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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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leur serrent la main à tour de rôle. Incroyable ballet où les deux cohortes, la française et la hongroise, se croisent, se saluent sans se connaître et en n'échangeant que des sourires muets.

    8 juillet
    Longue conversation au bord du Danube avec le médecin personnel de Mitterrand, le docteur Gubler, qui ne manque aucun des voyages présidentiels où il veille de très près sur le Président. J'essaie de lui demander comment va Mitterrand ; il me répond, comme je m'y attendais, qu'il va très bien.
    En revanche, il me donne, à moi, des conseils de santé assez inattendus : comme, refusant un whisky, je lui dis que j'ai mal à l'estomac, il me dit que c'est l'eau de Perrier et non l'alcool qui en est responsable. « Un doigt de whisky, croyez-moi, c'est meilleur pour l'estomac que deux verres de Perrier ! »
    Consultation gratuite.

    Un peu plus tard, en attendant le dîner, je passe un moment avec Pierre Joxe dont j'ignorais qu'il aimait et connaissait à ce point la Hongrie. Il me conseille de passer mes vacances sur le Danube, dans un bateau qui, paraît-il, relie lentement Vienne à Budapest. Il paraît que c'est magnifique.
    Les voyages présidentiels servent tout de même à quelque chose : je n'avais aucune sympathie pour Pierre Joxe avant qu'il ne me parle, au soleil couchant, et de cette façon, du beau Danube bleu...

    Scène inouïe dans le restaurant hongrois où Mitterrand a invité un certain nombre de membres de sa « suite », ainsi que quelques-uns des journalistes qui ont fait le voyage. Dans la salle du restaurant, Mitterrand a réclamé un poste de télévision : c'est aujourd'hui, dans le cadre du Mondial de football 1982, que la France rencontre l'Allemagne à Séville. Il ne veut pas manquer le match.
    Tout le monde s'agglutine tant bien que mal autour de lui. Il adore le football, comme d'autres sports, d'ailleurs. Il est notamment imbattable sur le vélo. Ce soir, il commence, comme nous tous, par se réjouir des trois buts marqués par la France. Et puis, et puis, le match se termine, nous en sommes à trois à un lorsque entre sur le terrain, dernier atout allemand, Karl Heinz Rummenigge. Nous le voyons exhorter les joueurs allemands à se reprendre, les galvaniser. En quelques minutes à peine, pendant les prolongations, l'Allemagne égalise. Lorsque l'avant-centre allemand Schumacher fauche le gardien de but français, qui répond, je crois, au nom de Battiston, nous hurlons, Mitterrand le premier, contre cette formidable agression, tout à fait exceptionnelle par sa brutalité dans un Mondial de foot.
    Mais il n'y a plus rien à faire : aux tirs au but, l'Allemagne gagne.
    Nous quittons le restaurant, encore ahuris par la charge inouïe de l'Allemand. Et aussi par la rapidité de leur victoire alors même qu'ils étaient largement devancés. Mitterrand a-t-il pensé que, comme en politique, on pouvait toujours gagner en seconde mi-temps, même en ayant été largement dominé à la fin de la première ? Je n'ai pas eu l'occasion de le lui demander. Je ne le saurai jamais.

    17 juillet
    Pas trop tard (sans doute l'ai-je voulu ainsi) pour écrire sur les deux derniers jours du voyage hongrois. Impression grave, triste, floue, que « rien ne va plus ». Obsédé par ses ennemis, Mitterrand s'en crée chaque jour de nouveaux. Convaincu que son gouvernement n'est pas en tort, pas plus que lui-même, il accuse le diable et son train de vouloir abattre le régime. Persuadé, surtout, que la presse est responsable de tous ses maux, il s'indigne, s'insurge, souffre et tonne.
    Certes, il a raison, la haine contre lui existe, et je la sens aussi bien que tout autre –  cf. un récent article du journal Minute contre moi –, mais il me semble que le meilleur moyen de la juguler, cette haine, est de gouverner. Et de ne pas trop s'occuper de la presse. Les journaux ne sont que le reflet, et non la cause, des ennuis de la gauche au pouvoir. Je n'arrive à le formuler qu'à demi-mot, et ma conviction se heurte à ma révérence. Dur combat dont je sors épuisée...

    5 août
    Je suis à peine arrivée sur mon lieu de vacances, à Beauvallon, qu'un lumbago me terrasse. Je me retrouve complètement immobilisée, une seule position – en chien de fusil, sur le côté – ne m'arrachant pas des cris de douleur. C'est dans cette situation que m'a trouvée Georges Fillioud, qui, passant ses vacances sur la Côte, voulait me parler de la Haute Autorité. Il me conseille de ne

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