C'était de Gaulle - Tome II
lui dans le même culte de l'État ; il les met, à cet égard, très au-dessus des hommes de parti. Pourtant, il ne leur laisse rien passer de leurs faiblesses. Il les juge à l'aune de son exigence : « Ils ne pensent qu'à leurs privilèges. Ils ont l'esprit de caste. Ils ne sont pas vraiment au service de la nation. Ils ne pensent qu'à mettre la main sur les places. »
« C'est l'honneur d'un chef de payer pour les autres »
Conseil du 6 mai 1964.
Voilà pourquoi il sait être sévère et souligner que la responsabilité des chefs est entière — qu'aucune chaîne hiérarchique ne peut en affranchir.
Frey : « Le préfet de la Charente-Maritime est placé en disponibilité à la suite d'un incident grave qui s'est produit à La Rochelle : l'évasion de l'un des assassins de l'OAS.
GdG. — Il est certain que ce préfet avait toujours donné satisfaction. Mais cette évasion est scandaleuse. Elle ne peut manquer d'être sanctionnée. C'est le préfet qui paye. Il aurait dû surveiller son monde. Il n'avait pas suffisamment en main le personnel de l'État dans son département...
« C'est l'honneur d'un chef de payer pour les autres, même s'il n'est pas directement responsable. »
Au Conseil du 4 décembre 1963, Fouchet propose de remplacer le recteur de l'académie de Caen, qui occupait ces fonctions dès avant la guerre et les a exercées pendant et après la guerre.
GdG : « Il n'est pas satisfaisant de penser qu'un fonctionnaire de haute responsabilité a traversé plusieurs régimes. On peut se demander quel régime il a servi et quel régime il a trahi. Cela fait penser à cet homme politique qui arborait successivement la francisqueet la médaille de la Résistance (il pense sûrement à Mitterrand). Il est inadmissible qu'on laisse ainsi s'incruster des fonctionnaires qui deviennent des potentats. Un fonctionnaire, c'est fait pour tourner. Lyautey disait qu'un fonctionnaire doit avoir ses malles à portée de la main. Disons que trois ans c'est bien, moins ce n'est pas assez. Dix ans, c'est trop, sauf en cas de réussite exceptionnelle attachée à sa personne, comme c'est le cas pour Alphand à Washington. Vingt-cinq ans, c'est incroyable, c'est intolérable ! »
« Trop d'avantages, trop d'honneurs, trop d'effectifs »
Le Général supporte mal que les fonctionnaires soient payés sur les travaux qu'ils contrôlent.
Au Conseil du 21 juin 1962 :
Giscard : « Le Génie rural continue à prélever un pourcentage sur tous les travaux d'équipement dont il est chargé. Impossible de lui faire lâcher prise.
Pisani (mordant). — Je suis ravi de l'intérêt que chacun porte à ma maison, persuadé que cela m'aidera à régler mes problèmes.
GdG. — La rémunération latérale des services publics est inadmissible. C'est un abus manifeste, auquel il importe de mettre fin. »
Mais ces objurgations répétées se heurtent à la passivité de ministres qui ne croient pas qu'ils « régleraient leurs problèmes » en se mettant à dos leurs fonctionnaires.
Même les indemnités, si minimes soient-elles, suscitent son ire.
Au Conseil du 12 décembre 1964 est examiné un décret pour faire passer de 81,60 F à 115 F le taux annuel de l'indemnité forfaitaire versée aux agents de l'État qui relèvent les mouvements de la marée pour l'Institut Géographique National :
GdG : « Pourquoi donner des indemnités supplémentaires à des gens qui ne font que leur métier ? Ça finit par être excessif. »
Excessif aussi, le nombre de fonctionnaires dont l'utilité lui paraît douteuse. Au Conseil du 3 mars 1964, Frey propose des nominations d'inspecteurs généraux.
GdG : « Vous les utilisez à quoi ?
Frey. — À quantité de missions.
GdG. — Mais encore ?
Frey. — Des missions très variées.
GdG (de moins en moins convaincu). — Vous les utilisez vraiment ? »
Après le Conseil, il revient sur ce point : « Il y a toutes sortes de corps d'inspection dont je me demande bien ce qu'ils inspectent. Si on faisait le recensement de tous les fonctionnaires service parservice, je suis persuadé qu'on en trouverait beaucoup dont personne ne pourrait dire à quoi ils servent. Il y a dans la fonction publique trop d'avantages, trop d'honneurs, trop d'effectifs. »
« L'honorariat, il faudra y remédier »
De tous les honneurs, l' « honorariat » est celui qui soulève le plus son irritation. Au Conseil du 16 janvier 1963, avertissement :
« À la fin des fins, il faudra absolument
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