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Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Titel: Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sara Poole
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dans un sourire, tout va bien ?
    — Plutôt, oui, et de ton côté ?
    — Ça n’a jamais été mieux. Aucune séquelle, j’espère ?
    L’ayant assuré que mon plongeon dans les douves du castel avait a priori été sans conséquence, j’observai autour de moi ce qui ressemblait fort à des préparatifs. Les soldats étaient partout, du hall d’entrée aux tours de guet. Les visages ne m’étaient pas tous familiers : visiblement, Vittoro faisait venir des renforts des autres propriétés du Cardinal. J’étais déconcertée.
    — Nous ne partons pas ? demandai-je.
    Lors du dernier conclave, après la mort de Sixte iv, Borgia avait fait envoyer toute sa maison à la campagne, ainsi que (et ce n’était pas un hasard) ses biens les plus précieux – chaque tapisserie, tableau, meuble, coffre au trésor, chaque assiette et chaque coupe que l’on avait pu empaqueter avait été transporté hors de Rome. C’était une sage précaution pour un homme considéré par tous sans exception comme étant papabile , un candidat sérieux à la papauté. En effet, l’une des coutumes les plus curieuses des Romains, dès l’annonce de l’élection de leur nouveau pape, est de se ruer sur sa résidence et de la piller. Ce n’est pas une marque d’irrespect, ni même illégal, comme on pourrait le penser au premier abord ; cela résulte bien plutôt d’un raisonnement logique de la populace, qui estime qu’une fois élevé au trône de Saint-Pierre, un homme n’a plus besoin de ses biens terrestres.
    Les choses étant ce qu’elles sont, les papabili ont donc pour habitude de vider leurs résidences avant le début de chaque conclave. Il suffit d’observer les charretées de biens emportés bruyamment hors de la cité pour savoir si le cardinal concerné pense avoir de bonnes chances d’être élu. Je dirais même plus, le fait de vider une maison fait quasiment office d’annonce de candidature à la charge suprême.
    Par conséquent, qu’était-on censé conclure du fait que Borgia avait décidé de ne pas mettre ses biens en sécurité ?
    — Il fait profil bas, m’expliqua Vittoro. Et raconte à qui veut l’entendre que par pudeur il ne saurait se considérer comme candidat pour la papauté.
    Je faillis m’étrangler en entendant cela. Borgia s’était donné beaucoup de mal, depuis près de quarante ans qu’il était devenu cardinal, pour que l’on parle de lui comme d’un futur pape.
    — C’est ridicule.
    Vittoro m’adressa un large sourire.
    — Bien sûr que ça l’est, mais dans le bon sens du terme. En agissant ainsi il sème la confusion, et dans des situations comme celle-ci, c’est toujours utile.
    — Et quelle est la situation ?
    J’avais bien mon idée, mais je voulais des détails.
    — Comme on s’y attendait. Il y a deux factions : della Rovere d’un côté, Sforza de l’autre.
    Il venait de nommer deux des plus puissants cardinaux de la chrétienté. Giuliano della Rovere était le neveu de Sixte iv. L’homme avait un tempérament explosif, pire encore que Borgia ; il avait personnellement mené les troupes à la bataille, et se faisait un plaisir d’écraser quiconque fomentait une rébellion contre l’Église. Doté d’une confiance en ses capacités et d’une ambition qui confinaient à la fanfaronnade, il croyait, à ce qu’il paraissait, que sa destinée était non seulement de devenir pape mais également de guider l’Église vers une gloire plus grande qu’elle n’en avait jamais connu.
    Borgia et lui s’étaient âprement disputé la papauté à la suite du décès de Sixte. Lorsque della Rovere avait pris conscience qu’il allait manquer de soutiens, il avait changé de tactique et offert son appui au cardinal aux mœurs les plus dépravées de Rome, Giovanni Cibo, pour nulle autre raison que de priver Borgia du trône papal. C’était un affront que ce dernier n’avait ni oublié, ni pardonné. Cette fois-ci, della Rovere s’était assuré le concours de la couronne française, des Vénitiens et des puissantes familles Colonna et Savelli, en lien avec le royaume de Naples. De là à penser que nul ne pouvait l’arrêter…
    Quant à Ascanio Sforza, c’était le frère de Ludovico Sforza, le redoutable duc de Milan. Sa faction jouissait du soutien des familles Orsini et Conti, ainsi que d’une foule de cardinaux opposés par principe à toute interférence venue de France ou de Naples.
    À première vue, la lutte était inégale. Della

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