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Histoire de France

Histoire de France

Titel: Histoire de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques Bainville
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République devînt républicaine, il ne restait plus qu’à en expulser les conservateurs avec le président qu’ils avaient nommé. C’est ce qui arriva en peu de mois par un ensemble de causes où la politique extérieure vint se mêler à la politique intérieure.
    Thiers, qui avait tout dirigé pendant deux ans, n’avait eu qu’un programme de politique étrangère : la paix. Après l’avoir faite, il en avait rempli les conditions. En premier lieu, il fallait délivrer la France de l’occupation allemande. À tout instant, au moindre prétexte, Bismarck pouvait manifester de nouvelles exigences. La France ne serait pas tranquille avant que le dernier soldat allemand eût repassé la nouvelle frontière. Pour cela, les cinq milliards devaient être payés au plus vite. Les Français aiment à tenir leurs engagements. Rien ne fut refusé pour la libération du territoire. La confiance dans le relèvement de la France était si grande, au-dedans et au-dehors, qu’un emprunt de trois milliards avait été couvert quatorze fois. Ainsi, on fut en mesure de payer par anticipation. Au mois de mars 1873, une convention franco-allemande avait fixé le dernier versement au 5 septembre suivant, moyennant quoi l’occupation prendrait fin un an avant la date prévue par le traité, ce qui eut lieu. Mais, dans l’intervalle, Thiers était tombé et sa chute avait causé à Berlin du mécontentement et de l’inquiétude. Bismarck le savait devenu pacifique autant qu’il avait été belliqueux dans sa jeunesse et son âge mûr. En effet, Thiers qui, en 1866, avait annoncé les dangers de l’unité allemande voyait maintenant la France battue, affaiblie, isolée, et il pensait que le mieux était de s’entendre avec le puissant vainqueur. Il s’était empressé de reconstituer une force militaire, parce qu’il savait que la France ne peut se passer d’une armée, mais rien n’était plus éloigné de son esprit que l’idée de revanche. Cela, Bismarck ne l’ignorait pas. À ses yeux, Thiers était le garant de la paix qu’il avait signée. Lorsque Thiers eut été renversé du pouvoir, le chancelier de l’Empire allemand montra qu’il craignait tout à la fois le gouvernement des conservateurs, capable de nouer en Europe des alliances monarchiques et catholiques, et le gouvernement des républicains ardents, ceux qui, avec Gambetta, avaient voulu la guerre à outrance et voté contre le traité de Francfort. De plus, à aucun moment, Bismarck n’avait cessé de se méfier de la France et de l’Europe. Il était apparu tout de suite que le nouvel Empire allemand, fondé par la force, ne compterait que sur la force pour se maintenir. Il allait imposer à tous ses voisins le principe de la nation armée et de la paix armée, qui était gros d’une autre guerre, plus terrible que toutes celles que le monde avait connues. La grande Allemagne fondée par les erreurs et la défaite de la France, par la bienveillante neutralité de l’Europe, préparait le sombre avenir que les hommes clairvoyants du dix-neuvième siècle avaient prédit.
    Pour toucher plus vite le solde des cinq milliards, Bismarck avait accepté la convention du 15 mars 1873. À peine eut-il évacué la dernière ville française qu’il le regretta. Sous la présidence de Thiers, il avait déjà menacé plusieurs fois de garder Belfort. Une fois payé, il trouva que la France se relevait trop vite et qu’il serait peut-être bon de « lui casser les reins ». Cependant la politique extérieure de la France, après Thiers comme avec lui, restait prudente. Le duc Decazes, ministre des Affaires étrangères du cabinet de Broglie, travaillait à éviter les conflits. Quoique la majorité de l’Assemblée nationale fût catholique, le gouvernement refusait d’intervenir en Italie pour le pouvoir temporel du Pape. Rien pourtant n’empêcha Bismarck de prendre une attitude agressive et de multiplier les incidents. Au mois de mai 1875, alléguant que notre réorganisation militaire était dirigée contre l’Allemagne, il annonça son dessein « d’en finir avec la France ». Cette fois, la Russie d’abord, l’Angleterre ensuite firent savoir à Berlin qu’elles ne permettraient pas une agression. La « vieille Europe s’était réveillée », disait le duc Decazes, qui avait su provoquer ces interventions diplomatiques. Il n’en est pas moins vrai que nous avions été ou paru être à deux doigts de la guerre au moment où la

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