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Dans le jardin de la bête

Dans le jardin de la bête

Titel: Dans le jardin de la bête Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Erik LARSON
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atroce, ses blessures barbouillées de sang. Après quelques instants, elle jeta un regard à Boris derrière elle. Même si elle ne se serait jamais définie comme très croyante, elle était choquée par ce qu’elle voyait.
    Boris se tenait les bras écartés, les chevilles croisées, et la tête tombant sur la poitrine.
    « Boris, arrête !  1  s’écria-t-elle. Que fais-tu ?
    – Je meurs pour toi, ma chérie. Je suis prêt à mourir pour toi, tu le sais. »
    Elle affirma que sa parodie n’était pas drôle et s’éloigna.
    Il s’excusa.
    « Je ne voulais pas te choquer. Mais je ne comprends pas pourquoi les chrétiens adorent l’effigie d’un homme torturé. »
    Ce n’était pas la question, répliqua-t-elle. « Ils adorent celui qui s’est sacrifié pour sa foi.
    – Oh, vraiment ? demanda-t-il. C’est ce que tu crois ? Y a-t-il tellement de gens qui soient prêts à mourir pour leur foi, à suivre son exemple ? »
    Elle mentionna Dimitrov et sa bravoure face à Göring au procès du Reichstag.
    Boris lui adressa un sourire angélique.
    « Oui, liebes Fraulein , mais lui , il est communiste. »

24
    U N VOTE MASSIF
    L e dimanche 12 novembre, par un matin froid, avec du crachin et du brouillard, les Dodd trouvèrent une ville étrangement calme : c’était le jour qu’Hitler avait fixé pour faire plébisciter le retrait de l’Allemagne de la Société des Nations et réclamer l’égalité des armes. Partout où les Dodd allaient, ils croisaient des gens portant un petit insigne qui indiquait non seulement qu’ils avaient voté, mais qu’ils avaient voté oui. À midi, presque tout le monde dans les rues semblait arborer cet insigne, donnant à penser que les électeurs s’étaient levés de bonne heure pour aller voter, ne voulant pas être soupçonnés de manquer à leur devoir civique.
    Même la date des élections avait été choisie avec soin. Le 12 novembre était le lendemain du quinzième anniversaire de la signature de l’armistice qui avait mis fin à la Grande Guerre. Hitler, qui parcourait l’Allemagne en avion pour faire campagne en faveur du oui, déclara une fois devant son public : « Lors d’un 11 novembre  1 , le peuple allemand a perdu officiellement son honneur ; quinze ans plus tard, lors d’un 12 novembre, le peuple allemand a retrouvé son honneur. » Le président Hindenburg faisait également pression pour un vote positif. « Montrez demain votre fermeté dans l’union nationale  2  et votre solidarité avec le gouvernement, proclama-t-il dans un discours le 11 novembre. Soutenez, avec moi et le chancelier du Reich, le principe de l’égalité des droits et de la paix dans l’honneur. »
    Le scrutin se composait de deux consultations principales. En premier, on demandait aux Allemands d’élire des délégués au Reichstag nouvellement reconstitué, mais seuls des candidats nazis se présentaient ; l’assemblée qui en résulterait serait ainsi tout acquise aux décisions de Hitler. L’autre portait sur la politique étrangère, et avait été articulée pour recueillir un soutien maximal. Chaque Allemand trouverait une raison  3  de voter pour… s’il voulait la paix, s’il pensait que le traité de Versailles avait fait du tort à l’Allemagne, s’il pensait que l’Allemagne devait être traitée sur un pied d’égalité avec les autres peuples ou s’il souhaitait simplement exprimer son soutien à Hitler et à son gouvernement.
    Hitler voulait une approbation retentissante. Dans toute l’Allemagne, l’appareil du parti nazi avait pris des mesures extraordinaires pour mobiliser les électeurs. Un rapport indiquait que les malades  4  alités seraient transportés sur des brancards dans les bureaux de vote. Victor Klemperer, le philologue juif à Berlin, nota dans son journal la « propagande extravagante »  5  en vue de faire triompher le oui. « Sur chaque véhicule commercial, camionnette postale, vélo de facteur, sur chaque maison et dans chaque vitrine, sur de larges banderoles déployées à travers la rue, des citations de Hitler clament partout et toujours “oui” pour la paix ! C’est la plus monstrueuse des hypocrisies. »
    Les membres du Parti et les SA avaient à l’œil qui votait et qui ne votait pas ; les retardataires recevaient une visite d’une escouade de Sturmtruppen qui soulignaient la pertinence de se rendre immédiatement au bureau de vote. Pour quiconque était

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