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Histoire de France

Histoire de France

Titel: Histoire de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques Bainville
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nous leur barrions l’avenir. Nous devions nous attendre à leur jalousie et à leur hostilité et leur intérêt était de nous voir engagés dans de stériles entreprises en Europe tandis que nous négligerions la mer, car un pays qui oublie sa marine ne garde pas longtemps ses colonies.
    Après le désastre de la Hougue, le public français s’était dégoûté des choses navales. Il se dégoûta des choses coloniales après la faillite « du Système de Law » fondé sur l’exploitation des richesses d’outre-mer, et cet état d’esprit, personne ne l’a mieux exprimé que Voltaire par son mot célèbre sur les arpents de neige du Canada. L’intérêt allait toujours aux mêmes questions, pourtant réglées successivement par les traités de Westphalie, des Pyrénées et d’Utrecht. On était sûr d’exciter une fibre chez les Français en leur parlait de la lutte contre la maison d’Autriche. Cette lutte n’avait plus de raison d’être, mais la tradition était plus forte que la raison. Il y avait un parti nombreux, éloquent, pour qui l’ennemi n’avait pas changé et le gouvernement qui recommençait à combattre les Habsbourg était sûr d’être populaire. À cet égard aussi, la Régence, en cherchant, pour les raisons que nous avons vues, les bonnes grâces de l’opinion, greva le règne de Louis XV.
    Au moment où ils moururent, le Régent et le cardinal Dubois avaient changé de front. Ils étaient entrés dans une nouvelle triple alliance, franco-anglo-espagnole, celle-là, contre l’empereur Charles VI qu’il s’agissait de chasser d’Italie pour y installer les Bourbons d’Espagne. L’Angleterre s’était mise de la partie, sans respect pour le traité d’Utrecht, afin de ruiner les entreprises maritimes de Charles VI à Ostende, à Trieste et à Fiume. Habilement, elle avait marchandé son concours et l’avait donné à condition que la France renonçât à son commerce en Espagne. Ainsi la politique anglaise suivait son dessein, qui était de supprimer toutes les concurrences navales et commerciales en exploitant les divisions, les ambitions et les erreurs des puissances européennes. Ce projet, arrêté par la mort de ceux qui, en France, l’avaient conçu, ne fut pas mis à exécution, mais il ne manqua pas de conséquences. Pour sceller la réconciliation des maisons de France et d’Espagne, Dubois et le Régent avaient arrangé un mariage entre Louis XV et une infante de cinq ans. Exprès ou non, c’était retarder le moment où la couronne aurait un héritier. Il est donc difficile de blâmer sur ce point le duc de Bourbon qui, devenu premier ministre après la mort du Régent, défit ce que celui-ci avait fait, renvoya à Madrid la jeune infante, ce dont se fâcha Philippe V qui se réconcilia avec l’empereur : mais cette réconciliation était plus conforme à nos intérêts qu’une guerre où l’Espagne et l’Autriche, qui nous étaient utiles l’une et l’autre, se seraient épuisées, et nous avec elles, au bénéfice de l’Angleterre seule. On a dit qu’en choisissant pour Louis XV un parti modeste, en lui donnant pour femme Marie Leczinska, fille du roi détrôné de Pologne, le duc de Bourbon et Mme de Prie se proposaient de dominer la future reine. Il y a du vrai dans cette imputation, mais le choix était difficile puisqu’on avait en vain demandé la main d’une princesse anglaise. De plus Marie Leczinska avait vingt-deux ans et elle ne devait pas tarder à être mère, ce qui, en assurant la succession, abolissait les intrigues qui avaient rempli la minorité de Louis XV, dont la santé frêle excitait tant d’espérances et de jalousies. Il n’est que trop sûr, en tout cas, et c’est la conclusion à tirer de la Régence, que la monarchie a subi un dommage considérable et qui compte peut-être parmi les causes lointaines de la Révolution, lorsque la mort ayant rompu l’ordre naturel des générations, Louis XIV n’ayant laissé qu’un arrière-petit-fils, un enfant eut pris la suite d’un vieillard. Nous avons déjà observé que, si de pareils malheurs étaient arrivés chez les premiers Capétiens, leur dynastie n’eût probablement pas bravé les siècles.
    En général, les historiens reprochent à Louis XV son indolence et son apathie. Il est vrai qu’il n’imposa pas toujours sa volonté, même quand il avait raison, et il était sensé. Pourtant, et c’est en quoi il diffère de Louis XVI, il ne doutait pas de son

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