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Fiora et le Pape

Fiora et le Pape

Titel: Fiora et le Pape Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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étouffer le souvenir de son amour pour Philippe... pour
Philippe à jamais perdu en dépit des vaticinations fumeuses de Démétrios. Et
sans même s’en rendre compte, Fiora laissa couler d’abondantes larmes contre l’épaule
de son amant endormi.
    Quand
il s’éveilla, elle n’avait pas réussi à s’assoupir un seul instant. Plusieurs
idées s’étaient mises à tourner dans sa tête. Et tandis que Lorenzo se
rhabillait dans la fraîcheur d’un petit matin chargé de pluie, elle lui fit
part de son désir d’aller prier sur la tombe de son père, dans l’église corporative
d’Or San Michele.
    – C’est
impossible pour le moment, mon amour. Je ne veux pas que tu descendes en ville
tant que le peuple ne sera pas calmé. Le spectacle est abominable. L’odeur
aussi, et je ne voudrais pas être à la place de Sandro Botticelli...
    – Pourquoi
donc ?
    – La
Seigneurie lui a commandé de peindre, sur ses murs, l’image des corps
suppliciés que l’on a pendus au balcon. Le malheureux passe des heures, mal
abrité par une bâche, à faire des croquis.
    – Pauvre
Sandro ! Lui qui n’aime que la beauté... Eh bien, je me contenterai de me
promener autour de la maison. Mais, au fait, peux-tu me dire ce qu’est devenue
notre métairie ?
    – Celle
que vous possédiez près de Montughi ? Je crois qu’elle est toujours à toi,
personne ne veut s’y installer et le domaine est à l’abandon.
    – Pour
quelle raison ?
    – La
mort de Marino Betti, l’assassin de ton père, a fait fuir tout le monde. Nos
paysans sont superstitieux, tu sais, et ils ont une peur affreuse des fantômes.
Il faudra tout de même que nous essayions d’en faire quelque chose. Peut-être
qu’en brûlant l’arbre où il a été pendu et en rasant la maison qu’il habitait ?
    – Nous
en parlerons plus tard. Rien ne presse, en effet...
    – Nous
avons beaucoup de temps devant nous, fit-il tendrement en se penchant sur sa
bouche.
    Comme
il allait sortir, elle le rappela :
    – Il
vaudrait mieux que tu ne viennes pas ce soir, dit-elle.
    – Pourquoi ?
fit-il l’œil tout de suite assombri. Tu es déjà lasse de moi ?
    – Comment
peux-tu dire de telles sottises ? Non, Lorenzo mio, je ne suis pas lasse
de toi mais il y a, dans la vie d’une femme, des nuits qu’elle doit passer
seule. Tu as compris ?
    Il se
mit à rire et la prit dans ses bras pour couvrir son visage et son cou de
baisers.
    – Soit,
créature impure ! Au moins tu pourras dormir ! Et ma mère aussi. A
cause de ce qui s’est passé, elle s’inquiète de mes sorties nocturnes. Mais ne
crois pas que tu pourras me tenir longtemps à distance !
    Une
heure après son départ, Fiora entra chez Démétrios pour lui faire part de l’idée
qui lui était venue. Il l’écouta sans mot dire et quand elle eut fini, il
demanda :
    – Sais-tu
quel jour nous sommes ?
    – Le
28 d’avril je crois... oh mon Dieu ! C’est la même date ?
    – Oui.
Il y a trois ans, jour pour jour, que nous sommes allés là-bas pour punir un
assassin. Tu crois que Hieronyma pourrait se cacher dans la vieille ferme ?
    – Bien
sûr ! C’est une excellence cachette pour elle que la maison de son
complice. Et surtout une maison défendue par la terreur. Ce démon n’a jamais eu
peur de rien et encore moins des fantômes.
    – Il
se peut que tu aies raison, Fiora ! ... Oui, je le pense. En tout cas,
cela ne nous coûtera guère d’y aller voir.
     
    Si le
jour était le même, la nuit était bien différente. Plus d’étoiles au ciel, plus
de frais parfum de la terre en son printemps ! Un ciel noir qui déversait
des trombes d’eau, des chemins détrempés, ravinés, dangereux pour qui ne les
connaissait pas. Mais Fiora eût reconnu sa route les yeux fermés et sous un
tremblement de terre, tant elle lui était familière. Au pas sûr de sa mule,
elle chevauchait botte à botte avec Démétrios, courbant le dos sous l’averse
dont la protégeait une grande mante noire à capuche, mais elle ne sentait pas
la pluie et elle eût aussi bien traversé les flammes pour atteindre son but tant
était grande sa certitude que ce chemin la menait enfin à sa vengeance.
    Derrière
elle venaient Esteban et Rocco, armés jusqu’aux dents. L’ancien bandit de grand
chemin avait tenu à participer à l’expédition quand il avait su de quoi il
était question :
    – Je
te dois bien ça, dit-il à Fiora. Grâce à toi, je vais redevenir un vrai soldat
et

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