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Catherine des grands chemins

Catherine des grands chemins

Titel: Catherine des grands chemins Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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mangez, mais ne buvez pas trop.
    Le vin de Vouvray est agréable... mais il monte à la tête.
    — Nous prenez-vous pour des ivrognesses ? s'insurgea Sara.
    — Nullement..., mon révérend. Mais les moines ont si mauvaise réputation ! Ne bougez surtout pas avant que je ne revienne.
    Tandis que le faux moine et le faux écuyer allaient attacher leurs chevaux au montoir du « Pressoir Royal », Tristan s'engagea résolument sur le pont et disparut bientôt aux yeux de ses compagnes.
    La petite auberge était vide et l'aubergiste s'empressa de servir ses hôtes inattendus. Il avait encore des cochons au saloir et put leur servir une soupe aux choux qui, escortée du fameux vin, fit un repas des plus convenables. On était au milieu du jour et les deux femmes, qui avaient voyagé pendant plus de trois jours, étaient affamées.
    Restaurées convenablement, elles se sentirent mieux et Sara vit les choses sous un jour plus optimiste.
    Tristan revint quand le jour tomba. Il semblait las, soucieux, mais il y avait dans ses yeux bleus une lueur encourageante. Il refusa de parler avant d'avoir avalé un pichet de vin parce que, dit-il, son « gosier était sec comme de l'étoupe et qu'il suffirait de la moindre flamme pour l'incendier». Dévorée d'impatience, Catherine le regardait avaler son vin, mais elle n'y tint pas longtemps.
    — Alors ? fit-elle nerveusement.
    Tristan reposa son pichet, s'essuya les lèvres à sa manche et lui jeta un regard moqueur.
    — Vous êtes si pressée de vous jeter dans la gueule du loup ?
    — Très pressée, fit la jeune femme sèchement. Et je veux une réponse.
    — Alors, soyez contente, tout est arrangé. Dans un sens, vous avez de la chance... mais dans un sens seulement car, le moins que l'on puisse dire, est que les relations entre le château et le camp des Tziganes sont assez tendues.
    — D'abord, intervint Sara, ces Tziganes, que sont- ils ? Avez-vous pensé à vous informer ?
    — Vous allez être satisfaite, et là encore vous avez de la chance.
    Ce sont des Kalderas. Ils se disent chrétiens et prétendent détenir un bref du pape Martin V, mort voici deux ans. Ce qui n'empêche pas leur chef, Fero, de se dire duc d'Egypte.

    Tandis qu'il parlait, le visage de Sara s'éclairait. Quand il eut fini elle frappa joyeusement dans ses mains.
    — Ils sont de ma race. Dès lors, je suis certaine de leur accueil.
    — Vous serez, en effet, bien accueillie. Seul, le chef sait la vérité en ce qui concerne dame Catherine. Pour tous les autres, elle passera pour votre nièce, vendue elle aussi comme esclave quand elle était enfant.
    — Et, dit Catherine, que pense le chef de mes projets ?
    Le front de Tristan l'Hermite se rembrunit.
    Il vous aidera de tout son pouvoir, la haine le brûle. Le caprice de La Trémoille lui interdit de quitter les fossés du château où il est campé, parce que le chambellan aime les danses des filles de sa tribu. Mais, d'autre part, l'un de ses hommes a été pris hier à voler dans un courtil et pendu ce matin. S'il ne craignait de voir exterminer les siens sur le grand chemin, Fero s'enfuirait. Voilà pourquoi je dis que vous avez de la chance dans une certaine mesure, mais que, d'autre part, vous allez mettre le pied dans un véritable chaudron de sorcières."
    — Qu'importe ? Il faut que j'y aille.
    — Le temps est encore froid, il vous faudra aller pieds nus, coucher à la belle étoile ou dans un mauvais chariot, vivre rudement et...
    Catherine lui éclata de rire au nez, si brusquement qu'elle lui coupa la parole.
    — Ne soyez pas stupide, messire Tristan. Si vous connaissiez ma vie dans ses détails, vous sauriez que je ne crains rien de tout cela.
    Assez tergiversé. Préparons- nous !
    L'aubergiste payé, les trois complices sortirent, se dirigèrent vers le pont. Depuis deux jours, le temps s'adoucissait et la nuit, si elle était humide, n'était pas froide. Catherine rejeta son camail sur ses épaules, libérant ses nattes qu'elle secoua ; son humeur batailleuse lui revenait.
    Le silence n'était troublé que par le bruit soyeux de l'eau dans les hautes herbes et le pas des chevaux. Une bonne odeur de terre mouillée emplissait les narines de Catherine qui prit deux ou trois grandes respirations. Le pont aboutissait d'abord à une longue île boisée où cependant brillait une faible lumière. Dans la journée, la jeune femme avait pu remarquer la petite chapelle Saint-Jean et l'ermitage qui s'y appuyait. Ce devait être la chandelle

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