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Complots et cabales

Complots et cabales

Titel: Complots et cabales Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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plus fidèle de France, tant est que
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    bien des dames, y compris la mienne, en ce royaume le donnaient pour exemple à leurs maris. Il possédait, en plus, toutes les autres qualités que nos saints livres nous recommandent, sans pour autant, ce qui e˚t tout perdu, tomber un seul instant dans le péché d'orgueil. En bref, il e˚t été
    pour nous tous, à la ville comme à la Cour, un exemple et un modèle, si sa perfection même ne nous avait à l'avance découragés...
    Possédant tant de vertus enviables, il allait sans dire que Schomberg possédait aussi la plus rare : la gratitude. Et comme peut-être on s'en ramentoit, il m'avait voué une reconnaissance immense de ce que j'avais, quelques années plus tôt, intercédé auprès du roi - ce qui n'allait jamais sans péril - afin que Sa Majesté le lav‚t des calomnies abjectes qui visaient à le faire jeter en disgr‚ce.
    Au chapitre II des présents Mémoires, j'ai décrit les maréchaux Bassompierre, d'Estrées et Créqui, personnages hauts en couleur. Mais mon tableau ne serait pas complet si je n'y ajoutais le maréchal de La Force, présent en cette circonstance avec Schomberg et Marillac au camp de Foglizzo.
    La Force n'était que son nom de duc. Il se nommait, en fait, Nompar de Caumont, maître et seigneur des ch‚teaux de Castelnau et des Milandes, dans ce Périgord auquel je suis attaché par les plus chères remembrances de mes vertes années. Or, le père de Nompar de Caumont, François, avait une cousine fort belle nommée Isabelle que mon aÔeul, le baron de Mespech, épousa: mariage qui fut à la fois heureux et malheureux, heureux par l'amour qu'ils ne cessèrent de se porter, mais malheureux du fait qu'ils étaient, l'une catholique fervente, et l'autre protestant rigide, et tous deux fort entêtés en leurs croyances. En 1630 à Foglizzo, le maréchal de La Force avait déjà soixante et onze ans, mais cependant vigoureux, joyeux et bondissant. Sa famille tout entière, ainsi que la mienne, était renommée pour son étonnante longévité, et j'ai tout lieu d'espérer que mon aÔeul, le baron de Mespech, tout comme François de Caumont, duc 298
    de La Force, go˚teront le plus tard possible les félicités éternelles.
    Le maréchal de La Force, en tant que duc et en tant qu'aîné, e˚t d˚ avoir le pas sur Schomberg et Marillac, et il s'était trouvé de reste quelque peu piqué de recevoir la veille - je dis bien la veille de l'arrivée de l'huissier Lépine - une lettre du roi l'informant qu'il nommait généralissime le maréchal de Marillac. En fait, la lettre qui avait été
    écrite et expédiée le dix novembre, c'est-à-dire avant l'algarade furieuse de la reine-mère et de Richelieu, était une ultime concession du roi à sa mère : il t‚chait de la ramener à des sentiments plus doux envers le cardinal en avançant le frère de son favori. Mais par une cruelle ironie du sort, la lettre de Lépine commandant l'arrestation de Marillac parvint àFoglizzo le lendemain de cette promotion. je gage que jamais dans l'histoire de France la roche Tarpéienne ne fut plus proche du Capitole...
    Le moment, pourtant, était aimable. Maugré la froidure, le soleil brillait, illuminant la neige. Et les maréchaux, tous trois grands mangeurs, se préparaient à s'attabler avec la joyeuseté des gens bien portants. ¿ cet instant, l'huissier Lépine apparut, et sans un mot (mais on lui avait recommandé de demeurer bouche cousue) remit la lettre à Schomberg, lequel, s'écartant, rompit le cachet royal et commença à lire. Làdessus, La Force, n'oubliant jamais qu'il était duc et des trois maréchaux, l'aîné, s'approcha, jeta par-dessus l'épaule de Schomberg un oeil sur le parchemin et lui dit sotto voce
    e Monsieur, lisez votre lettre en particulier. " Schomberg acquiesça, glissa la missive dans le revers de sa manche, et dit
    - Messieurs, je ne mangerai pas. De gr‚ce, dînez sans moi, et après que vous aurez dîné, nous verrons la lettre du roi.
    Une fois hors, Schomberg, très ébranlé par ce qu'il venait de lire, appela son adjoint, le maréchal de camp Puységur, et lui ordonna de rassembler en son cabinet les capitaines aux gardes françaises. Et dès qu'ils furent là, Schomberg leur dit d'un air grave
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    - Messieurs, je reçois du roi une lettre qui m'attriste et qui vous paraîtra très étrange. Je dois sur l'heure arrêter Monsieur le maréchal de Marillac. Inutile de vous ramentevoir qu'un ordre est un ordre. II

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