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Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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Axel.
     
    – En somme, tu n’es pas vraiment mon frère, pas complètement mon frère !
     
    – Non, je suis ton demi-frère, mais nous avons la même mère, dit Axel, excédé.
     
    – C’est moins… complet. Mais, ça fait rien, je t’aime tout pareil qu’avant !
     
    Tandis que Guillaume, bien que moralement éprouvé et fatigué par deux nuits blanches, allait à ses affaires, Axel fit seller un cheval et, quittant la ville purgée des déchets de la fête, prit, à travers le vignoble désert, le chemin de Belle-Ombre.
     
    Août laissait un bienfaisant répit aux vignerons. On ne pouvait qu’attendre le mûrissement du raisin en priant Dieu qu’un orage de grêle ne vînt pas vendanger pour Satan. Entre les ceps, les épouvantails aux bras de paille, vêtus de défroques, cravatés de rouge, ne trompaient plus les grives gourmandes. Mois des mariages, des fêtes pastorales, des concours de tir, des courses de barques, août vidait les parchets, remplissait les tavernes.
     
    En arrivant à Belle-Ombre, Axel Métaz fut étonné de découvrir, à l’attache, près du puits, sous l’appentis, un bel anglo-normand à robe de jais, sellé à l’anglaise. Il prit soin d’attacher sa propre monture à bonne distance du demi-sang, contourna la maison et avança vers la terrasse.
     
    Assis sur le banc, devant les volets clos, un homme fumait la pipe en observant le lac. Axel reconnut le visiteur du caveau, le général Fontsalte, l’amant de sa mère.
     
    – Puis-je vous demander, monsieur, ce que vous faites ici ?
     
    – Un pèlerinage, mon garçon, mais je m’en vais, dit Blaise, quittant son siège.
     
    Axel le retint d’un geste.
     
    – J’aimerais, puisque l’occasion est là, vous parler… un peu, monsieur.
     
    – J’ai juré à M. Métaz que je ne vous reverrai pas et j’ai pour habitude de tenir mes promesses. D’ailleurs, nous n’avons rien à nous dire, jeta d’emblée Fontsalte, pour décourager le garçon.
     
    Axel ne se laissa pas impressionner, s’assit et invita Fontsalte à reprendre sa place sur le banc.
     
    – C’est un peu facile ! Ne croyez-vous pas, monsieur ? Une famille est plongée dans le trouble et le chagrin parce qu’un nouveau père vient de me tomber du ciel comme une météorite ! Je veux essayer de comprendre comment ma mère a pu entretenir une telle liaison secrète pendant si longtemps.
     
    Le ton ferme du garçon ne déplut pas à Blaise. « Il n’a pas des Fontsalte que les yeux vairons », se dit-il.
     
    – Vous avez, en effet, le droit de savoir, reconnut Blaise après un temps de réflexion.
     
    Axel avait envie de poser des questions sur les relations de sa mère avec le général, mais il n’osait le faire. Cette curiosité paraîtrait malsaine. Et puis cet homme calme, dont le regard était le reflet du sien, l’impressionnait.
     
    – Depuis ma naissance, avez-vous souvent vu ma mère ? finit-il par lâcher.
     
    – Toutes les fois que je venais dans le pays de Vaud. Nous avions toujours grand plaisir à nous revoir. Votre mère est une femme intelligente, qui s’intéresse aux événements, à la politique, aux façons de vivre des autres. Je lui parlais de tout ça, de la guerre, des menées diplomatiques, de la vie en France, à la cour. Elle est curieuse de tout.
     
    Axel se dit que c’était là un aspect du caractère maternel qu’il n’avait pas connu.
     
    – Êtes-vous, vous-même, marié, monsieur ? osa-t-il encore.
     
    – Non. Je ne suis pas fait pour le mariage. Je suis soldat depuis l’âge de seize ans et je ne crois pas avoir couché plus d’une semaine ou deux sous le même toit ou sous la même tente. D’abord, l’Égypte : sable, pyramides, odalisques et… peste. Puis, plus souvent qu’à mon tour : la Prusse, l’Italie, l’Autriche, l’Espagne, la Russie… Fifres, tambours, mitraille, blessures, lauriers… et tout cela pour rien, mon garçon ! Nous voulions faire, avec Bonaparte, une Europe fédérative des peuples. Les rois, les princes… et l’Angleterre n’en veulent pas. C’est manqué. Il faut savoir qu’un soldat en campagne peut recevoir le coup de biscaïen qui mettra fin à la vie, bonne ou mauvaise. Alors, il ne laisse jamais passer l’occasion de jouir d’une femme belle, douce, compréhensive. Vous comprenez ? Je suis revenu souvent en Helvétie…
     
    – Je comprends. C’est ce qui s’est passé avec maman.
     
    – Oui, mais, après,

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