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Catherine des grands chemins

Catherine des grands chemins

Titel: Catherine des grands chemins Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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d'un seul coup, Catherine demeurait bouche bée, regardant Gauthier comme s'il devenait subitement fou.
    — Je veux dire qu'un fantôme sait tout ce qui concerne les vivants.
    Il se serait tourné vers vous. Et puis, pourquoi le masque ?
    — Tu ne supposes pas que j'aurais vu Arnaud ?... Arnaud en personne ?
    — Je n'en sais rien. Mais il se passe d'étranges choses. Admettez que Fortunat ait approché messire Arnaud, qu'il lui ait appris que sa mère était mourante ? Au seuil de la mort, la lèpre n'est plus à craindre... Il a peut-être voulu la revoir une dernière fois. Tandis qu'il n'est pas venu vers vous parce qu'il ignorait votre retour. Fortunat l'ignorait bien, lui.
    — Où serait-il alors maintenant ? Et que s'est-il passé ici ?
    Pourquoi ces ruines, ce silence, ce désert ?
    — Je l'ignore, répliqua Gauthier songeur, mais je vais essayer de l'apprendre. Quant à savoir où il est, j'ai idée que Fortunat pourrait nous le dire... comme il pourrait peut-être nous dire aussi où sont passés Morgane et Roland.
    Doucement, il l'entraînait maintenant hors des ruines. Catherine s'accrochait à lui comme un enfant peureux et le regardait avec des yeux émerveillés.
    — Tu penses vraiment ce que tu dis ?
    — Ai-je dit quelquefois des choses que je ne pensais pas ? Surtout à vous ?
    Elle eut un sourire tremblant, encore si proche des larmes que le Normand sentit son cœur fondre de pitié. Il l'aimait assez pour oublier son propre amour et ne désirer rien d'autre que la voir heureuse. Hélas
    ! Le destin paraissait s'acharner sur elle et, pour une faiblesse dont elle s'était rendue coupable, que de larmes présentes et à venir !
    — Ne me donne pas trop d'espoir, implora-t-elle. Vois-tu, je pourrais en mourir.
    — Restez forte comme vous l'avez toujours été. Et tâchons de savoir... Partons d'ici. Nous trouverons bien quelqu'un qui saura ce qui s'est passé.
    Ils reprirent leurs montures et quittèrent le val désert remontant vers les lieux habités, vers le ciel libre... Cette fois, Gauthier marchait en tête, cherchant une trace de vie dans ce lieu abandonné. Catherine suivait, tête basse, essayant de mettre de l'ordre dans ses idées, partagée également entre l'espoir et le chagrin. D'un seul coup, tout ce qui, jusque-là, avait eu de l'importance pour elle, avait cessé d'en avoir. Une seule chose comptait encore : savoir si Arnaud était mort ou vivant. Car il ne serait plus de repos possible pour elle tant qu'elle n'aurait pas acquis de certitude.
    Comme on sortait du bois noir, Gauthier se haussa sur ses étriers, tendit le bras vers le sud.

    — Tenez ! Je vois la fumée d'une chaumière sur un tertre... De là-haut, on doit apercevoir les toits de la maladrerie... enfin : on devrait
    !...
    C'était une toute petite maison, modeste sous son toit de chaume délavé. Pour ne pas risquer de faire peur aux habitants, Gauthier et Catherine laissèrent leurs montures attachées à un arbre et grimpèrent à pied le raidillon qui menait jusqu'à la porte. Le bruit de leurs pas attira au seuil une vieille paysanne en coiffe jaune, qui tenait à la main une quenouille enveloppée d'osier. Elle devait être très âgée car elle était toute voûtée et, de sa main libre, s'appuyait sur un bâton de cornouiller, mais les yeux qu'elle leva sur les arrivants étaient demeurés jeunes et perçants : deux fleurs de pervenche dans un visage tanné, tout étoilé de rides.
    — N'ayez pas peur, bonne mère, dit Gauthier en adoucissant sa voix autant qu'il le pouvait, nous ne vous voulons aucun mal.
    Seulement un renseignement.
    — Entrez, mes beaux seigneurs, la maison vous est ouverte.
    — Nous ne voulons pas vous déranger, dit à son tour Catherine, et nous avons peu de temps.
    Tout en parlant, elle se détournait, regardait le paysage étendu à ses pieds. En effet, au-delà de la ligne noire des arbres, on apercevait les ruines de la léproserie. Du geste, elle les désigna.
    — Savez-vous ce qui s'est passé là-bas ?
    La terreur se peignit sur le visage de la vieille qui se signa plusieurs fois et marmotta des paroles indistinctes, puis :
    — C'est un lieu maudit... Il ne faut pas en parler, cela porte malheur.
    — Cela dépend, reprit Catherine en tirant une pièce d'or qu'elle fit briller au soleil couchant avant de la glisser dans la main crochue de la vieille. Parlez, bonne mère, et vous en aurez une autre.
    La vieille, l'œil incrédule, commença par mordre la pièce pour

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