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Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Titel: Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sara Poole
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Rovere avait davantage d’alliés et d’argent (à ce que l’on disait), et donc considérablement plus de chances d’y arriver. Toutefois, il faudrait être bien téméraire pour faire fi du pouvoir de la famille Sforza. Et enfin, il y avait Borgia… le taureau… un homme qui avait dû ravaler sa fierté après la défaite, et s’était juré de ne plus jamais revivre une telle humiliation.
    — Dans les tavernes, la cote est à cinq contre trois pour della Rovere, poursuivit Vittoro. En marge, on parie également beaucoup sur le fait que della Rovere ne reculera devant rien pour gagner, quitte à être obligé de donner son soutien à une autre marionnette qu’il pourra contrôler, comme Innocent.
    Cette information n’était pas à prendre à la légère, car si les commérages sont le passe-temps préféré des Romains, les jeux d’argent ne sont pas en reste. De grandes quantités de florins allaient changer de main dans les jours à venir, jusqu’à l’élection du pape.
    — Et qu’en est-il de Borgia ? demandai-je. Où se situe-t-il dans le classement ?
    — En troisième, voire quatrième position, mais dans les milieux bien informés on commence à s’intéresser à lui, la rumeur du jour étant qu’il remuera ciel et terre pour gagner la papauté, cette fois-ci.
    — Je me demande bien qui fait courir ce bruit ?
    Vittoro repartit d’un large sourire.
    — Hé oui, c’est Borgia. Il veut faire comprendre aux cardinaux qu’il est prêt à négocier.
    — Tout en se déclarant trop humble pour être candidat.
    — C’est ça. Mais passons. Le Cardinal m’a demandé de te ramener avec moi. Il veut te parler.
    — Tu ne loges plus ici ?
    — Jusqu’au retour de Son Éminence, non. La prudence me dicte de prendre mes quartiers là où il est.
    Nous nous regardâmes dans les yeux, signe d’une entente tacite. Morozzi était en fuite, et qui sait s’il n’allait pas s’allier à della Rovere, vu la tournure des événements ? Assurément, la garde d’Il Cardinale ne saurait être trop rapprochée.
    — Que sait-il de ce qu’il s’est passé ? demandai-je tandis que nous quittions le palazzo.
    Vittoro montait un cheval gris, son préféré. Quant à moi, j’avais hérité d’une jument alezane d’un naturel doux, de celles que l’on garde à disposition pour les cavalières telles que moi qui, il faut bien l’admettre, manquent sérieusement de talents équestres. Ce n’est pas que je n’aime pas monter ; simplement, je ne vois pas de raison de le faire très souvent. Pourquoi Dieu nous aurait-il donné des pieds, sinon pour nous en servir ?
    Le ciel était couvert, et pas un souffle d’air ne venait disperser le voile de fumée qui plane tout le temps au-dessus de la ville, même en été, à cause des feux de cuisine, fours et autres brasiers. Les rues étaient anormalement calmes, en grande partie à cause des escadrons de soldats dépêchés pour patrouiller en ville. La plupart des gens n’ayant pas oublié ce qu’il s’était passé la dernière fois, ils étaient naturellement enclins à rester chez eux ou dans leurs échoppes et à se tenir tranquilles, en attendant de voir si Rome allait de nouveau céder à la violence.
    — Je n’ai eu qu’une brève conversation avec lui, répondit Vittoro, car le temps manquait. Della Rovere et lui étaient au chevet du mourant. Ils ont bien failli se bagarrer, au moment même où Innocent était en train de rendre son dernier souffle.
    Je ne visualisais que trop bien la scène : deux cardinaux, ennemis jurés, chacun déterminé à ravir le pouvoir suprême à l’autre. Distraitement, je me demandai si quelqu’un avait songé à donner l’extrême-onction à Innocent. Non que je croie qu’un peu d’huile sainte et quelques prières dites pour lui épargneraient le pape lorsqu’il serait appelé à répondre de ses actes terrestres, mais j’étais tout de même curieuse d’en savoir un peu plus. Avec hésitation, je m’enquis :
    — As-tu une quelconque idée de son état, à la toute fin ?
    — Tu veux dire, qu’est-ce qui l’a tué ?
    Dit comme cela, aussi abruptement, je n’eus d’autre choix que de hocher la tête.
    — Je me demandais.
    Vittoro me décocha un regard contrarié.
    — N’y pense plus, Francesca. Tu as fait ce qu’il fallait faire.
    — Alors, c’est bien le sang ?
    Moi aussi j’aurais à répondre de mes actes, un jour. J’arriverais à justifier d’avoir tué un homme sur le

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