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Histoire De France 1618-1661 Volume 14

Histoire De France 1618-1661 Volume 14

Titel: Histoire De France 1618-1661 Volume 14 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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médecin du roi, Senelle, chargé et surchargé de lettres pour la reine Anne, pour la Fargis et autres.
    Que contenaient ces lettres? On ne le sait pas trop. Dans le procès qu'on fit, on n'ose lever qu'un coin duvoile. On parle de complots contre la vie du roi, sans en alléguer d'autres preuves que des recherches astrologiques qu'on faisait pour savoir l'époque de sa mort. Curiosité, il est vrai, mauvaise et très-sinistre. On a vu que les pronostics de la mort d'Henri IV y avaient très-réellement contribué, encouragé les meurtriers, qui se crurent sûrs de le tuer au jour prédit, marqué là-haut.
    Les deux reines et Monsieur ne souhaitaient qu'une mort, celle de Richelieu. On en avait souvent parlé, mais toujours on disait que, si Monsieur faisait tuer Richelieu, le roi le ferait mourir. Cela aurait pu arriver. Louis XIII, malade, comme Charles IX, avait sous les yeux son histoire. Dès son enfance, endoctriné par de Luynes, il tenait de lui cette opinion que Charles IX fut empoisonné par Catherine, et qu'il n'eût pas péri s'il eût fait périr son frère.
    Donc, Monsieur devait y songer, attendre encore.
    La mort de Richelieu exigeait la mort préalable du roi, qui, du reste, semblait ne devoir tarder; il ne se rétablissait point. Mais les valets parfois sont plus impatients que les maîtres; il se pouvait que ceux de Monsieur ou des reines perdissent patience et donnassent au roi malade quelque suprême médecine. L'Église y eût gagné, et l'âme aussi de Louis XIII. Car il allait se perdre, faire le grand péché d'Henri IV qui lui coûta la vie, l'alliance protestante. On le disait partout depuis un an pour irriter les catholiques, quoiqu'en réalité il ne traita que l'année suivante.
    Dans la riche collection de lettres qu'on saisit, parmi celles qui étaient écrites à la reine, aux grands personnages,il y en avait une pour une vieille bourgeoise, de nom fort significatif, mademoiselle du Tillet.
    Cette vieille était un vrai bijou du Diable, dont elle avait l'esprit. Une destinée tout à rebours. Pour sa laideur, elle avait été adorée du duc d'Épernon. Et, pour sa roture de petite bourgeoise, elle régnait dans la maison de Guise, faisait la pluie et le beau temps. Il y avait quelque chose là-dessous. Elle ne bougeait du Luxembourg, où la reine mère la traitait avec grande considération. C'était une sibylle, une espèce d'oracle; on répétait et on retenait ses mots. On la consultait en affaires, comme on fait des grands hommes qui, en leur temps, ont accompli des choses ardues et hasardeuses. Comment s'en étonner? Elle passait pour avoir été dans le secret de Ravaillac.
    Mais elle était très-fine, et cette fois, pas plus que l'autre, on ne put la prendre. Interrogée, elle plut à Richelieu en parlant outrageusement de la Fargis.
    La découverte des lettres mit les trois cabales en déroute et en division. Chacun sacrifia les deux autres.
    Monsieur traita, promit d'être l'ami de Richelieu, qui acheta ses favoris. Il promit à la reine de parler pour elle, et parla plutôt contre.
    La reine mère traita aussi pour sauver son Vaultier. Elle envoya le nonce du pape à Richelieu lui dire qu'il y avait moyen de s'arranger. Puis, inquiète, elle lui envoya encore le père Suffren pour le prier de venir, et, quand il fut venu, très-douce, elle lui dit qu'elle avait réfléchi et qu'elle sentait bien que les affaires du roi ne pouvaient se passer de lui. Elle consentit à aller au conseil, et là, faisant bon marché de la jeune reine,sa belle-fille, elle trouva fort bon qu'on punît la Fargis, qui ne pouvait guère l'être sans qu'Anne en demeurât tachée.
    Mais la plus embarrassée était la jeune reine, dont la grossesse apparaissait. Elle ne fit pas beaucoup d'effort pour la Fargis; elle pensa à elle-même, et, avec la faiblesse d'une femme en cet état, chargea et dénonça sa grande amie. Elle dit cette chose ridicule, trop visiblement improbable, qu'elle (la reine Anne) avait défendu le cardinal, refusé de le perdre, et que cette méchante Fargis avait forgé les lettres pour l'en punir et la perdre elle-même.
    Richelieu, absolument maître de la situation, montra pour la reine une grande douceur. Il craignit de déchirer le rideau de gaze légère qui couvrait le triste intérieur de la famille royale. Il craignit de rendre le roi ridicule. Il craignit peut-être pour Anne elle-même. Car cet homme, qui semblait si sec, aimait les femmes pourtant. Il croyait la

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