Fiora et le roi de France
vivre
en paix. Je suis infiniment lasse...
– On
le serait à moins ! De toute façon, vous conserverez la Rabaudière qui
vous est donnée à titre définitif pour vous-même et vos descendants. Mais...
voyons un peu ce qui nous arrive là !
Ce qui
arrivait, c’était la princesse Jeanne qui, à la fin du combat, avait quitté la
tribune après que son père lui eut parlé à l’oreille. Par la main, elle tenait
le petit Philippe, et Léonarde venait derrière elle.
Comme
tout le monde, Philippe avait tourné la tête dans la direction où regardait le
roi. Le groupe, assez charmant, formé par l’enfant et la petite princesse
boiteuse qu’il semblait soutenir, le figea. Jeanne, alors, s’arrêta :
– Voulez-vous
aller embrasser messire votre père ? dit-elle doucement.
Le
bambin, regardant avec émerveillement ce grand chevalier en armure tellement
semblable à l’image qu’il s’en faisait, n’hésita pas un instant. Tendant ses
petits bras, il courut vers lui cependant que Philippe s’agenouillait pour le
recevoir, sans le serrer trop fort car le contact de l’acier n’avait rien d’agréable.
Mais il l’embrassa avec une ferveur qui fit sourire Louis XI. Celui-ci se garda
de souligner les deux larmes qui glissaient sur les joues de l’intraitable
seigneur de Selongey.
– Je
crois, soupira-t-il, que la cause est entendue ! Se levant péniblement de
son trône, il descendit les trois marches qui joignaient la tribune au sable de
la cour.
– Nous
ne vous demanderons pas de nous prêter serment d’allégeance, dit-il sévèrement
à Philippe. Mais nous exigeons de vous promesse formelle de ne plus chercher à
nous nuire et, le temps venu, de ne pas apprendre à vos fils à détester la
France, mais au contraire de leur permettre de la servir. N’oubliez pas que
Selongey est en Bourgogne et que la Bourgogne a fait retour à notre couronne
comme le veut la loi féodale au cas où un prince valois mourrait sans héritier
mâle.
Philippe,
qui s’était relevé, posa son fils à terre et l’enfant en profita pour courir
vers sa mère. Il considéra un instant ce petit homme étrange qu’il dépassait de
la tête, ce petit homme qui avait si peu l’air d’un roi... sauf à certains
moments comme celui-là où il irradiait une incroyable majesté. Philippe,
lentement, mit un genou en terre et tendit le bras :
– Sur
mon honneur et le nom que je porte, Sire, j’en fais serment. Jamais plus ceux
de Selongey ne porteront les armes contre le roi de France.
– Nous
vous en remercions ! Eh bien, donna Fiora, vous voilà en famille. C’est à
vous que nous confions ce rebelle ! C’est vous qui en serez la gardienne
et nous ne doutons pas...
– Non,
Sire, par pitié ! Je ne veux pas de cette responsabilité...
– Vous
en ferez ce que vous voulez ! Nous vous donnons le bonsoir. Eh bien, ma
fille, ajouta-t-il en se tournant vers la duchesse d’Orléans, êtes-vous
contente de nous ?
– Oui,
Sire ! En vérité, je n’ai jamais douté de votre justice. Mais pourquoi
avoir infligé à donna Fiora cette longue pénitence, cette angoisse aussi de
craindre pour sa vie ? Aviez-vous vraiment besoin d’en appeler à Dieu ?
Tout
en parlant, elle et Louis XI s’éloignaient vers le logis royal. Le roi sourit
et, baissant la voix, se pencha pour être mieux entendu :
– Bien
sûr que non ! J’ai vite compris que cette malheureuse était victime d’une
conspiration, mais il fallait que tous la crussent en danger de mort pour
obtenir de son entêté de mari qu’il sorte de sa tanière...
– Mais
elle ? Pourquoi ne pas l’avoir avertie ?
– Parce
que, tout de même, elle a commis assez de sottises pour mériter une petite
leçon. Et je vous défends bien de lui dire quoi que ce soit. Je n’aime pas
beaucoup expliquer les méandres de mes pensées ! A présent, ma fille, allons
nous mettre à table ! En vérité, tout ceci m’a donné grand appétit !
Fiora,
avec Philippe, son fils et Léonarde, revenaient à cheval vers la maison aux
pervenches, mais les deux époux n’avaient pas encore échangé une seule parole.
Selongey
tenait son fils devant lui sur sa selle et ne se lassait pas de le contempler.
Néanmoins, Fiora se sentait triste car son époux n’avait pas eu le moindre élan
vers elle. Lui et le petit semblaient s’enfermer dans un monde à eux, un monde
où il n’y avait guère de place pour elle...
Aussi,
quand on atteignit la
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