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Haute-savane

Haute-savane

Titel: Haute-savane Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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chantage de ce Legros ? Ne devinez-vous pas quel prix il vous faudra payer pour qu’on vous la rende vivante… et intacte ? Seule l’habileté de Pongo peut nous sauver. Alors qu’attendez-vous ?
    — Vous avez raison… Cent fois, mille fois raison ! Pongo ! Pongo !
    Et Gilles, criant à pleins poumons, sortit en courant de la maison laissant Pierre seul en face de Judith.
    — Madame, dit le jeune homme d’une voix altérée, vous ne voulez pas dire que ce Legros oserait exiger qu’on lui rende le domaine en échange de la vie de ma sœur ?
    — Inutile de se leurrer, mon pauvre Pierre. C’est certainement cela. La plantation a été le but de tous les agissements de cet homme depuis que nous sommes arrivés. Mais inutile aussi de vous tourmenter. Madalen ne craint rien tant que Legros n’a pas fait connaître ses exigences et que mon époux ne les a pas refusées… ce qu’il ne ferait certainement pas, d’ailleurs. Ce qu’il faut, c’est le prendre de vitesse et, grâce à Pongo, la chose est possible, croyez-moi… Vous allez rester ici cette nuit. Je vais dire que l’on vous prépare une chambre…
    — Non, je vous remercie. Je ne veux pas laisser seul le corps de ma mère.
    — Dans une maison dévastée ? Non, Pierre. Je vais aller chez vous avec Désirée et des servantes. Nous rapporterons ici votre pauvre mère et je vous promets qu’elle y recevra tous les soins, tous les honneurs qui sont la tradition chez nous, gens de Bretagne. Nous ferons la « chapelle blanche » dans la bibliothèque.
    L’évocation des vieux usages de leur pays commun fit jaillir les larmes des yeux trop secs de Pierre. En quelques mots, Judith venait d’effacer les distances sociales et de tisser entre elle et le jeune homme des liens qu’il n’aurait jamais cru pouvoir exister. Elle avait dit « chez nous, gens de Bretagne » et c’était un peu comme si, à la voix de l’ex-Judith de Saint-Mélaine, la vieille terre ancestrale qui, depuis l’aube du monde, ouvrait sur les lames vertes de l’océan sa gueule de granit, venait de mordre au plein de l’île tropicale pour y affirmer son emprise et sa suprématie.
    Silencieusement, il prit la main de la jeune femme, y posa un instant son visage humide.
    —  Doué d’ho pennigo en ti 1  ! murmura-t-il retrouvant d’instinct la langue du terroir en face de celle qui venait de s’affirmer sa sœur de race. Il ne permettra pas qu’elle soit le prix du salut de ma sœur…
    Une heure plus tard, tandis que Judith faisait tendre de draps blancs trois des côtés de la bibliothèque, Pongo qui avait longuement examiné les traces de la maison ravagée s’enfonçait dans la nuit, armé d’une lanterne sourde, un long couteau et un tomahawk passés à sa ceinture. Il avait dépouillé la toile blanche du planteur pour ses culottes de daim indiennes et ses mocassins qui le faisaient aussi silencieux qu’un chat.
    Dans la nuit, Anna Gauthier, revêtue de son plus beau costume à bandes de velours et corsage brodé d’or, une coiffe de dentelle cachant la blessure de sa tête, fut étendue sur un lit de parade devant lequel on alluma une bonne partie de la provision de chandelles de la maison.
    Contemplant la forme rigide, sous ses superbes habits bretons, de cette femme dont toute la vie n’avait été que silence et obéissance et sur laquelle Judith jetait des brins de jasmin, Finnegan hocha la tête, soucieux.
    — Vous devriez envoyer dès maintenant un coureur chez l’abbé Le Goff, dit-il. Il faut qu’il vienne demain matin et que l’enterrement se fasse au plus vite.
    — Déjà ? Mais pourquoi tant de hâte ?
    — La nuit est chaude et la journée de demain le sera plus encore. Le sang n’a presque pas coulé de la blessure. Dans quelques heures le visage noircira… sans parler de l’odeur qui sera vite pénible.
    — On ne peut pas l’enterrer en l’absence de sa fille, protesta Gilles qui entrait à cet instant et qui avait entendu.
    Le regard calme du médecin enveloppa le jeune homme.
    — Nous ignorons quand sa fille reviendra mais je peux t’assurer que, demain soir, la vue de ce cadavre sera pénible…
    — Je vais faire ce qu’il faut, Liam, coupa Judith. J’envoie tout de suite Cupidon chez l’abbé Le Goff. Puis j’irai tout expliquer à Pierre.
    — Ne prenez pas cette peine, fit Gilles avec un soupir. C’est à moi de le faire.
    Et il s’en alla à la recherche du jeune homme, poussé autant par le

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