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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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quitte l'Élysée pour devenir ministre des Affaires sociales. Belle promotion !
    C'est Jacques Attali que Mitterrand a pressenti pour remplacer Bérégovoy au secrétariat général de l'Élysée. Révolution de palais : tous, du plus petit au plus haut, du plus humble au plus gradé, demandent qu'il n'en soit rien. Le côté « enfant prodige » d'Attali, la façon dont le Président le traite, c'est-à-dire comme un objet précieux, en a sans doute énervé beaucoup ! Et François Mitterrand sursoit : c'est Bianco qui sera secrétaire général. Mais Attali assistera au Conseil des ministres. Bizarre répartition des rôles, qui rend tout le monde rêveur.
    C'est Mauroy qui, devant Hervé Bourges 8 , qu'il connaît bien, raconte le détail de cette histoire durant le déjeuner.

    Nuit du 7 au 8 juillet
    Voyage en Hongrie, donc, avec Mitterrand. Dans l'avion qui nous emmène à Budapest, il me fait appeler à l'avant de l'appareil. C'est une habitude qu'il a prise depuis qu'il est président : l'appareil ayant à peine décollé, il choisit de convoquer, dans la cabine qui lui sert à la fois de bureau et de salle à manger, un ou plusieurs heureux élus. Il faut voir la tête de ceux qui, cette fois, ne le sont pas, et me regardent me déplacer à l'avant de l'avion, précédée par un aide de camp ou quelque chose comme cela.
    Mitterrand me parle longuement – une heure à peu près, c'est-à-dire presque la durée du voyage – de la télévision. Il me demande si je pense toujours que Michel May, dont je lui avais soufflé le nom lors d'une conversation, serait un bon candidat pour TF1. Puis il m'interroge sur la pièce maîtresse de la loi en gestation sur l'audiovisuel : la Haute Autorité. Son principe n'a pas été mis en cause par l'opposition lors de la discussion de la loi, qui n'a pourtant pas été facile. C'est une bonne chose qui devrait, selon lui, faciliter sa mise en place.
    André Rousselet, me révèle-t-il, m'y pousse beaucoup. Je réponds en bref qu'il serait dommage de me faire quitter Radio France au bout de quelques mois seulement.
    « Oui, me dit-il, vous avez raison, il ne faut pas toujours changer. »
    Ce qui ne l'empêche pas de décrire la personnalité qu'il souhaite mettre à la tête de cette instance. Il lui faut, m'explique-t-il, quelqu'un qui sache prendre les coups, « comme Georges Fillioud », qui ne se laisse pas griser par l'audiovisuel, qui connaisse le métier, et en qui il ait confiance. « D'autant que des pressions inouïes s'exerceront sur les membres de la Haute Autorité, et qu'il va falloir, répète-t-il, encaisser les coups. »
    Nous en restons là. Il me demande de lui préparer une liste de présidents possibles.
    Nous parlons ensuite de Jacques Chirac et de la mairie de Paris. Il fallait, dit-il – faisant allusion à la modification du statut de Paris, qu'il réclame –, ramener Chirac à la raison : « Dans les arrondissements où la gauche est élue, Jacques Chirac et ses hommes ont fait en sorte qu'elle ne bénéficie d'aucune subvention. Vous savez que dans le XVIII e  arrondissement, poursuit-il, il y a autant d'habitants qu'à Rennes. Eh bien, regardez les investissements : les constructions à Rennes, et celles du XVIII e  ! Vous serez étonnée. Rien dans le XVIII e , parce qu'il s'agit d'une circonscription socialiste, et des tas de HLM à Rennes : cela fait réfléchir !
    « Je l'ai dit à Chirac, poursuit-il. Il m'a répondu qu'il ne supporterait pas qu'on touche aux arrondissements. Lorsque ses lieutenants ont attaqué, Labbé, Pons, Pasqua – il prononce curieusement Pasca  – j'ai fait dire à Chirac : “Vous ne calmez pas vos lieutenants, je laisse donc agir les miens.” C'est ce que j'ai fait : cela a donné un nouveau projet pour Paris. »
    Il se radoucit : « Et puis, maintenant, on va négocier : il sera une sorte de président du conseil général, en respectant les droits de nos élus. C'est une situation tout à fait normale. Pas de quoi en faire un drame ! »

    Nous atterrissons à Budapest. Là, devant l'édifice néogothique du Parlement, a lieu une sorte de cérémonie presque rigolote tant elle frise le ridicule. Devant l'imposant monument sont alignés, derrière le président de la République et le Premier ministre hongrois, un tas d'hommes dont je pense qu'ils sont membres du gouvernement. Mitterrand et tous ceux qui l'accompagnent, y compris les invités personnels dont je fais partie,

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