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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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opération beaucoup plus difficile.
    Quand je pense que je vais devoir annoncer cela aux salariés de Radio France, j'en ai froid dans le dos...

    21 juin
    Je suis conviée ce soir par Ladislas Poniatowski et son père à un dîner auquel ils ont voulu inviter tous ceux qui leur sont chers, au-delà des clivages politiques. Il y a là une quinzaine d'amis de Giscard, trois ou quatre de Mitterrand, une dizaine de Georges Pompidou. Je suis contente de figurer parmi eux. Nous sommes là hors du temps, dans un univers de roman, véritablement, cet univers qu'aime tant Michel Poniatowski.
    À la fin, celui-ci évoque longuement les erreurs du pouvoir actuel. Est-ce parce que c'est à moi qu'il les raconte ? Toujours est-il qu'il a, pour les analyser et même les dénoncer, un ton d'une sagesse, d'une compétence et d'une sérénité uniques dans l'univers politique en noir et blanc d'aujourd'hui. Mieux aurait valu, à ses yeux, une dévaluation de 15 points, pour que la marge d'action dégagée soit plus confortable.
    Nous parlons de Giscard. Il revient trop tôt, convient Ponia, mais peu importe : c'est qu'il ne veut pas laisser le terrain libre à d'autres qui se montreraient encore plus actifs. « Tout ce qui se passe, tout ce qui s'est passé, me dit-il, ne joue pas assurément pour lui. Il n'est pas exclu qu'à ce jeu, tout le monde, Chirac aussi bien que Giscard, perde. »
    Mais enfin, ajoute-t-il, personne ne s'est affirmé à droite depuis un an, sauf peut-être Raymond Barre qui joue bien, et qui, selon lui, a raison sur toute la ligne.

    Avant ce dîner, j'ai vu Mitterrand, vers 18 heures. Il ne me paraît pas guilleret. Évidemment, je n'ose l'interroger sur les difficultés économiques du moment, car mon incompétence est telle qu'il me pulvériserait. Et, surtout, il apprendrait que Mauroy me parle plus qu'il ne l'imagine. Je le connais, cela lui déplairait beaucoup : il compartimente tellement ses amis, l'un dans une case, l'autre dans une autre, sans porte de communication, qu'il ne peut imaginer qu'en dehors de lui, et malgré lui, des liaisons néanmoins s'établissent...
    Pas guilleret, donc, mais il va mieux. Son teint est redevenu normal. Je veux dire : pas cireux, ni parcheminé. Il m'invite à l'accompagner dans son voyage officiel en Hongrie, début juillet.

    24 juin
    Ce matin, inauguration de Radio Vaucluse, entre deux avions. Je raconte dans mon discours quelques salades sur les beautés d'une station de radio locale, avant de rentrer dare-dare à Paris pour m'occuper de la négociation sur les 39 heures. Ça n'a l'air de rien : la durée du travail à Radio France était non pas de 40 heures, mais de 40 heures et demie. Ramener le temps de travail à 39 heures est donc plus difficile qu'en beaucoup d'autres endroits.
    Lorsque j'entends la logomachie des représentants syndicaux CFDT, lorsqu'ils me disent, s'adressant à moi comme si j'étais la représentante du CNPF : « Nous n'avons pas confiance en vous parce que vous nous trompez depuis huit ans ( sic ) », me mettant ainsi dans le même panier que ceux qui m'ont précédée, je pense vraiment que si l'esprit du 10 Mai est bien mort, et puisque tel est le cas, c'est leur faute. Ils n'ont pas voulu, comme l'ensemble des syndicats d'ailleurs, assumer les responsabilités, pas voulu prendre leur part du pouvoir, ce que nous payons aujourd'hui par le blocage des salaires et des prix. La social-démocratie confrontée aux syndicats, quelle misère !

    Puis dîner chez Marie-France Garaud. Elle crée un institut international de géopolitique. Je suis sceptique. Nous verrons bien. Mais enfin, cette diablesse de femme a trouvé à s'occuper. Elle plaisante drôlement sur son activisme en racontant, comme à son habitude, une petite histoire marrante :
    « C'est comme dans l'histoire de la Jument verte . Il y a une femme qui a violé tous les hommes. Le jour de la procession, on lui donne à porter une croix très lourde, qui pèse trente kilos. Comme cela, ses mains sont occupées. Eh bien, moi, c'est la même chose. »

    4 juillet
    Remaniement gouvernemental. Sortent du gouvernement Nicole Questiaux, qui, par ses certitudes, avait réussi à horripiler à la fois Mitterrand et Mauroy, et Dreyfus, touché par la maladie. Montent en grade Jean-Pierre Chevènement (ce qui prouve que Mitterrand ne lui a pas tenu rigueur de sa position hostile à la politique de rigueur proposée par Mauroy) et Pierre Bérégovoy. Celui-ci

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