FBI
« perles » inédites réalisés parfois dans le feu de l’action. Notre récit s’appuie également sur des documents provenant des collections privées des agents, des tribunaux, des fonds du FBI, de ceux d’anciens agents déposés auprès des bibliothèques des universités des différents États, ou aux Archives nationales. Notre épopée du Bureau est construite en quatre temps :
1. La Création du mythe
Nous avons commencé par visiter le plus gradé des anciens, Cartha DeLoach, ex-numéro deux du Bureau de J. Edgar Hoover. Entré au FBI dans les années 1940, il a tout connu ou presque, de la traque des espions nazis à la chasse aux sorcières communistes, sans oublier les guerres secrètes contre le Ku Klux Klan. Homme de confiance du président Johnson, il est le tout dernier détenteur des secrets des années 1960. Il était aux côtés de J. Edgar Hoover quand le FBI a enquêté sur les liaisons dangereuses du clan Kennedy avec la Mafia. Il était l’œil de Washington à Hollywood et celui du Bureau au Congrès et au Sénat. En deux longues séances, il nous a livré tous les secrets qu’il pouvait divulguer. Parfois, nous le sentions hésitant : jusqu’où aller trop loin ? Mais, à la fin de nos entretiens, épuisé, il s’arrêtait au seuil de confidences impossibles.
Des studios de Hollywood aux radios locales, sans oublier la presse, J. Edgar Hoover a patiemment bâti, en cinquante ans, le mythe d’un Bureau omnipotent et omniprésent. Il en a déposé la marque pour mieux en contrôler l’image. Nimbé d’une aura d’invulnérabilité, il a traité d’égal à égal avec les présidents des États-Unis et les hommes politiques qu’il a fait et défait.
Au FBI, tout est en effet affaire d’image. Depuis les lithographies, photos et bandes dessinées du début du siècle dernier, jusqu’aux films, aux séries télévisées et aux journaux, un flot incessant d’images à la gloire du FBI a déferlé depuis cent ans.
Après avoir construit ce mythe d’un FBI invincible en manipulant les médias et Hollywood, J. Edgar Hoover est devenu indéboulonnable. Les Présidents passent, Hoover demeure. Il a connu onze Présidents et dix-huit Procureurs généraux ! « On ne licencie pas Dieu », disait le président Kennedy en évoquant l’impossible départ du directeur du FBI.
La première partie de cet ouvrage démonte le mécanisme pervers et ambigu qui lie le Bureau à la Maison-Blanche : on y verra le FBI servir de bras armé au retors Lyndon Johnson, mais aussi les orphelins de Hoover orchestrer la chute du président Nixon. Une histoire chaotique, jalonnée de morts violentes.
Intrigues, manipulations, agents que l’on pousse au suicide, assassinats : derrière la façade d’un FBI tout-puissant, au-delà des images lisses de l’entraînement des agents à l’école de Quantico, c’est une toute autre réalité qui se dessine. Elle est plus âpre, plus violente. Le FBI assiste aux premières loges aux trois grands assassinats politiques des années 1960 aux États-Unis : ceux des deux frères John et Bobby Kennedy, et celui de Martin Luther King. Il brouille les pistes, fourvoie les enquêteurs, prospère à l’ombre du président Johnson. Les années 1960 marquent l’âge d’or de l’histoire du FBI. Jamais le Bureau n’a été aussi puissant. Il traque les opposants à la guerre du Vietnam aussi bien que les militants des droits civils, sans oublier les activistes des Blacks Panthers ou ceux du mouvement estudiantin (SDS). Une nouvelle fois le Bureau nage en pleine ambiguïté : faut-il, au nom de la défense des valeurs essentielles, mettre à mal les libertés individuelles garanties par la Constitution ?
Les bornes sont dépassées avec l’opération la plus secrète du Bureau : « Cointelpro » (Counter Intelligence Program), lancée en 1956 pour neutraliser par tous les moyens les mouvements politiques d’opposition. Au nom de la défense de la démocratie, le Bureau franchit les limites imposées par le législateur, sans se demander si la prévention du désordre ne risque pas de conduire à l’asphyxie d’une société par le découragement, l’emprisonnement, voire la disparition de certaines de ses forces vives.
Notre enquête révèle que les premières critiques (et les plus virulentes) contre « Cointelpro » sont venues de l’intérieur même du Bureau. Un haut responsable, Neil Welch, a refusé que ses agents
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