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Histoire de France

Histoire de France

Titel: Histoire de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques Bainville
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France venait à manquer, toutes les renonciations n’empêcheraient pas que lui, duc d’Orléans, ne fût regardé comme un usurpateur à l’égard du roi d’Espagne. Il ne pouvait donc, disait Stair, avoir d’allié plus sûr que le roi George. »
    Telle fut la raison secrète de la triple alliance anglo-franco-hollandaise, du pacte par lequel le Régent et son ministre Dubois se livrèrent même à l’Angleterre. Le motif avoué, auquel des historiens se sont laissé prendre, c’était de garantir la paix d’Utrecht qui n’avait pourtant aucun besoin d’être garantie, comme le remarquait Albéroni, le ministre du roi d’Espagne. Le Régent et Dubois s’abandonnèrent aux Anglais qui les conduisirent droit à la guerre. Et la guerre avec qui ? Avec l’Espagne, aux côtés de laquelle nous venions de lutter contre l’Angleterre pour y établir un Bourbon. Que Philippe V ait commis des fautes en se mêlant des affaires de France, en s’obstinant à maintenir ses droits, au cas où Louis XV mourrait, ce n’est pas douteux. Mais on a beaucoup exagéré la « conspiration » de son ambassadeur Cellamare avec la duchesse du Maine, et cette intrigue, plus mondaine que politique, servit surtout de prétexte à la guerre contre l’Espagne (1718). Les fautes de Philippe V n’excusent pas celle qui consista, pour le seul profit de la politique anglaise, à détruire le système naturel de nos alliances, tel qu’il résultait de la guerre de succession. Les prétentions de Philippe V étaient platoniques tant que le jeune roi vivait. Il était facile de rassurer l’Angleterre, puisqu’elle s’alarmait encore de la réunion des deux couronnes, ou feignait de s’en alarmer. Si les projets d’Alberoni sur la Sicile étaient aventureux, ce n’était pas une raison pour aider l’Angleterre à détruire la marine espagnole, ce dont se chargea l’amiral Byng. Ce n’était pas une raison non plus pour envahir l’Espagne avec une armée française et pour y détruire de nos propres mains les vaisseaux en chantier et les arsenaux, c’est-à-dire pour assurer la suprématie maritime des Anglais. Cette guerre, avantageuse à l’Angleterre seulement, finit par le renvoi d’Alberoni qui avait voulu « ranimer le cadavre de l’Espagne » et par la renonciation de Philippe V à la Sicile ainsi qu’à ses droits à la couronne de France. Pouvons-nous tant nous offusquer à distance, que les Bourbons d’Espagne aient gardé de l’attachement, même inconsidéré, pour leur pays d’origine ? Nous ne les avions pas installés à Madrid pour qu’ils oubliassent tout de suite qu’ils étaient Français.
    Cette inutile guerre d’Espagne, qu’on a pu appeler fratricide, avait déjà troublé l’esprit public, Philippe V ayant adressé aux Français un manifeste qui ne resta pas sans écho, où il rappelait qu’il était le petit-fils de Louis XIV. Un autre événement, en France même, eut des conséquences encore plus graves parce qu’il fit des victimes, des ruines et qu’il engendra un durable mécontentement.
    Le nom de Law et celui de son Système sont restés fameux. Chacun les connaît, ils ont traversé deux siècles, et l’on en parle encore comme on parle des assignats. C’est le signe de l’impression profonde qu’avait produite cette aventure financière. Pour comprendre comment le Régent fut conduit à donner sa confiance et sa protection à l’Écossais Law, banquier ingénieux et hardi, il faut encore se rendre compte de son désir de plaire. Nous avons déjà vu qu’à la mort de Louis XIV, nos finances, rétablies par Colbert, étaient retombées dans un état critique. Il y a de la monotonie à constater que nos grandes entreprises extérieures, l’achèvement ou la défense du territoire, ont, à toutes les époques, consomme d’énormes capitaux et laissé de difficiles questions d’argent à résoudre. Pour trouver des ressources et rétablir l’équilibre par les moyens ordinaires, il fallait demander des sacrifices aux contribuables, supprimer les privilèges, quelle qu’en fût l’origine, faire payer tout le monde et beaucoup, obliger les enrichis de la guerre à rendre une partie de leurs bénéfices, réduire les rentes et les pensions. C’est ce que le duc de Noailles tenta honnêtement, tout en s’efforçant d’éviter la pleine banqueroute que certains, comme Saint-Simon, conseillaient, car on a toujours conseillé les mêmes choses, dans les mêmes

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