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Conspirata

Conspirata

Titel: Conspirata Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
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tremblement violent comme si c’était la chose la plus étrange
qu’il eût jamais vue.

IX
    Le lendemain, Quintus débarqua chez Cicéron, surexcité :
il portait un exemplaire d’une lettre qui avait été placardée devant les
bureaux des tribuns. Elle était adressée à plusieurs sénateurs éminents, dont
Catulus, César et Lepidus, et portait la signature de Catilina : «  Victime
de fausses accusations, je cède à l’infortune et pars en exil pour Massilia,
non que j’aie conscience d’avoir commis un si grand crime mais pour préserver
la paix de l’État et pour que mon obstination à lutter ne fasse pas éclater une
sédition. Je confie ma femme et ma famille à votre loyauté, et mon honneur à
votre souvenir. Adieu !  »
    — Félicitations, mon frère, dit Quintus en lui assenant
des claques dans le dos. Tu l’as fait partir.
    — En est-on certain ?
    — Aussi certain qu’il est possible de l’être. On l’a vu
quitter la ville de bonne heure ce matin avec quelques compagnons à cheval. Sa
maison est vide et close.
    Cicéron fit la grimace et se pinça le lobe de l’oreille.
    — Pourtant, murmura-t-il, j’ai l’impression que quelque
chose ne tourne pas rond.
    Quintus, qui s’était dépêché de venir délivrer la bonne
nouvelle, fut irrité par tant de prudence.
    — Catilina a été contraint de fuir. C’est comme s’il
avait avoué. Tu l’as battu.
    Alors, lentement, comme les jours passaient et que l’on n’entendait
plus parler de Catilina, on commença à croire que Quintus pouvait avoir raison.
Néanmoins, Cicéron refusa de relâcher les mesures de protection imposées à Rome ;
en fait, il s’entoura d’encore davantage de gardes. Encadré par une douzaine d’hommes,
il sortit de la cité pour aller voir Quintus Metellus, qui détenait toujours l’ imperium militaire, et lui demanda de se rendre dans le talon de l’Italie pour s’occuper
de la région de l’Apulie. Le vieil homme grommela, mais Cicéron lui jura qu’après
cette dernière mission son triomphe serait assuré, et Metellus, que je
soupçonnais d’être secrètement heureux qu’on lui confie enfin une mission,
partit aussitôt. Un autre ancien consul qui espérait également un triomphe,
Marcius Rex, partit vers le nord à Faesulae. Le préteur Q. Pompeius Rufus,
en qui Cicéron avait toute confiance, reçut l’ordre d’aller lever des troupes à
Capoue. Pendant ce temps, Metellus Celer continuait de recruter son armée dans
le Picenum.
    Ce fut vers cette époque que le chef des insurgés, Manlius,
envoya un message au sénat : «  Les dieux et les hommes nous en
soient témoins : nous n’avons pas pris les armes pour insulter à la patrie
mais seulement pour nous mettre à couvert de l’injustice : réduits à la
mendicité par d’impitoyables usuriers, nous avons vu nos biens et l’héritage de
nos pères augmenter leurs revenus, et nous avons tous perdu réputation et
fortune.  » Il réclamait que chaque dette contractée en argent (comme la
plupart des dettes) fût remboursée en petite monnaie : geste qui
couvrirait les trois quarts de la dette. Cicéron proposa d’envoyer une réponse
très ferme indiquant qu’il n’y aurait pas de négociation tant que les rebelles
n’auraient pas déposé les armes. La motion fut entendue au sénat, mais à l’extérieur
de la curie beaucoup chuchotaient que la cause rebelle était juste.
    Octobre céda la place à novembre. Les jours commencèrent à
se refroidir et à s’obscurcir ; les Romains sombraient peu à peu dans l’abattement
et la lassitude. Le couvre-feu avait mis fin à toutes les distractions qui leur
permettaient habituellement de repousser l’ennui de l’hiver approchant. Les
tavernes et les bains fermaient tôt ; les boutiques n’offraient pas grand-chose.
Les délateurs, attirés par les fortes récompenses offertes à qui dénonçait les
traîtres, en profitaient pour régler de vieux comptes à l’encontre de leurs
voisins. Tout le monde soupçonnait tout le monde. Les choses finirent par
prendre un tour si grave qu’Atticus se chargea d’en parler à Cicéron.
    — Des citoyens prétendent que tu exagères délibérément
la menace, avisa-t-il son ami.
    — Pourquoi ferais-je une chose pareille ?
Croient-ils que ça me fait plaisir de transformer Rome en une geôle dont je
serais le prisonnier le mieux gardé ?
    — Non, mais ils pensent que tu es obsédé par Catilina
et que tu as perdu

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