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Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Titel: Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sara Poole
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rien ne vivait que l’on puisse qualifier d’humain. Un monde dans lequel la fumée crachée des entrailles de la terre venait assombrir le ciel. Où les loups hurlaient à la mort.
    Horrifiée, je reculai et poussai un cri. À cet instant seulement, je vis le mince rayon de lumière qui me permettrait d’en réchapper. Je le vis et m’en saisis.
    Seigneur, je vous en conjure, si mon âme est le prix à payer, je vous la donne volontiers…
    — Signorina !
    Un grand bruit résonna alors dans ma tête. Un énorme carillon, à même d’empêcher toute pensée, d’effacer toute crainte, de remplir chaque souffle, de s’étendre au point d’englober tout ce qui avait été ou qui serait. Un bruit comme je n’en avais jamais entendu avant, ni depuis.
    Encore et encore et encore… Les cloches de chacune des centaines d’églises de Rome se joignant les unes aux autres jusqu’à ce que l’air lui-même vacille devant leur puissance. J’entendis des bruits de pas s’approcher, suffisamment pour faire trembler la terre, puis des voix venues de l’intérieur du palazzo, de dehors dans la rue, de chaque quartier de Rome, et du vaste monde au-delà.
    Tant de voix, qui criaient comme un seul homme : Il Papa è morto ! Il Papa è morto !
    Le pape est mort.
    Était-ce la réponse à mes prières ? Peut-être mais également, assurément, la question avec laquelle je vis depuis dans le silence coupable de mon âme : par la main de qui ?

21
    B orgia ne revint finalement au palazzo qu’au bout de trois jours après la mort d’Innocent. En tant que vice-chancelier de la curie, le Cardinal se devait de rester au Vatican pour coordonner les préparatifs des obsèques papales.
    Pendant ce temps-là, toutes sortes de folles rumeurs se répandirent dans Rome. Le pape aurait été assassiné. Sa vie dissolue serait en cause. Une gitane lui aurait jeté un sort. On aurait retrouvé une ancienne prédiction à l’intérieur de la tombe de l’un des César. Ou alors…
    N’étant pas absolument certaine de ma culpabilité, je ne savais pas bien quoi ressentir si ce n’était du soulagement. Innocent était mort ; que ce soit par ma main ou non, cela n’importait à personne d’autre que moi. L’édit n’avait pas été signé, de cela j’en avais la certitude grâce un message gribouillé à la va-vite que David m’avait fait envoyer du ghetto. L’immense richesse que les juifs avaient amassée de partout en Europe était en ce moment même en train d’affluer sur les comptes de Borgia à la banque Spannocchi de Sienne, où César se trouvait déjà afin de surveiller l’opération – officieusement cependant, car il était soi-disant venu préparer ses chevaux à la course du Palio qui avait lieu chaque été dans la ville.
    Tout allait donc très bien, si ce n’était l’ombre qui planait au-dessus de moi et de la maison des Borgia. L’homme que je savais à présent être le véritable artisan du meurtre de mon père courait toujours, et se trouvait même en toute probabilité encore au Vatican. Je n’osais imaginer combien Morozzi devait enrager de voir son plan contrecarré par la mort d’Innocent. S’il avait le moindre soupçon que celle-ci ne soit pas naturelle, sa fureur serait décuplée. Il était impossible de deviner ce qu’il allait faire maintenant, et il était en possession du losange. Je ne risquais pas de l’oublier. Peu importait qu’il ait accès à d’autres poisons ou non, il avait à portée de main le plus mortel d’entre eux, créé par moi-même, qui lui donnerait la possibilité d’en finir avec moi si nécessaire.
    Il pourrait aussi fort bien lui permettre d’en finir avec Borgia – de telle manière à m’impliquer directement. Il en allait de ma responsabilité professionnelle de protéger Il Cardinale, et ne vous y trompez pas, je prenais cela très au sérieux. Car j’avais tout autant à cœur de me protéger, moi. Mais, toutes ces considérations n’étaient rien en comparaison de ma détermination à tenir la promesse que j’avais faite de venger mon père et de priver Morozzi de la victoire. Avant de le tuer. Seule la façon dont j’allais bien pouvoir procéder m’échappait encore pour le moment.
    Tiraillée comme je l’étais par ces sombres pensées, je partis en quête de Vittoro. Il était occupé à donner des ordres à ses lieutenants concernant la défense du palazzo, mais s’interrompit en me voyant.
    — Francesca, s’exclama-t-il

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