Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Haute-savane

Haute-savane

Titel: Haute-savane Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
Vom Netzwerk:
laissa Pongo l’examiner.
    — Regarde si tu vois quelque chose qui a pu lui faire prendre le mors aux dents : une trace d’éperon peut-être ? fit-il accroché encore à l’idée de la culpabilité de sa femme.
    L’examen de Pongo fut rapide. Au bout de quelques minutes, il rejoignait Gilles à l’ombre d’un grand pin.
    — Alors ?
    — Pas d’éperon, rien… mais curieuse blessure à une oreille. Ressemble à blessure faite par balle.
    — Par balle ? Mais je l’ai vue s’emballer et je n’ai pas entendu le moindre coup de feu…
    L’Indien réfléchit un instant puis :
    — Tu peux dire où était cheval quand lui s’emballer ?
    — Oui… Juste devant le bouquet de lataniers qui marque la fin du jardin de Pierre…
    Pongo fit signe qu’il voyait.
    — Nous rentrer, dit-il seulement.
    Madalen n’était pas gravement blessée, ainsi que l’expliqua un peu plus tard à Gilles un Finnegan froidement réticent. Bousculé par la jument emballée, son âne l’avait envoyée rouler contre le tronc rugueux d’un cocotier où elle s’était à moitié assommée. Elle avait eu très peur, bien sûr, mais après un ou deux jours de repos il n’y paraîtrait plus sauf sur son front qui garderait peut-être une légère cicatrice.
    — Et Judith ? demanda Gilles.
    Finnegan lui jeta un regard noir.
    — Heureux que tu y songes ! Son épaule n’a rien ou peu de chose, mais elle a une côte cassée… et je ne vois pas comment elle aurait pu faire cela volontairement, ajouta-t-il allant au-devant des réflexions de Tournemine. En outre sa jument est morte et elle en souffre davantage que de ses blessures.
    — Je ne comprends pas. Je ne comprends plus…
    — Pourquoi ? Parce que ce qu’on te dit ne cadre pas avec ce que tu appelles le témoignage de tes yeux… ou ce que tu imagines ? Je te dis moi que Judith n’est pour rien dans cet accident qui a bien failli lui coûter la vie à elle plus encore qu’à Madalen.
    — Tu as sans doute raison mais Judith est capable de tant de choses ! Tu ignores tout, ou presque tout, de ce qu’a été notre vie depuis que nous nous connaissons. C’est une femme étrange, violente et secrète, d’un équilibre fragile…
    — Qui ne le serait après avoir été enterrée vivante ? riposta le médecin qui savait au moins ce terrible épisode de la vie de la jeune femme. Et tu ne la ménages guère…
    — Je ne crois pas qu’elle s’en soucie. Et puis, si elle n’a rien tenté aujourd’hui, il reste la mort de Rozenn.
    — Tu y as fait allusion tout à l’heure. Qu’est-ce que cette histoire ?
    En quelques mots, Gilles retraça pour Finnegan ce qui s’était passé à l’aube d’un jour de printemps sur les bords de la Harlem River et comment les preuves accusant Judith s’étaient peu à peu déposées dans son esprit. Finnegan l’écouta sans rien dire mais quand il eut tout dit il regarda son ami avec une sorte de commisération qui mit celui-ci mal à l’aise.
    — Une fronde ? dit-il. Et tu as sérieusement imaginé Judith se servant d’une fronde ?
    — Pourquoi pas ? Elle a été élevée comme une sauvageonne, avec des garçons qui, eux, étaient de vrais sauvages. Presque tous les gamins qui courent les grèves ou les landes bretonnes, normandes ou picardes ou quoi que ce soit d’autre, savent se servir d’une fronde…
    — Et pourquoi pas les gamines, en effet ? Et pourquoi pas la fille d’un pauvre paysan d’Aubervilliers qui aurait appris à chasser les oiseaux, aussi bien pour protéger la maigre récolte paternelle que pour ajouter à la marmite familiale ?
    — Que veux-tu dire ?
    — Qu’un matin, il n’y a pas si longtemps, où je revenais de Port-Margot après avoir accouché la femme d’un pêcheur, j’ai aperçu la camériste de ta femme qui s’amusait à faire tomber des noix de coco… à l’aide d’une fronde. Je n’ai pas attaché d’importance à ce qui m’était apparu comme un passe-temps innocent mais, à présent, je trouve que ce passe-temps innocent apporte un curieux éclairage à ton histoire…
    L’entrée de Pongo lui coupa la parole. Dans sa main, l’Indien tenait deux petites pierres tranchantes qu’il tendit à Gilles.
    — Trouvé ça près de tronc d’arbre renversé derrière haie. Quelqu’un monté sur tronc d’arbre a lancé pierre. Blessure oreille jument faite avec pierre, pas avec balle…
    Gilles était devenu très pâle. D’un geste machinal,

Weitere Kostenlose Bücher