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C'était de Gaulle - Tome II

C'était de Gaulle - Tome II

Titel: C'était de Gaulle - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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compte ! De quoi se mêle-t-il ? Il veut nous faire passer sous son joug ! »
    Il retrouve, face à cette tentative du Conseil d'État, l'ire implacable qu'avait suscitée en lui l'arrêt Canal 7 . Après le Conseil du 16 janvier 1963, il m'avait dit froidement : « Il fallait donner un coup de talon au Conseil d'État. » Et il avait ajouté, peu charitable : « Pendant la guerre ces messieurs du Conseil d'Etat n'ont rien trouvé à redire sur les lois de Vichy contre les juifs. Ils ont prêté serment sans sourciller au Maréchal qui avait promulgué ces lois. Et maintenant, ils prennent la défense d'un officier factieux, comme s'il était opprimé. »
    Le Général gardait une mémoire fidèle de ceux qui lui avaient manqué. Les conseillers d'État lui avaient manqué en prononçant l'arrêt Canal. En 1970, retiré à Colombey, il fit disparaître du recueil, que François Goguel préparait, de ses Discours et messages, le texte de l'allocution louangeuse qu'il avait prononcée devant les membres du Conseil le 26 janvier 1960 : la suite de leur comportement n'avait pas mérité de leur maintenir ces éloges. Il m'avait dit un jour : « L'Église a bien raison de ne jamais canoniser un saint de son vivant. Il vaut mieux attendre la fin, on n'est jamais à l'abri d'une surprise. »

    « Le Conseil d'État, au fond, a raison »
    Le Général sait pourtant donner le pas à sa rigueur intellectuelle sur sa rancune.

    Conseil du 18 septembre 1963. Giscard, présentant le projet de loi de finances pour 1964, commente sans aménité les critiques sévères que le Conseil d'État fait à ce texte.
    À la surprise de tous, le Général approuve le Conseil d'État : « Il a fait une observation de fond qui a toute sa valeur : vous introduisez dans la loi de finances des dispositions qui modifient le régime fiscal général. La loi de finances est une loi d'occasion, à caractère annuel. Les dispositions concernant le régime fiscal général sont des lois de principe, des lois de base. Le Conseil d'État, au fond, a raison. Il faut modifier les habitudes. »
    Après le Conseil, j'exprime au Général mon étonnement. Il me répond avec douceur : « Je suis désireux en toute chose de roder correctement les institutions. Mon devoir est d'éviter les mauvais précédents et d'en créer de bons. Ce texte n'était pas conforme aux dispositions de la Constitution, qui sont si restrictives en ce qui concerne le budget. Il faut toujours sauvegarder un principe quand il est mis à mal. »

    Le Général aime aussi honorer. Il a des éloges ciselés pour certains noms qui viennent au Conseil.
    Au Conseil du mardi 23 juin 1964, Messmer propose de nommer Éric Tabarly chevalier de la Légion d'honneur à titre exceptionnel : « Il a battu largement les records précédents de voiliers barrés par un homme seul.
    GdG. — C'est un exploit retentissant par les qualités techniques, le caractère, l'énergie qu'il manifeste. Il apporte un bénéfice national. Il recule les limites humaines. Il offre à la jeunesse un exemple à admirer. »
    Le Général en profite pour manifester, une fois de plus, son obsession de poser des principes et de créer des précédents, jusque dans les détails :
    « Réglons un point de pratique : le code prévoit que, pour les titres exceptionnels, le décret doit être pris en Conseil, de manière à éviter des abus qui avaient lieu naguère. Mais il ne faut pas méconnaître les urgences, notamment dans des engagements militaires, où il est urgent de décorer, à titre d'exemple et parce que l' intéressé peut être tué. Il faut admettre que, dans ce cas, la décision peut être prise par le Président de la République sur demande du ministre intéressé, et ensuite ratifiée par le Conseil des ministres. Le décret Tabarly est donc pris aujourd'hui même et la nouvelle règle sera désormais retenue. »
    1 De minimis non curat praetor : le chef ne s' occupe pas des détails.
    2 Sénateur gaulliste de Moselle.
    3 Georges Pompidou, Jean de Broglie, au gouvernement, Georges Galichon à l'Élysée, Jean Donnedieu de Vabres, secrétaire général du gouvernement, en étaient.
    4 Maurice Couve de Murville, Louis Joxe, moi-même, au gouvernement ; à l'Elysée, Étienne Burin des Roziers après Geoffroy de Courcel, Xavier de la Chevalerie après René Brouillet, Pierre Maillard après Jean-Marc Boegner.
    5 Fonction qu'il occupera effectivement de 1968 à 1971.
    6 Ce qui signifie que le gouvernement

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