grâce à l’influence de mon vénéré maître Le Pérugin…
    – Dans quinze jours au plus tard, tous tes trésors seront à Florence, je t’en réponds, Sanzio.
    – Merci, Machiavel. Je sais que je puis compter sur ton amitié. Mais pourquoi, au lieu de m’envoyer mes toiles, ne les apporterais-tu pas toi-même ? Viens me rejoindre, Machiavel… Rome est une ville morte… Florence, au contraire, c’est le cerveau de l’Italie…
    Machiavel secoua la tête.
    – Oui, dit-il, j’aime Florence, comme toi… Et un jour, c’est là que j’irai pour mettre en ordre mes notes et commencer le livre qui hante mes songes… Mais ici, je trouve des matériaux que je ne trouverais nulle part…
    – Que veux-tu dire ?…
    – Que pour écrire mon livre, je ne pouvais souhaiter de meilleur modèle que Borgia… Quel somptueux criminel ! Peut-on rêver assemblage plus parfait de cruauté, d’astuce et de violence ? Quel admirable type de despote, pour inspirer au peuple l’horreur du despotisme !… Ah ! combien je suis heureux de ne pas avoir donné suite à mon projet de poignarder Borgia !…
    Machiavel se tut subitement. Puis, il passa sur son front sa main brûlante et, revenant tout à coup à Raphaël qui le contemplait :
    – Pardonne-moi, mon ami, de me laisser emporter par mes songes, alors que de graves périls t’entourent… Mais à quoi pensais-tu ?…
    – Rosita ! murmura-t-il, pris d’une soudaine angoisse.
    – Ta Fornarina ! continua Machiavel. Et à ce propos, tu devais me dire les causes de ce départ précipité… de cette fuite.
    – Machiavel… les minutes sont précieuses… Un jour, lorsque tu seras venu nous rejoindre, soit à Florence, soit à Urbin, tu sauras tout… Aujourd’hui, sache seulement que Rosita est menacée d’un affreux danger… Ce que m’a raconté hier la Maga, du Ghetto, m’a atterré… Demain matin, à l’aube, la Fornarina et moi nous serons loin de Rome, sur la route de Florence… Mais avant notre départ, notre union sera consommée…
    – Soit… Et le mariage a lieu ?…
    – Cette nuit, dans la petite église des Anges, qui est à l’entrée du Ghetto… C’est là que ma pauvre Fornarina fut jadis trouvée par la Maga…
    – Quelle heure ?…
    – La première messe nocturne… deux heures du matin… aussitôt après la cérémonie, nous quittons Rome à pied et nous allons rejoindre la chaise de poste à l’endroit que tu me désigneras.
    – Sois tranquille, tout sera prêt… voiture solide, chevaux rapides… Je m’en charge… À propos, j’ai une cinquantaine de ducats dans un tiroir… les veux-tu ?
    – Non, je suis riche, j’ai touché chez le trésorier du pape le prix de ma Vierge à la chaise.
    Le déménagement des toiles était achevé.
    Les deux amis descendirent et se dirent au revoir jusqu’à la cérémonie de l’église des Anges. Machiavel serait le témoin de la Fornarina.
    Raphaël gagna l’église des Anges et y entra. Le peintre chercha des yeux un prêtre et, n’en voyant pas, il allait se diriger vers la sacristie lorsqu’il en vit sortir un moine qui, le capuchon rabattu sur les yeux, traversa la nef. Raphaël l’aborda.
    – Mon père, lui dit-il, pourriez-vous me dire si le desservant de cette église est ici en ce moment ?…
    Le moine jeta un rapide coup d’œil sur le jeune homme et eut un geste de surprise vite dissimulé.
    – Ce vénérable prêtre est malade, répondit-il, mais je le remplace… Auriez-vous besoin des secours de notre sainte religion ?…
    – Mon père, reprit le peintre après une légère hésitation, c’est pour un

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