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Emile Zola

Emile Zola

Titel: Emile Zola Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edmond Lepelletier
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nous séduit toujours, et il est interdit de nier absolument ce qu'on ne s'explique pas. On vous opposerait votre ignorance. Il est difficile de soutenir la négation a priori, sans examen ni discussion. Celui qui nie tout, sans motiver son refus de croire, est aussi vain que celui qui croit tout, sans se donner la peine d'examiner sa croyance et de la justifier.
    Lourdes est donc demeurée, au XIXe et au commencement du XXe siècle, la forteresse de la crédulité et de la superstition. Ce village, dont le renom dépasse celui d'une grande capitale, ne saurait toutefois aspirer à la gloire de Jérusalem, de la Mecque, ou de Rome. Il lui manque le diadème. Ce n'est pas une capitale de la croyance. C'est tout au plus une énorme foire, où l'on vend de la santé, et, par conséquent, tous les larrons du surnaturel et tous les maquignons de la réalité s'entendent pour y duper le simple et confiant acheteur.
    Aucun grand mouvement d'âme n'est sorti de ce bazar. La véritable foi s'accommode mal de trop de proximité, de trop de promiscuité aussi.
    Lourdes est encombrée à l'excès de loqueteux et de personnages minables.
    C'est une cour des miracles. Jamais ce ne sera une station aristocratique.
    Les belles madames n'ont pas l'occasion d'y montrer six toilettes par jour. Un relent nauséabond monte de la piscine, où barbotent des membres peu familiarisés avec le tub. La clientèle y pratique l'hydrothérapie, comme une pénitence. Dans la grotte plébéienne, la mondanité ne daigne pas plus s'agenouiller qu'elle ne va se promener aux Buttes-Chaumont. Le haut clergé tolère Lourdes, mais n'y pontifie pas. Ce n'est pas un lieu de prières sélect. Malgré son titre de basilique, l'église est comme un temple de troisième classe. On n'y sert que le bon Dieu des pauvres.
    Le Bouillon Duval de la chrétienté, ce débit populaire, et cette source mal fréquentée n'est que le Luchon des indigents, aussi le Vatican et Saint-Pierre de Rome n'ont-ils que du dédain pour cette chapelle de léproserie. Cependant le trésorier du denier encaisse, sans répugnance, les gros sous ramassés dans cette cuve immonde, où gigotent tant de mendiants en décomposition.
    Zola, en traitant ce sujet complexe, tout en se montrant l'adversaire du banquisme sacerdotal, n'a pas entendu faire oeuvre d'irréligiosité ou d'anticléricalisme.
    Il s'est proposé surtout d'étudier le mouvement néo-religieux à notre époque ; il a voulu peindre, dans un panorama superbe, tentant sa verve lyrique et sa virtuosité descriptive, la prosternation naïve et touchante, en son irrémédiable confiance, en somme excusable, des malheureux éperdus de souffrances, qui cherchent partout la cure implorée, qui veulent croire parce qu'ils veulent guérir, et qui se plongeraient dans la piscine du diable, s'ils la rencontraient, si on les y conduisait, comme à celle du dieu de Lourdes, et s'ils espéraient en sortir valides et sains.
    Un public énorme, sans cesse renouvelé, compose la clientèle annuelle de Lourdes. Zola a rendu, avec une vérité empoignante, la cohue priante et maladive, bondant les trains, encombrant les gares, s'entassant dans les wagons, où les cantiques couvrent le râle des agonisants. J'ai vérifié par moi-même, au buffet d'Angoulême, halte indiquée dans le volume, la scrupuleuse exactitude de la photographie de Zola ; rien n'y manquait. Tous les personnages étaient à leur place, dans leur attitude vraie, depuis les jeunes clubmen, ambulanciers volontaires, jusqu'à la dame riche, présidant le convoi, et pour qui, lorsque tout le contingent pèlerinard est casé, emballé, bouclé, on sert, dans une petite salle du buffet, un modeste déjeuner, qu'elle avale en hâte ; tandis que le chef de gare poliment l'avertit que le train, dès qu'elle sera prête, se remettra en route.
    Avec la même intensité de vision, Zola s'est penché sur la piscine qui rappelle le cuvier de Béthanie. Il a subodoré et humé, avec un flair connaisseur et patient, les buées nauséabondes qui en montaient. On sait que les pestilences sont par lui respirées de près, et même analysées, -se souvenir du bouquet des fromages du Ventre de Paris,-avec un certain plaisir pervers. On jurerait qu'il a goûté à cette sauce sans nom, où marinent et mijotent les os creusés par la carie, les épidermes que l'ulcère a rodés, les chairs où la sanie, pareille aux limaçons sur les vignes, traîne des baves blanchâtres.
    Une véritable

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