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Conspirata

Conspirata

Titel: Conspirata Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
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« Oh ! » sonore et choqué de
toute l’assemblée.
    — Si ce sénat n’attribue pas le commandement à Pompée,
dit Nepos, je vous préviens en toute honnêteté que je déposerai devant le
peuple une motion réclamant son rappel dès que j’aurai pris mes fonctions de
tribun.
    — Et je te préviens en toute honnêteté que j’opposerai
mon veto à ta motion, rétorqua Caton.
    — Citoyens, citoyens ! s’écria Cicéron qui dut
hurler pour se faire entendre, nous ne servirons ni nous-mêmes ni l’État en
nous querellant alors qu’il y a urgence nationale ! Il y aura demain une
assemblée publique. Je ferai part au peuple de nos délibérations, et j’espère,
ajouta-t-il en fixant du regard Sura et ses acolytes, que les sénateurs qui
sont peut-être physiquement avec nous mais dont la loyauté va ailleurs
profiteront de la nuit pour sonder leur cœur et agir conformément à leurs
convictions. La séance est levée.
    Normalement, Cicéron aimait à s’attarder devant la curie
afin que les sénateurs qui désiraient lui parler puissent le faire. Cette
connaissance qu’il avait de chacun, aussi mince fût-elle – ses forces
et ses faiblesses, ce qu’il espérait et ce qu’il redoutait, ce qu’il était prêt
à supporter ou pas –, comptait au nombre des outils qui l’aidaient à
exercer son contrôle sur la chambre. Mais cet après-midi-là, il s’éloigna
rapidement, le visage aussi fermé qu’un masque.
    — J’ai l’impression de lutter contre l’Hydre,
tempêta-t-il à peine rentré chez lui. Dès que je tranche une tête, il y en a
deux qui repoussent ! Catilina part en claquant la porte, mais ses hommes
de main restent tranquillement à leur place et voilà que la faction de Pompée
commence à faire des siennes ! J’ai un mois, fulmina-t-il, rien qu’un mois – si
j’arrive à survivre tout ce temps – avant que les nouveaux tribuns n’entrent
en fonction. À ce moment-là, l’agitation autour du rappel de Pompée va vraiment
commencer. Et entre-temps, on ne peut même pas être sûrs d’avoir deux nouveaux
consuls en état de gouverner en janvier à cause de ce procès de malheur  !
    Il balaya d’un mouvement du bras le dessus de son bureau et
projeta par terre tous les documents relatifs au procès de Murena.
    Quand il était de cette humeur, il était impossible de lui
faire entendre raison et ma longue expérience m’avait appris qu’il ne servait à
rien d’essayer de répondre. Il attendit donc avec irritation que je réagisse
puis, comme il n’obtenait pas satisfaction, partit en trombe chercher quelqu’un
d’autre à tancer pendant que je m’agenouillais pour ramasser tranquillement les
rouleaux de preuves. Je savais qu’il finirait tôt ou tard par revenir afin de
préparer son discours du lendemain, mais les heures passèrent, le soir tomba,
on alluma lampes et bougies, et je sentis monter mon inquiétude. J’appris plus
tard qu’il s’était rendu avec ses gardes du corps et ses licteurs au jardin le
plus proche et qu’il n’avait cessé de tourner en rond au point qu’ils s’attendaient
presque à le voir creuser un sillon dans la pierre. Lorsqu’il revint enfin, il
était très pâle et avait la mine sombre. Il avait, me confia-t-il, conçu un
plan et il ne savait pas ce qu’il redoutait le plus : l’idée qu’il puisse
échouer ou la possibilité qu’il réussisse.
     
    Le lendemain matin, il invita Q. Fabius Sanga à venir
le voir. Sanga, vous vous en souvenez peut-être, était le sénateur à qui il
avait écrit le jour où l’on avait découvert le corps de l’enfant assassiné,
pour demander des informations sur les sacrifices humains et la religion des
Gaulois. Sanga avait une cinquantaine d’années et ses investissements en Gaule
cisalpine et transalpine l’avaient rendu immensément riche. Il n’avait jamais
aspiré à avancer dans la hiérarchie sénatoriale et considérait le sénat ni plus
ni moins que comme un endroit où il pouvait défendre ses intérêts financiers.
Il était très respectable et pieux, vivait modestement et était, disait-on,
très strict avec sa femme et ses enfants. Il ne prenait la parole que lors des
débats sur la Gaule et se montrait alors, il faut l’avouer, terriblement ennuyeux :
dès qu’il se mettait à parler de la géographie, du climat, des tribus et de
tout ce qui concernait la Gaule, il vidait la curie plus vite que n’importe
qui.
    — Es-tu un patriote,

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