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Des rêves plein la tête

Des rêves plein la tête

Titel: Des rêves plein la tête Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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rapporter suffisamment d'argent
à la maison pour faire vivre les siens. Deux bouches de moins
     
    à nourrir durant
deux ou trois mois représentait une économie importante. Qui savait? Peut-être
la situation serait-elle meilleure au début de l'automne ?
     
    Finalement, il
avait été entendu qu'un voisin d'Adrien, de passage à Montréal le lendemain
après-midi, ferait monter les deux jeunes dans sa voiture pour les amener à
Saint-Guillaume.
     
    Le repas des
Brûlé fut frugal. Après avoir mangé des fèves au lard, on se contenta d'un
morceau de pain et d'un peu de mélasse comme dessert. Depuis le début du
souper, Laurette s'interrogeait sur l'identité du jeune homme aperçu chez les
Charpentier quelques minutes plus tôt. La chance lui sourit car sa mère aborda
le sujet.
     
    — Savais-tu que
les Charpentier ont pris un chambreur depuis hier ? demanda-t-elle à son mari.
     
    — Non.
     
    — Angèle
Charpentier m'a dit tout à l'heure que c'est un chômeur de Saint-Hyacinthe. Il
est venu se chercher une job en ville parce qu'il trouvait rien chez eux. Pour
moi, il ferait ben mieux de s'en retourner tout de suite parce qu'il trouvera
rien non plus à Montréal.
     
    — C'est sûr que
le pauvre gars a pas grand chance de trouver quelque chose, renchérit Honoré.
     
    Armand et Bernard
hochèrent la tête en signe d'assentiment. Le premier avait perdu son travail
d'apprenti menuisier six mois auparavant et le second, qui n'avait rien trouvé
de mieux qu'un emploi de garçon à tout faire au marché Saint-Jacques, avait été
renvoyé au début du mois. Depuis, les deux adolescents avaient désespérément
cherché un emploi sans pouvoir en dénicher un.
     
    — Il paraît, en
tout cas, que c'est ce que Médéric Charpentier lui a dit au petit jeune,
poursuivit la mère de famille en commençant à desservir la table. Sa femme m'a
dit que ça avait servi à rien. Le jeune veut chercher pareil.
     
    Après avoir lavé
la vaisselle, Laurette alla se camper devant le petit miroir installé au-dessus
de la table de toilette, dans sa chambre. Elle se mit en devoir de se coiffer
comme si elle s'apprêtait à sortir. Sa mère apparut presque aussitôt à la porte
de la pièce.
     
    — J'espère que tu
penses pas aller traîner dehors à soir, lui fit-elle remarquer.
     
    — Ben, m'man, il
fait beau.
     
    — Il va faire
beau comme ça tout l'été.
     
    — Je pensais
aller donner un coup de main à Suzanne pour finir de préparer le reposoir.
     
    Annette Brûlé ne
fut pas dupe.
     
    — Si Suzanne et
sa mère étaient déjà là cet après-midi, le reposoir doit être fini à l'heure
qu'il est. A soir, c'est ici qu'il y a de l'ouvrage à faire. Arrive! On a des
fleurs à finir.
     
    — Maudit que
c'est plate ! protesta l'adolescente avec humeur. On est toujours poignées pour
travailler du matin au soir.
     
    — Surveille ta
langue, ma fille ! l'avertit sa mère en élevant la voix, sinon je vais finir
par te la laver avec du savon. Apprends donc à te conduire comme une fille et à
contrôler ton petit caractère. Il y aura jamais un garçon qui va s'intéresser à
toi si tu changes pas. Tu vas lui faire peur.
     
    — On pourrait ben
se reposer au moins une heure, suggéra Laurette, comme si elle n'avait rien
entendu.
     
    — Il en est pas
question. Grouille-toi ! Le Juif passe lundi matin et on a une pleine poche de
fleurs à faire.
     
    Annette Brûlé
était de plus en plus excédée par le comportement et le langage «garçonnier» de
sa fille. Elle tourna les talons et alla chercher le matériel nécessaire dans
sa chambre.
     
    Quelques minutes
plus tard, la mère et la fille se retrouvèrent assises à la table de cuisine en
train de
     
    confectionner des
fleurs en tissu destinées à l'ornement des chapeaux féminins. Un manufacturier
juif de l'ouest de la ville leur donnait un cent par fleur. La mère et la fille
avaient hérité de cet emploi de la mère des sœurs Cholette qui les avait
recommandées à son employeur avant de quitter la ville, le mois précédent.
     
    Vers sept heures,
Armand fit bouillir de l'eau sur le poêle et fut le premier à aller se laver «
à la travée » dans les toilettes, comme disait sa mère. Son frère et son père
le suivirent. Un peu plus tard, ce fut au tour de Laurette et de sa mère de
procéder à leurs ablutions.
     
    Vers dix heures,
toute la famille se prépara à se mettre au lit.
     
    — Buvez et mangez
quelque chose avant de vous

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