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Histoire De France 1618-1661 Volume 14

Histoire De France 1618-1661 Volume 14

Titel: Histoire De France 1618-1661 Volume 14 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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frappe en mai. Et chacun dit: «Il est empoisonné.» Il confirma ce bruit tant qu'il put en quittant l'hôtel du cardinal et se réfugiant à son couvent.
    Richelieu l'y calma un peu en lui faisant venir la promesse tant désirée pour la première vacance . Mais le pape était averti. Joseph fut joué jusqu'au bout. Le roi seul était sérieux dans l'affaire, il insistait contre le ministre. Ordre aujourd'hui et contre-ordre demain. Le pauvre martyr n'y tint pas. Une mauvaise nouvelle qui vint de Rome l'acheva, et il mourut deux heures après (18 décembre 1638).
    Entre la naissance du Dauphin et la mort de Joseph,Richelieu régala la cour d'une grande fête. Il fit danser le ballet de la félicité publique . Chose hardie au moment où de toutes parts il avait des revers. Impuissance complète en Italie. En Espagne, un honteux échec, Condé, Sourdis en fuite. Au Nord, nouveau projet de conquérir les Pays-Bas avec le prince d'Orange, et, pour tout résultat, la reprise d'une petite place. Richelieu n'avait réussi que là où il n'était pas. Le général aventurier, Weimar, qui guerroyait aidé de quelque argent de la France, battu, battant, avait pourtant à la fin quatre fois défait l'ennemi, pris Brisach. Il songeait à se faire, entre nous et l'Empire, un petit royaume d'Alsace.
    Richelieu assurait qu'il avait pris Brisach pour nous. Mais Weimar montra le contraire. Il garda sa conquête, et il allait devenir un danger pour la France quand une fièvre nous en délivra (18 juillet 1639). On admira encore que les ennemis de Richelieu mourussent ainsi toujours à temps.
    L'invincible ennemi dont on ne pouvait se défaire, c'était l'épuisement du royaume, l'abîme de la misère publique qui se creusait de plus en plus. Le gouvernement était sérieux, nullement dilapidateur, le ministre économe, le roi avare. Il avait réduit à rien les libéralités royales. Les grands revenus de Richelieu ne paraîtront pas excessifs si l'on songe que sa maison était réellement un ministère des arts qui pensionnait les gens de lettres (nullement nourris par leurs ouvrages alors). Ajoutez-y les fêtes et les diverses dépenses de représentation que Richelieu prenait sur lui. Au milieu de cette guerre dévorante, de cet effort immense pour refairel'armée chaque année, il avait réussi pourtant à créer une marine. Dans tout cela, il y avait certes beaucoup à admirer, et les éloges de Balzac et de tant d'autres ne sont pas entièrement déraisonnables. Madame de Motteville, comparant Richelieu à Mazarin, le voleur, le prodigue, si justement méprisé et haï, a été jusqu'à dire cette parole excessive et absurde: «Richelieu était adoré.»
    Il dit dans ses Mémoires qu'il avait augmenté l'impôt modérément . Cela est vrai relativement, eu égard à l'immensité des dépenses. D'année en année se succèdent des édits sages pour mieux régler la répartition des taxes. Mais toute cette sagesse devait échouer contre ce que nous avons dit ailleurs: il ne pouvait toucher au grand corps riche , au clergé, pas davantage à la noblesse, obérée, ruinée, mendiante. Il s'efforçait d'atteindre la bourgeoisie par sa taxe des gens aisés , et par un examen sévère des exemptions sans titre et de la fausse noblesse.
    La bourgeoisie propriétaire se revengeait sur ses fermiers, métayers, paysans, haussait les baux, suçait et resuçait la terre. En dernière analyse, c'était sur le cultivateur que l'impôt retombait d'aplomb.
    En 1635 et 1639, les parlements de Toulouse et de Rouen révélèrent le cruel mystère de ce gouvernement. Même quand le chiffre des taxes n'augmentait pas, elles devenaient chaque année plus pesantes. Pourquoi? Parce qu'en chaque commune, ce que ne payaient pas les insolvables, les ruinés, les pauvres gens en fuite, ceux qui restaient solvables le payaient. Mais, écrasés par cette solidarité désolante, ils devenaientpeu à peu moins solvables, grossissaient le nombre des ruinés et des gens en fuite. Des villages devenaient déserts.
    On saisissait, on prenait, vendait tout, jusqu'aux jupes des femmes. Le parlement de Normandie dit qu'elles ne vont plus à la messe, n'osant montrer leur triste nudité. La saisie principale, malgré les ordonnances d'Henri IV, tombait généralement sur les bestiaux. On enlevait le troupeau du village. Et dès lors, plus d'engrais; la terre jeûnait, ainsi que l'homme, ne se réparait plus. Le maigre laboureur semait chaque année dans un sol plus

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