Guerre Des Gaules
l'île que l'été précédent il avait reconnu pour très
favorable à un débarquement. En cette occasion nos soldats furent
au-dessus de tout éloge avec des navires de transport, et
lourdement chargés, ils purent, en ramant sans relâche, aller aussi
vite que les vaisseaux longs. On atteignit la Bretagne, avec toute
la flotte, vers midi, sans voir l'ennemi sur ce point ; comme
César le sut plus tard par des prisonniers, des groupes nombreux
s'y étaient assemblés et, effrayés à la vue de tant de vaisseaux –
avec ceux de l'année précédente, et ceux que des particuliers
avaient construits pour leur usage, c'était plus de huit cents
navires qui avaient paru à la fois, – ils avaient quitté le rivage
pour aller se cacher sur les hauteurs.
9. César fit débarquer ses troupes et choisit
un emplacement convenable pour son camp ; lorsqu'il sut par
des prisonniers où s'était arrêté l'ennemi, laissant près de la mer
dix cohortes et trois cents cavaliers pour la garde des navires,
avant la fin de la troisième veille, il marcha à l'ennemi ; il
craignait d'autant moins pour sa flotte qu'il la laissait à l'ancre
sur une plage douce et tout unie ; il donna le commandement du
détachement et de la flotte à Quintus Atrius. Pour lui, une marche
de nuit d'environ douze milles l'amena en vue de l'ennemi. Celui-ci
s'avança vers le fleuve avec sa cavalerie et ses chars et, d'une
position dominante, essaya de nous interdire le passage et engagea
la bataille. Repoussés par nos cavaliers, les Barbares se cachèrent
dans les bois : ils trouvaient là une position remarquablement
fortifiée par la nature et par l'art, qu'ils avaient aménagée
antérieurement, sans doute pour quelque guerre entre eux : car
on avait abattu un grand nombre d'arbres, et on s'en était servi
pour obstruer tous les accès. Disséminés en tirailleurs, ils
lançaient des traits de l'intérieur de la forêt et nous
interdisaient l'entrée de leur forteresse. Mais les soldats de la
septième légion, ayant formé la tortue et poussé une terrasse
d'approche jusqu'au retranchement ennemi, prirent pied dans la
place et les chassèrent de la forêt sans éprouver de pertes
sensibles. César défendit qu'on les poursuivît plus loin, parce
qu'il ne connaissait pas le pays et parce que, la journée étant
déjà fort avancée, il voulait en consacrer la fin à la
fortification du camp.
10. Le lendemain matin, il envoya fantassins
et cavaliers en trois corps, à la poursuite de l'ennemi en fuite.
Ils avaient fait un assez long chemin, et déjà on apercevait les
derniers fuyards, quand des cavaliers envoyés par Quintus Atrius
vinrent annoncer à César que, la nuit précédente, une très violente
tempête s'était élevée, et que presque tous les vaisseaux avaient
été désemparés et jetés à la côte, câbles et ancres ayant cédé et
les matelots et les pilotes n'ayant pu soutenir la violence de
l'ouragan les navires, heurtés les uns contre les autres, avaient
beaucoup souffert.
11. A cette nouvelle, César ordonne qu'on
rappelle légionnaires et cavaliers, qu'ils s'arrêtent et fassent
demi-tour ; lui-même retourne aux navires ; ce que
messagers et lettre lui avaient appris se confirme, en somme, à ses
yeux : quarante navires étaient perdus, mais les autres
paraissaient pouvoir être réparés, au prix d'un grand travail. Il
choisit des ouvriers dans les légions et en fait venir d'autres du
continent ; il écrit à Labiénus d'avoir à construire, avec les
légions dont il dispose, le plus de navires possible. De son côté,
bien que ce fût un grand travail, et qui dût coûter beaucoup de
peine, il prit le parti, qui lui parut le meilleur, de tirer à sec
toute la flotte et de l'enfermer avec le camp dans une
fortification commune. Cette opération demanda environ dix jours
d'un labeur que la nuit même n'interrompait pas. Une fois les
navires mis à sec et le camp parfaitement fortifié, laissant pour
garder la flotte les mêmes troupes que précédemment, il retourne à
l'endroit qu'il avait quitté. Il y trouva des forces bretonnes déjà
nombreuses qui s'étaient rassemblées là de toutes parts, sous les
ordres de Cassivellaunos à qui, d'un commun accord, on avait confié
tous pouvoirs pour la conduite de la guerre c'est un prince dont le
territoire est séparé des États maritimes par un fleuve qu'on nomme
la Tamise, à environ quatre-vingt milles de la mer. Il n'avait
cessé jusque-là d'être en guerre
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