FBI
l’occasion de son centième anniversaire, selon un cahier des charges rigoureux : n’interroger que des agents ou d’anciens agents du FBI. Nous ne voulions que des témoins de première main, qui ne soient ni historiens ni journalistes. Il nous a fallu plus de deux ans pour mener à bien ce projet dont l’importance repose avant tout sur la qualité de ses intervenants et protagonistes. Le FBI a entrouvert ses carnets d’adresses, certains de ses bureaux, certaines de ses écoles, en veillant toutefois à ne pas trop laisser traîner ses affaires devant l’objectif de nos caméras. C’était la moindre des choses. De notre côté nous avons eu du mal à ne pas fouiller dans les affaires du Bureau. C’était aussi la moindre des choses.
Le FBI ne nous a demandé qu’une chose : nous pouvions dire ou écrire ce que nous voulions à condition de ne pas être injustes. Ce ne fut pas difficile. Nos héros nous y ont aidés. Propulsés au centre de l’histoire américaine, leur franchise, leur honnêteté dans le récit d’aventures riches en rebondissements et en surprises empêchent de porter sur eux un regard partial.
La principale organisation d’anciens du FBI (8 000 adhérents) nous a assuré de sa coopération. Mais, là non plus, rien n’était acquis, et le dévoilement fut progressif. Nous avons procédé étape par étape, avec la patience du joueur de cartes qui ramasse une à une ses levées, pour finir par recueillir les témoignages de plusieurs générations : au total, cent agents ou responsables du Bureau. Le plus âgé d’entre eux a commencé sa carrière comme tueur de gangsters dans les années 1930, d’autres ont traqué les nazis, puis les communistes sous les ordres directs de J. Edgar Hoover et de son âme damnée, Clyde Tolson.
Nous avons interrogé les « profileurs » qui chassent le tueur en série, aussi bien que les agents qui infiltrent la Mafia ou ceux qui traquent les réseaux d’Al Qaida à travers la planète. Les agents que nous avons rencontrés sont tous polyvalents, ils ont travaillé dans tous les États-Unis, quand ce n’est pas dans le monde entier et sur toutes sortes d’affaires. La diversité de leurs expériences nous a permis de les retrouver aux multiples carrefours de notre récit. Ils racontent le FBI d’hier et celui d’aujourd’hui.
C’est avec une pointe d’appréhension que nous sommes allés interroger des agents rompus à l’art de l’interrogatoire. Nous avons été surpris par la chaleur de leur accueil. Nous nous attendions à des explications complaisantes, voire lénifiantes. Nous nous trompions : la complaisance n’est pas leur fort, et leur liberté de ton est remarquable. Les critiques les plus virulentes à l’encontre du FBI émanent de ses propres serviteurs, et le Bureau met à la disposition des chercheurs et du public suffisamment de documents embarrassants à maints égards pour ne pas avoir à en rajouter.
Au début était l’information. Depuis 1917, J. Edgar Hoover accumule les dossiers. Il fiche systématiquement toute personne importante ou qui pourrait le devenir, d’Eleanore Roosevelt à Albert Einstein en passant par Ernest Hemingway ou Marilyn Monroe. À partir des années 1930, J. Edgar Hoover assoit sa puissance grâce à ses dossiers. Il transforme le FBI en une gigantesque banque de données, accumulant les renseignements « personnels et confidentiels ». Mais son gibier de prédilection reste les hommes politiques. Il détenait en tout plus d’un demi-million de dossiers. Pour être sûr que ces dossiers ne tombent pas entre les mains du gouvernement ou du Congrès, il se servait d’un système d’indexation complexe et gardait dans son bureau les pièces les plus sensibles. À sa mort, ces dossiers-là ont été détruits par sa secrétaire personnelle. Mais son ami Clyde Tolson a gardé copie des plus « confidentiels ». Nous en avons récupéré certains, rendus publics dans le cadre du Freedom of Information Act. Nos recherches dans les archives du FBI récemment déclassifiées révèlent à cet égard nombre d’informations jusque-là inconnues.
Chaque année, le FBI rend publics des milliers de documents internes. Ils sont censurés quand ils contiennent des informations classées confidentielles, des données ayant trait aux méthodes employées par les agents, ou encore des renseignements d’ordre privés. Certains documents sont fortement caviardés, d’autres le
Weitere Kostenlose Bücher