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Chasse au loup

Chasse au loup

Titel: Chasse au loup Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Armand Cabasson
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propriétaire se pencha sur son comptoir pour vociférer :
    — Herr Beethoven ! Vous n’avez pas payé ! Ce n’est pas gratuit pour les musiciens-poètes, ici 
    — Je paie pour lui, déclara Saber en lui jetant une poignée de kreutzers à la figure.
    Déconfit, il rejoignit ses amis. Quand elle n’aimait pas quelqu’un, Luise pouvait se montrer cinglante. Elle le toisait, narquoise.
    — Si je puis me permettre une précision, Beethoven n’avait pas dédié sa Troisième Symphonie à Napoléon, mais au révolutionnaire Bonaparte. À l’époque, il apostrophait les nobles dans les jardins publics pour leur clamer que tous les hommes étaient égaux, que la monarchie appartenait au passé... Comme Beethoven est un homme extraordinairement susceptible persuadé que le monde entier s’acharne contre lui, il accumule les esclandres. Il est tombé de haut quand votre Bonaparte s’est fait proclamer empereur. Il a déchiré sa page de titre et, désormais, sa Troisième Symphonie s’intitule Symphonie héroïque et elle est dédiée à l’un de ses mécènes, le prince de Lobkowitz. Ah oui, vraiment, quel dommage que Beethoven ait raté votre jeu de guerre en sucre !

 
    CHAPITRE XVI
    Il avait fallu insister pour emmener Relmyer jusqu’à Schönbrunn. Le palais de la Hofburg constituait le siège officiel de la Cour, bien qu’il fût vétusté et peu pratique en raison de ses bâtiments essaimés. L’empereur François I er lui préférait le château de Schönbrunn. Tout comme Napoléon qui y avait installé son quartier général. Pour prouver aux Viennois que le « faux pas » d’Essling n’avait entamé en rien sa détermination, il passait régulièrement ses troupes en revue dans ce lieu symbolique de la puissance autrichienne. Ce jour-là, comme fréquemment, un public hétéroclite se pressait dans les jardins pour assister à ce spectacle.
    Un immense parc avait été aménagé à la française avec des parterres de fleurs, des haies taillées, des arbres alignés... La symétrie constituait la règle d’or. Une fontaine de Neptune, des statues et de fausses ruines romaines sacrifiaient à la mode antique. Tout au fond, sur une petite colline, trônait une gloriette, un pavillon à colonnade qui invitait à profiter du panorama. Cet ensemble composait un lieu hors du temps. Schönbrunn évoquait un modeste Versailles. La façade, ocre jaune, chaleureuse, invitait à l’apaisement. Elle était régie par de subtiles règles mathématiques et architecturales. Le résultat, harmonieux, élégant, esthétique, ravissait les yeux. Au pied du château, plusieurs régiments patientaient. La blancheur des guêtres, des culottes et des gilets étincelait sous le soleil, contrastant avec le bleu foncé des habits. Pas un mouvement tant que l’Empereur ne serait pas là. Lefine fut pris d’un fou rire.
    — On dirait que le temps s’est arrêté, là-bas.
    Les gens s’agglutinaient contre les sentinelles chargées de les tenir à distance. Aux soldats se mêlaient des Autrichiens, pour la plupart des curieux et des sympathisants de la cause républicaine ou impériale. Certaines femmes s’étaient mises en tête de charmer Napoléon. Jeu de séduction ? Défi ? Cupidité ? Ambition ? Amour ou seulement fascination ? La beauté exquise de quelques-unes ne manquerait pas d’accrocher le regard de l’Empereur si celui-ci venait à passer trop près. Margont remarqua que Relmyer présentait une sorte de tic. Ses yeux bougeaient sans relâche. Ils ricochaient de visage en visage, s’attardant peu, ne trouvant jamais le repos. Relmyer agissait de même dans les rues, mais le nombre de personnes massées ici accentuait ce comportement, le dévoilait plus nettement. « Il le cherche », pensa Margont. Si Relmyer l’apercevait tout à coup, ici même – ou croyait l’apercevoir, car son bourreau avait changé ou s’était transformé dans ses souvenirs –, comment réagirait-il ?
    Une clameur explosa. Des cris et des « Vive l’Empereur ! ». Une berline noire arrivait, escortée par des chasseurs à cheval de la Garde, uniformes verts, pelisses rouges jetées sur l’épaule et sabres au clair. Suivait un interminable et somptueux cortège d’officiers d’état-major aux broderies dorées qui scintillaient sur les habits bleus. Des cavaliers se démarquaient par l’originalité de leur tenue. L’un, un dragon, arborait un habit vert sombre et un casque à cimier « à la

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